Boujemaa Remili: Il n’y a pas de neutralité positive ou négative, Il n’y a qu’une neutralité naïve !
Boujemaa Remili s’apprête à publier un livre au titre évocateur de : «Une mechta et des concepts», dans lequel il présente le récit d’un parcours d’homme et d’un itinéraire d’idées. Leaders a obtenu l’autorisation d’en publier juste un extrait concernant la question qui a été l’origine des houleux débats parlementaires des derniers jours.
La question de la souveraineté exige une clarification minimale de la géopolitique. Depuis la chute de l’URSS le monde se trouve dans l’unilatéralisme intégral. La compétition étatsunienne avec la Chine est économique. L’Union Européenne est sous le parapluie américain et la Russie est encore dans la tentation de la reconquête, très difficile, du statut à jamais perdu de l’ex-URSS.
Mais la nouvelle donne géopolitique a été également à l’origine de la volonté d’émergence de certaines «Puissances régionales de l’Afrique du Nord / Moyen-Orient» tel que la Turquie, l’Iran, anciennement l’Irak, avant sa destruction, l’Arabie Saoudite, l’Egypte, jusqu’à l’Algérie et le Maroc.
En dehors de l’Iran et de l’Algérie, tous les autres pays cités sont également sous parapluie américain. Mais la Turquie, humiliée par le refus d’adhésion à l’Union Européenne, malgré toutes les concessions présentées, essaie de jouer le rôle de l’élève indiscipliné, en recherchant des alliances d’énervement pour ses amis notamment étatsuniens, que ce soit du côté de la Russie, la Chine ou l’Iran, trois pays avec lesquels la Turquie se trouve par ailleurs, en compétition concernant les pays musulmans d’Asie. En plus, la Turquie n’étant pas une nation ethniquement homogène, elle connait sur son flanc sud une situation assez déstabilisante pour son équilibre, en rapport avec la question kurde, qui bénéficie du soutien et de la sympathie de la part des USA et de l’UE.
Les quatre autres facteurs qui entrent en jeu dans la géopolitique régionale sont Israël, l’islam politique, les hydrocarbures et la compétition sunnisme-chiisme.
Cette configuration devrait être profitable à la Tunisie, qui n’a pas d’objectifs de rapports de force qui lui sont propres, à l’exception du soutien qui devrait être sans faille à la cause palestinienne. Aussi, à l’exception des rapports avec Israël, qui devront rester dans la rupture totale tant que les palestiniens n’ont pas recouvré leurs droits, la Tunisie est-elle appelée à avoir les meilleurs rapports possibles, avec tous les autres acteurs précités, tant que sa souveraineté est respectée et ses droits nationaux sauvegardés.
Toutefois, c’est l’islam politique qui dans ce jeu de la géopolitique propre à sa zone d’appartenance intéresse au plus haut point la Tunisie. C’est pourquoi le pays développe une sensibilité particulière vis-à-vis de cette question. Actuellement seuls Qatar et la Turquie apparaissent comme ayant été les deux pays qui ont soutenu le terrorisme islamiste en Syrie et sont prêts à l’exporter en Libye et en Tunisie. Ce n’est pour le moment pas le cas ni de l’Arabie Saoudite, ni des Emirats, encore moins de l’Egypte, de l’Algérie, de l’Europe ou des Etats-Unis.
Ce risque majeur pour la Tunisie et sa révolution lui interdit toute neutralité, qui en n’essayant d’être ni positive ni négative, peut être naïve. La Tunisie devrait s’opposer, y compris par les armes, à tout risque d’installation de pouvoir islamiste à ses frontières. Il y va de sa survie.C’est pourquoi les relations internationales de la Tunisie doivent être soustraites à toute forme de surenchère de consommation locale, qui peuvent nuire au pays sans espérer lui apporter quoique-ce soit. Une fois sa doctrine en la matière arrêtée la nation doit s’exprimer comme un seul homme. L’unité nationale étant dans ce cas l’arme de dissuasion la plus massive.
Boujemaa Remili
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