Hommage à ... - 20.05.2023

L’hommage du professeur Houcine Jaïdi au docteur Farhat Mellakh

L’hommage du professeur Houcine Jaïdi au docteur Farhat Mellakh

Les patients du Docteur Farhat Mellakh sont encore sous le choc occasionné par le décès de leur médecin, le 17 courant. Leur grande douleur rejoint celle des parents, des voisins, des amis et des confrères du cher disparu. Certains parmi eux le savaient souffrant au cours de ces dernières semaines et appréciaient hautement le courage avec lequel il affrontait la maladie. Mais ils étaient loin d’imaginer sa disparition soudaine, alors qu’une sérieuse prise en charge médicale leur donnait beaucoup d’espoir.

Il était un médecin généraliste d’exception. La médecine était pour lui un sacerdoce qui devait être pratiqué dans le strict respect du Serment d’Hippocrate. Depuis plusieurs décennies, sa grande compétence était connue et reconnue par sa large patientèle mais aussi par de très nombreux professionnels de la santé toutes catégories confondues, vers lesquels il adressait ses patients pour un besoin ou un autre. 

Très tôt, il a développé une grande compétence en matière de diagnostic qu’il pouvait réussir, en cas de besoin, au moyen d’un entretien téléphonique rigoureux. Sa maîtrise de l’art de la médecine, basée sur une vaste culture médicale et nourrie par l’expérience et la documentation continue, lui permettait de soigner rapidement, d’orienter efficacement et de faire éviter les dépenses inutiles. Sa probité toute naturelle rejaillissait sur ses rapports avec ses patients et leur entourage. Il refusait fermement les honoraires que lui proposaient les gens démunis à qui il n’hésitait pas d’acheter les médicaments qu’il leur prescrivait.

Médecin de famille, il était aussi médecin de campagne dans le bon vieux sens de l’appellation car il avait choisi, il y a longtemps, d’installer son cabinet à Borj El Amri où il recevait aussi des patients des environs de la localité fortement marquée par la ruralité. Parmi ses patients, nombreux étaient ceux qui habitaient le grand Tunis et l’ont choisi comme médecin de famille qu’ils consultaient en cabinet sans regarder à la longue route. Ils savaient qu’ils pouvaient toujours compter sur lui, chez eux, de jour ou de nuit, en cas d’urgence.

Son humanisme était à toute épreuve.  Passer voir un ou plusieurs grands malades, à domicile, avant ou après sa journée en cabinet était pour lui un rituel quotidien ou presque. A sa disponibilité sans limite, s’ajoutait son abnégation totale et son empathie rassurante pour tous ceux qui l’approchaient. Quelques jours seulement avant son décès, alité et dissimulant son mal pour ne heurter personne, il répondait encore, au téléphone à des malades en détresse et qui ne voulaient s’adresser qu’à lui. Dans la banlieue ouest de Tunis et bien au-delà, ses bienfaits rayonnaient dans un rayon de plusieurs dizaines de kilomètres. La société civile locale se souviendra longtemps de ce qu’il lui a apporté dans la plus grande discrétion.

Sa vaste culture et sa curiosité intellectuelle en plus d’un domaine lui donnait une aisance naturelle pour discuter de sujets qui étaient parfois à mille lieues des sciences médicales mais pour lesquelles il laissait voir, sans pédantisme, une vaste culture. Intellectuel, il avait un grand respect pour ceux qui exerçaient les métiers manuels dans les règles de l’art. Ses proches savent combien de compétences techniques et manuelles n’avaient pas de secret pour lui.

Son enterrement à Ras Jebel, la ville natale de ses parents a été, jeudi dernier, l’occasion d’un vibrant hommage tout en retenue, qui lui a été rendu par ses proches et par ceux qui, sans l’avoir connu de près, étaient nombreux à avoir eu des échos réitérés de ses qualités exceptionnelles de médecin et d’homme.

Un jour, voulant savoir de qui il tenait son grand dévouement pour ses patients et la grande éthique avec laquelle il les soignait et les orientait dans un monde devenu déroutant, j’ai dû me faire amicalement insistant pour l’entendre dire : «Je n’ai pas de mérite particulier. C’est d’abord l’éducation que j’ai reçu de mes parents et puis l’apprentissage de quelques grands maîtres».

Parce qu’il a fait honneur à l’exercice de la médecine générale dans des conditions souvent bien difficiles, le défunt a mérité de sa discipline et de la patrie. Si le ministère de la Santé ou le Conseil de l’Ordre des Médecins s’avisaient un jour de créer un prix ou une médaille du ‘’Meilleur médecin de famille’’, une évaluation impartiale des mérites donnerait au Docteur Farhat Mellakh des chances réelles de voir son nom attribué à la distinction et à tout le moins de se faire décerner cette marque de reconnaissance à titre posthume.

Je garderai de lui le souvenir impérissable d’un grand médecin, d’un ami sûr et d’un homme de bien.
Adieu Farhat et paix à ton âme.

Houcine Jaïdi

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