"Fakhfakh, c’est fini ! Il paye le prix de son arrogance et de son imprudence", affirment ses contradicteurs
Il a fini par s’y résigner, après avoir longtemps tergiversé, essayant de tenir tête à l’évidence, dans un déni arrogant. En remettant mercredi sa démission au président de la République, le chef du gouvernement Elyès Fakhfakh s’épargne un cinglant désaveu parlementaire, alors qu’une motion de retrait de confiance à son encontre recueille déjà plus de cent signatures.
Il désamorce aussi une très grave crise politique qui aurait failli impacter redoutablement l’ensemble des acteurs significatifs, mettant en confrontation directe l’UGTT et Ennahdha, ainsi que d’autres partis.
Fakhfakh évite également au Président de la République qui l’avait proposé à la Kasbah, une situation très délicate au cas où une motion de censure aurait été votée et un successeur désigné, en dehors d’un accord avec Carthage. La confrontation aurait été redoutable, avec un clivage très fort au sein de l’exécutif, avec un chef du gouvernement s’attachant à ses larges prérogatives, et un président de la République confinés dans des attributions bien limitées.
Comment tout s’est accéléré
Maintenant que la page du gouvernement Fakhfakh est sur le point d'être tournée, c’est surtout vers l’avenir qu’il convient de s’intéresser. D’ores et déjà, des consultations sont engagées pour désigner la personnalité la plus appropriée pour former le nouveau gouvernement. De premiers enseignements méritent cependant d’être tirés de ce qui vient de se passer.
Tout s’est déclenché en spirale dès le dimanche soir lorsque la Choura d’Ennahdha a mandaté son chef, Rached Ghannouchi, « de convenir avec le président de la République et les autres parties prenantes du remodelage du gouvernement ». Une formule pudique inventée pour ne pas dire clairement le débarquement de Fakhfakh. Ahuri, le chef du gouvernement convoque d’urgence les siens en conclave, le soir-même à Dar Dhiafa, pour évaluer les options possibles. Une seule possibilité envisageable était bannie pour lui : la démission.
La bouffée d’oxygène offerte par Saïed, dilapidée
La position d’Ennahdha ne fera que susciter, après l’ire du chef du Gouvernement, une très vive réaction indignée du président Kais Saïed. « Pas de discussion, alors qu’un gouvernement légitime est en place, et aucune concertation en dehors du cadre constitutionnel » affirme le président de la République, « en recevant Fakhfakh en présence du secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Taboubi ». Cette précision de Carthage, attire l’attention. Alors que, d’habitude, le chef de l’État reçoit un visiteur en présence du chef du gouvernement, nous voilà dans une scénarisation cocasse, confirmée par les dispositions protocolaires, mettant Taboubi à la gauche de Saïed, comme s’il fait partie de proches collaborateurs…
"Le plus étonnant, c’est que Fakhfakh ne réalise pas l’importance vitale de cette bouffée d’oxygène que lui insuffle Saïed, avec Taboubi à ses côtés, relève un observateur. Au lieu de déclarer, depuis Carthage, qu’il puise dans cet appui un encouragement à la reprise du dialogue, tendant la main à Ennahdha et à l’élargissement de sa coalition, s’ouvrant sur d’autres partis, il persiste dans son entêtement. Pire, encore, il entend devancer les évènements et passer à l’attaque."
Des erreurs fatales
Dès la fin d’après-midi du lundi, la Kasbah se fend d’un communiqué taillé au couteau dénonçant Ennahdha. Il annonce la décision de Fakhfakh de procéder, par anticipation, à un remaniement ministériel, devant remplacer les ministres d’Ennahdha qui compteraient se retirer du gouvernement. Cette première fausse manœuvre sonne le glas de son instigateur.
Mardi, en rétropédalage, Fakhfakh fera les yeux doux aux ministres d’Ennahdha, cherchant à maintenir ceux qui lui semblent incontournables et utiles. Au siège d’Ennahdha à Montplaisir, on y voit « une tentative de récupération politique et de division des rangs, encore plus de mauvais goût, intervenant à l’orée d’un congrès déterminant ». Deuxième fausse manœuvre.
Woufa El Mektoub
D’autres gesticulations, mais aussi missions de bons offices, s’accélèrent en coulisse. Mardi tard dans la soirée, la Choura rendra son verdict sans appel : retrait de confiance à Fakhfakh.
Il ne restait plus qu’à acter une « sortie honorable » pour sauver la face sur le mode de « Woufa El Mektoub ». La scène se déroulera à Carthage, devant le président Saïed assisté de deux témoins, Ghannouchi et Taboubi. Clap fin. Rideaux. Au suivant
Désormais chargé d’expédier les affaires courantes, Fakhfakh n’aura qu’à attendre les conclusions des différentes enquêtes ouvertes au sujet de cette affaire d’interférence d’intérêts. Celle du Contrôle général des Services publics (la Kasbah) de la Commission ad-hoc de l’ARP et surtout celle du parquet. Peu importera le verdict technique et juridique, la sanction politique est déjà prononcée.
Une nouvelle exception tunisienne
L’effervescence est cependant ailleurs, chacun s’employant à plaider auprès du président Saïed les vertus de son candidat et de le convaincre de le désigner. Ces démarches pressantes exercées en solo pourraient s’accompagner d’une initiative parlementaire en dehors des dispositions constitutionnelles. Rien n’empêche des députés de convenir, en grand nombre, d’un candidat et de le proposer au chef de l’État en lui recommandant fortement de le charger de former le gouvernement. Ça sera alors une nouvelle exception tunisienne.
Mais alors que tous candidats à la Kasbah, la sécheresse sévit, le chômage s’aggrave, les faillites partent en cascades, les finances publiques s’enlisent… Et un rebond du Convid-19 n’est pas exclu. Bref, tout ce qui menace gravement les fondamentaux du pays… Mais qui s'en soucie?
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Nos politiciens doivent tenir compte de l'intérêt supérieur de l'état plutôt qu'à leurs intérêts personnels . Fakhfakh aurait dû démissionner dès l'éclatement de cette affaire . Notre pays ne peut pas se permettre une situation politique instable qui pousserait le pays au chaos .
La route de la Kasbah ou la route de la mort a besoin de vous. Malheureusement les Tunisiens ne mangent plus “El baitt” alors pas besoin de postuler messieurs Jomaa, Chahed, Ali, et l’autre.
Les Présidents d'un jour est aussi une exception tunisienne! L'Arrogance, le nombrilisme et la pensée clanique sont toujours les mêmes virus qui rangent toutes les espérances de notre Noble Peuple Tunisien, aussi disposé à relever les défis et soutenir ses Leaders dévoués, qu'à déclarer le processus révolutionnaire un chapitre inachevé et toujours brûlant. Monsieur Fakhfakh ne voulait même pas répondre à nos sincères et amicaux conseils. Il pensait le temps en décor éphémère, son arrogance et son manque de sagesse l'ont anéanti. Le Politique est une Science et La Politique est un Art de Vivre. Aujourd'hui seul Un Homme Libre, sans tendances partisanes, politiques et/ou syndicales, pourrait rééquilibrer le "Petit Navire". Notre pays ces jours-ci est entre La Baraka d'un miracle Divin et le KO tant redouté. Vive La Tunisie Libre, Vive Le Peuple Tunisien Solide et Solidaire et Vive La Révolution Tunisienne La Garantie Paisible et L'Arme Fatale de nos concitoyens déçus et affaiblis. Dr. Amine GUARRAOUI