Samir Gharbi: Quid du "Fonds 1818 de lutte contre le Covid-19"…
Les Tunisiens avaient connu le Fonds 2626 de «solidarité nationale» pour la lutte contre la pauvreté… Ils ont répondu à l’appel lancé en 2011 par… Taïeb Baccouche. Après le volontariat, le 26-26 est devenu une «obligation», un signe d’allégeance à Ben Ali… Géré hors de toute règle de transparence, le 26-26 a servi – on ne sait pas à hauteur de combien – à l’usage discrétionnaire de Ben Ali…
Avec le Covid-19, on annonce la création d’un Fonds 18-18. Mais on n’a pas pris la précaution de dire à ceux qui vont contribuer les règles de bonne gestion : qui va s’en occuper? Qui va rendre des comptes? Qui va contrôler?
J’ai beau cherché, je n’ai trouvé que confusion (sur l’initiative elle-même) et rien sur la future gestion des ressources: on annonce le 21 mars que la somme de 27,1 millions de dinars a été collectée, dont 21 millions en «promesses» et 6,2 millions en versements effectifs…
D’abord, qui a pris l’initiative de lancer ce fonds? La Haica ou le ministre de la Santé?
Des sites d’informations ont dit que ce fonds a été organisé «à l’initiative de la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA) sous la supervision de la télévision nationale et avec la participation de différentes institutions audiovisuelles»… Que les dons vont servir à financer la «lutte contre le coronavirus». Et que d’après «le président de la HAICA, Nouri Lajmi, cette initiative vise aussi à sensibiliser les citoyens à l’importance de leur rôle dans la lutte contre cette pandémie à travers le respect des mesures préventives et des recommandations sanitaires».
Consulté, le site web de la Haica n’a rien publié à ce sujet. Voir capture d’écran (prise ce jour à 18h06).
Un autre site écrit
«Une réunion a eu lieu ce mardi 17 mars entre les représentants de la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA), de la présidence du gouvernement, du ministère de la Santé et de la Télévision tunisienne. Il a été convenu lors de cette réunion que le téléthon sera organisé le vendredi 20 mars, coïncidant avec la fête de l’indépendance, pour collecter des dons au profit du ministère de la Santé dans sa lutte contre le coronavirus. L’idée du téléthon, présentée par la HAICA, sera sous la tutelle de la télévision publique et avec la participation de différents médias audiovisuels désireux d’y prendre part…»
Le même jour, 17 mars, un autre site attribue la décision de créer le fonds non pas à la Haica, mais au ministre de la Santé… Il écrit ceci:
«Le ministre de la Santé, Abdeltif Mekki, a annoncé, ce dimanche 15 mars 2020, le lancement d’un service national de dons au profit des structures hospitalières tunisiennes.
Ce service doit permettre aux volontaires souhaitant venir en aide à l’Etat dans sa lutte contre le coronavirus de faire un don, à partir de 1 dinar, par voies officielles.»
Et voilà que le 22 mars, un autre site annonce la création d’un autre fonds de solidarité:
«En cette première journée du début du confinement sanitaire total en Tunisie, le ministère des Affaires Culturelles a annoncé dimanche, la création d’une structure d’aide aux divers professionnels du secteur culturel et artistique baptisée “Fonds Relance Culture” (FRC). Le lancement de cette nouvelle structure à dotation mixte entre le secteur privé et le secteur public, intervient suite au discours du Chef du Gouvernement, Elyes Fakhfakh, samedi soir.
«S’agissant du secteur culturel, la création du Fonds Relance Culture constitue “une première mesure qui vise à accompagner les opérateurs et espaces culturels, publics et privés, fortement déstabilisés par cette crise globale…»
Aucun site n’a cherché à savoir comment ce fonds va être géré? Quelle structure ou institution va être en charge de la réception des fonds et de leur utilisation? Quels établissements de santé publique vont en bénéficier?
Pour conclure, je dirai
La Tunisie n’est plus au temps du 26-26, au temps de la dictature. Dans la Tunisie de 2020, l’Etat doit rendre des comptes aux citoyens sur la gestion des ressources. Fini la période de gestion opaque et discrétionnaire des années 2011-2019. Il y va de la crédibilité du nouveau gouvernement. Il faut enfin que les choses changent, dans le bon sens, j’entends. Sinon, gare au retour du bâton.
Messieurs, prenez donc le temps d’expliquer aux Tunisiens, de respecter les horaires promises de vos interventions, du tenant et des aboutissants de vos décisions. Ne les prenez pas pour des moutons de Panurge, ni pour des imbéciles.
Samir Gharbi
Illustration:
Capture d’écran du site Haica (22 mars à 18h06): le dernier communiqué est daté du 19 mars…
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l’Etat doit rendre des comptes aux citoyens sur la gestion des ressources. Fini la période de gestion opaque et discrétionnaire