En cinq actes, Béji Caïd Essebsi recadre ses relations avec Ennahdha
L’occasion lui a été bien offerte : Béji Caïd Essebsi devait commencer à révéler ce qu’il pense désormais du parti islamiste Ennahdha, jusque-là son partenaire politique depuis les élections de 2014. Il ne manquera pas de l’exprimer, en première petite dose, dans son discours (vidéo) lundi à l’occasion du 13 août. L’actualité très animée par les controverses sur le rapport de la COLIBE, lui en fournit l’opportunité. La forte opposition des Islamistes aux propositions contenues dans ce rapport, notamment pour ce qui est de l’égalité dans le droit à l’héritage, s’est exprimée à travers deux messages significatifs. Le premier, épistolaire, dans une lettre adressée par le chef d’Ennahdha au président de la République. Le deuxième, bruyant, soigneusement orchestré, lors d’une manifestation de protestation, bien encadrée, organisée samedi de Bab Saadoun au Bardo. Il ne restait plus à Béji Caïd Essebsi qu’à rebondir dessus et s’en servir. Par petites phrases en cinq actes.
Acte I : « La collaboration avec Ennahdha, que certains la lui reprochent, a permis d’assurer une période non-négligeable de stabilité, relative, commencera-t-il par dire. Maintenant, ajoutera-t-il, il est libre de la poursuivre ou non. » Rien n’est définitif, tout reste ouvert, insinue en fait, Caïd Essebsi à l’orée d’une année 2019 d’élections législatives et présidentielles….
Acte II : « Ennahdha, dira-t-il, vient de m’envoyer une note (au sujet du rapport de la COLIBE) et c’est une initiative que j’ai appréciée. Il y mentionne des considérations positives mais aussi certaines réserves. J’ai été consterné par le fait que des réserves portent sur l’égalité dans l’héritage. Il est de son droit de rendre publique sa note. Attaché aux formes, je ne le ferai pas de mon côté, mais c’est son droit d’y procéder. » Publiez vos positions pour que tous le sachent, en Tunisie et à l’extérieur, semble-t-il sommer Ennahdha.
Acte III : « Nul ne peut nier qu’Ennahdha s’appuie en fait sur une référence religieuse, lancera Béji Caïd Essebsi. Et d’enchaîner : Mais, elle s’emploie, et c’est à saluer, à évoluer vers un mouvement politique à caractère civil. » Jusque-là, Ennahdha reste un parti islamiste et sa décision de se convertir en mouvement civil demeure au niveau de l’intention, sans connaître un début de concrétisation effective, sous entend ce passage du discours.
Acte IV : « Ennahdha est un parti proéminent au sein de l’Assemblée des représentants du peuple. Il en avait donné une nouvelle preuve lors du vote de confiance, le samedi 28 juillet dernier, au nouveau ministre de l’Intérieur. Fort de 68 députés, son groupe parlementaire a accordé 66 voix, c’est une première, pour pourvoir à la vacance du ministère de l’Intérieur ». Rien n’échappe à ma vigilance, souligne le locataire de Carthage.
Acte V : « J’ai grand espoir qu’Ennahdha, dans cette position proéminente, ne manquera pas de faire un travail positif pour regrouper les différentes sensibilités en faveur de l’initiative présidentielle (de l’égalité de l’héritage et la faire adopter. » Vous avez pesé de tout votre poids le 28 juillet dernier, vous aurez aussi à le faire pour l’égalité de l’héritage, avec la possibilité du libre choix pour les réfractaires : le message est clair.
Florentin, Béji Caïd Essebsi y est très à l’aise, même si…
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