Egalité dans l’héritage : Comment Béji Caïd Essebsi en fait la règle, laissant le libre choix aux réfractaires
Il en aura affirmé le principe qu’impose la Constitution, l’instituant en règle, tout en laissant aux réfractaires le libre choix de ne pas appliquer l’égalité successorale entre leurs descendants. De prime abord, le président Béji Caïd Essebsi semble avoir coupé la poire en deux. Mais, il est clair qu’il entend procéder par étapes et laisser le temps au temps. D’un côté, il fait triompher les principes d’un état civil et non religieux et de l’égalité de tous dans les droits et les devoir et, de l’autre, il tient compte du sentiment religieux profond de nombre de Tunisiens attachés aux préceptes rigoureuses de l’Islam. Au passage, il recadre ses relations avec Ennahdha. Béji Caïd Essebsi pousse le parti islamiste à afficher publiquement ses positions, concrétiser sa décision de se convertir en parti politique civil et faire aboutir l'adoption de la loi sur l'égalité dans l'héritage. Florentin.
Dans un discours (vidéo) très attendu prononcé lundi 13 août à l’occasion de la célébration de la Fête de la Femme, le président Caïd Essebsi devait trancher cette épineuse question risquant de provoquer un redoutable clivage de la nation. Pour désamorcer les tensions, il annoncera que les propositions de la COLIBE sur les libertés et nombre d’autres questions, ‘’audacieuses et pertinentes’’ gagnent à faire l’objet ‘’d’un débat très large et d’un examen’’ plus approfondi.’’ Mais, pour ce qui est de la révision du Code du statut personnel, l’urgence en exige l’opportunité immédiate, plaide-t-il, annonçant sa décision d’introduire devant l’ARP une initiative présidentielle à cet effet. « Cela aurait dû être fait, dès 1956, dans la foulée, soulignera-t-il. Mais, il n’y avait pas à l’époque une constitution pouvant lui servir de référence et d’appui ! »
Les deux fondements constitutionnels sur lesquels s’appuie Caïd Essebsi
Deux dispositions constitutionnelles, impératives, rappellera le président Béji Caïd Essebsi rendent aujourd’hui nécessaire et indispensable cette égalité dans l’héritage. La première est le caractère civil de l’Etat. « Ceux qui affirment que la référence de l’Etat est religieuse se trompent lourdement. La constitution l’a clairement proclamé : un Etat civil. Cette constitution, je n’avais pas participé à son élaboration. C’est Ennahdha, et c’est une réalité et non une incrimination qui avait procédé avec les autres parties de la Troïka, mais aussi d’autres élus, 200 au total, un record, qui l’ont votée. Aujourd’hui, j’y contribue, quelque part, en l’appliquant et en étant le protecteur et le garant.’’
L’égalité dans les droits et les devoirs, mentionnée dans l’article 21, est la deuxième disposition impérative.
L'avocat et le président de la République
L’avocat, Me Béji Caïd Essebsi a bien construit sa plaidoirie, pour garantir un verdict sans appel. Le chef de l’Etat qu’il est aujourd’hui, doit cependant, incarner son statut de rassembleur de la nation. Sensible aux ‘’réserves’’ d’Ennahdha et au rejet total opposé par une frange des Tunisiens, mobilisés par des imams et des prédicateurs, ainsi que des activistes islamistes, il n’a pas voulu heurter de front leurs convictions religieuses. D’où sa trouvaille de leur laisser la liberté, s’ils y tiennent de ne pas pratiquer l’égalité dans leur héritage.
Béji Caïd Essebsi marque ainsi un point, évite la discorde et laisse à ses successeurs démocrates, laïcs et modernistes, le soin de faire avancer davantage ces droits. Mais, d’ores et déjà, il met Ennahdha à contribution, pour soutenir l’approbation de son initiative devant l’ARP.
Lire aussi : En cinq actes, Béji Caïd Essebsi recadre ses relations avec Ennahdha
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Je ne savais pas que dans un pays de droit certains pouvaient ne pas appliquer la Constitution or c'est ce que propose le Président! Cela me parai un accroc singulier et pour tout dire inacceptable.