Tunisie: Rareté de l’eau le grand défi
La Tunisie compte aujourd’hui 35 barrages (irrigation, eau potable, électricité, aquaculture…) et les experts savent qu’ «en Tunisie, la ressource est très modeste, pour ne pas dire rare, très fragile et très convoitée». En 2014, la Banque mondiale pointait «la rareté de l’eau » comme le «défi au développement» de la Tunisie, défi qui s’ajoute au changement climatique, à l’urbanisation et aux demandes en hausse des villes et de l’agriculture. Quid alors de nos barrages? L’été, dans 25 à 40 ans, pourrait voir le débit des fleuves et des cours d’eau baisser de façon importante ! Les projections de l’Unesco mettent depuis longtemps notre pays sur la liste des pays qui feront face à de graves difficultés dès 2025… d’autant que le Maghreb est considéré comme une des régions du monde particulièrement affectée par le réchauffement climatique et la sécheresse. Il est donc difficile de comprendre comment on a pu se laisser surprendre par cet été torride 2016.
Il nous faut tirer les leçons de ces perturbations estivales (près de 700 coupures d’eau) qui ont donné lieu à des comportements inqualifiables comme à Fernana, en septembre 2016. Souvenons-nous : l’eau peut devenir très vite une grave question d’ordre public comme le prouvent les cas de l’Algérie et de l’Egypte. Certains médias ne parlent-ils pas à présent d’une «insurrection » de l’eau dans notre pays ?
En premier lieu, il faut poursuivre les auteurs des branchements et des captages illégaux car aucun barrage ne saurait suffire face à la gloutonnerie et à la cupidité des auteurs de telles actions attentatoires à ce bien commun qu’est l’eau. Ensuite, il faut faire la chasse aux pertes dans le réseau en améliorant la maintenance. Des villes comme Lausanne et Tokyo atteignent des pertes de 3% sur leur réseau. Il faut, bien évidemment, que les Tunisiens paient leur consommation à la Sonede même si un traitement particulier doit être fait pour les plus modestes en dépit du fait que la Constitution, dans son article 44, dit seulement : «Le droit à l’eau est garanti.»
Il faut enfin faire de la Sonede – et de l’Onas- «un grand service public national de l’eau» doté d’un conseil d’administration ouvert sur l’Université et la société civile, comme il faut aussi moderniser ses capacités techniques. La Sonede est un acquis de la Nation qui doit donner l’exemple de la rigueur et de la transparence dans la gestion d’autant que l’article 44 de la Loi fondamentale dispose : «La préservation de l’eau et son utilisation sont un devoir pour l’Etat et la société.» Reste l’agriculture qui engloutit 80% de l’eau du pays. A côté de l’amélioration de l’irrigation et de la productivité agricole, il faut sérieusement évaluer «l’empreinte-eau» et les volumes d’eau nécessaires à la culture des tomates, des pastèques et des melons face à celle des olives, des dattes ou de l’arboriculture pour utiliser à bon escient l’eau de nos barrages. Prenons garde : la croissance du PIB tunisien est au tiers dépendante de la pluviométrie!
Mohamed Larbi Bouguerra
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