Une feuille de route pour la constituante
La mission qui incombe à la Constituante que les Tunisiens éliront le 24 juillet prochain est une mission de refondation. Notre République, proclamée le 25 juillet 1957, doit être refondée. Le chantier est plus vaste que l’on ne l’imagine. Il comporte en réalité deux aspects distincts. La Constituante devra rédiger une nouvelle Constitution et choisir un type de régime. Le régime semi-présidentiel, également appelé régime mixte, est celui qui nous paraît le plus à même de concilier les exigences contradictoires de la démocratie et de l’efficacité. Cette question, beaucoup débattue, a suscité des controverses passionnées. Mais oublions-là un instant: nous voulons aujourd’hui aborder l’autre aspect, tout aussi fondamental, de cette refondation : sa dimension philosophique.
La Révolution du 14 janvier fut l’insurrection d’un peuple contre un tyran qui avait usurpé les pouvoirs et les biens, et, dans le même temps, un formidable élan vers la liberté. Cet élan, inédit dans l’histoire arabe, doit trouver son prolongement et sa consécration sur le terrain juridique. L’instauration d’un régime démocratique à travers la mise en place de nouvelles institutions ne résoudra pas tous les problèmes. Il faut, en parallèle, créer les conditions propices à l’instauration d’un « Etat de libertés ». La Tunisie doit se doter d’une « déclaration des droits et libertés ». Cet instrument juridique permettrait, avec une Constitution révisée, de protéger l’individu contre toutes les formes d’arbitraire, l’arbitraire du pouvoir exécutif, mais aussi l’arbitraire de la loi. Ce dispositif n’est pas seulement souhaitable, il est nécessaire.
Notre histoire récente à été une histoire d’abus et de transgressions. Les Tunisiens, tout au long de leur histoire, ont eu à souffrir de la dictature et de la confiscation de leurs libertés. Mais ils ont aussi eu à souffrir d’abus d’une gravité extrême. Leurs droits les plus élémentaires ont été bafoués, de manière systématique. Tortures, viols, emprisonnements abusifs, négation des droits de la défense et du droit à un procès équitable… L’arbitraire était la loi commune, et la justice l’exception. Cet ordre des choses doit être renversé. Les droits et libertés de l’individu doivent être proclamés, garantis et sanctifiés par la Constituante, par l’intermédiaire d’une déclaration des droits, qui serait à la Révolution tunisienne ce que la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen a été pour la Révolution française de 1789.
1. La déclaration des droits et des libertés précèdera la Constitution, qui s’y réfèrera dans son préambule. Elle fera office de soubassement philosophique. Elle prendra la forme d’un texte court, qui énoncera des principes généraux : les droits fondamentaux de la personne, inviolables et sacrés, dont le respect s’imposera aux pouvoirs publics en toutes circonstances. Le recours à la torture et aux châtiments inhumains, cruels ou dégradants sera proscrit à jamais, et le droit à ne pas être inquiété pour ses opinions et pour ses croyances affirmé solennellement. La déclaration proclamera que les femmes et les hommes naissent libres et égaux en droits. Elle garantira le droit au procès équitable et les droits de la défense. Elle dira l’attachement indéfectible et profond du peuple tunisien à la liberté sous toutes ses formes : la liberté de pensée, la liberté de conscience, la liberté d’association, la liberté de réunion, la liberté de circulation, la liberté de communication des pensées et opinions, ainsi que les libertés politiques et syndicales. Ces libertés ne seront assorties d’aucune restriction (sauf, bien entendu, pour certaines catégories d’agents de l’Etat, les membres des forces armées par exemple). Elle consacrera en outre le principe de l’habeas corpus – nul ne peut être détenu arbitrairement -, et le droit au respect de la vie privée et au secret des correspondances… et des conversations téléphoniques !
La logique implicite de notre proposition vise à placer les droits fondamentaux de la personne non pas à côté mais au dessus des droits de l’Etat et de la société. Aussi, l’énoncé des droits devra se limiter aux droits et libertés individuels. Cette déclaration fixerait en réalité les principes de la Révolution. Les juristes pointilleux objecteront peut-être qu’une telle charte n’est pas nécessaire, étant donné que la Tunisie a déjà adhéré à un certain nombre d’instruments internationaux de protection des droits fondamentaux, comme la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, le Pacte onusien des droits civils et politiques de 1966, et la Convention de décembre 1984 contre la torture. A quoi nous répondrons qu’en politique, les symboles comptent autant sinon plus que les traités. L’adoption par la Constituante de cette charte des droits et libertés marquera un tournant irréversible. Car les principes et les valeurs énoncés dans la déclaration perdront alors leur caractère de « notions importées » pour devenir les valeurs authentiques de la Révolution du peuple tunisien.
2. Les différentes formations politiques tunisiennes sont-elles prêtes à s’engager dans cette direction ? Nous le pensons. Parviendront-elles à tomber d’accord sur un texte ambitieux et dénué d’ambiguïtés ? Nous le croyons aussi. Les forces en présence ont jusqu’à maintenant, dans leurs déclarations, manifesté une certaine convergence au niveau des principes. Le travail de clarification politique et philosophique, entamé fin 2005 par le Collectif du 18 octobre pour les droits et libertés, qui réunissait à la fois les partis de l’opposition démocratique et les islamistes d’Ennahda, a permis de dégager l’ébauche d’une plate-forme consensuelle de principes démocratiques et libéraux. Cet effort peut se poursuivre et se terminer dans l’enceinte de la Constituante.
Il sera clair dans l’esprit de tous que la déclaration - ou la charte - aura une portée et une signification supérieures à la Constitution et aura vocation à trôner au sommet de notre pyramide des normes. Pour ne pas demeurer virtuels, les droits proclamés dans la charte devront être assortis d’un dispositif de protection garantissant leur effectivité. Ils devront être opposables devant les juridictions de l’ordre interne, c’est-à-dire devant les tribunaux civils et devant le tribunal administratif. Le juge tunisien doit donc devenir le rempart et le bouclier des droits de l’homme et du citoyen. Pendant trop longtemps, il s’est complu dans un rôle d’auxiliaire servile de l’arbitraire étatique. Il peut et doit faire sa révolution culturelle, et se transformer en défenseur ombrageux des libertés. Mais il faut l’y aider en lui donnant les moyens d’une telle métamorphose. Comment ? En consacrant solennellement, dans le texte de la déclaration, et dans un même article, les principes de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de la magistrature. Notre juge doit devenir véritablement et pleinement indépendant. C’est à cette condition seulement qu’un « Etat de libertés » sera envisageable, demain, en Tunisie.
3. La première Constituante tunisienne, qui a siégé d’avril 1956 à juin 1959, n’a pas accordé aux droits et libertés toute l’attention qu’ils méritaient. Ses débats se sont focalisés quasi-exclusivement sur la question du régime politique. La Constituante a changé plusieurs fois d’optique, au gré de la conjoncture politique, en planchant d’abord sur un avant-projet de Constitution monarchique avant de reprendre ses travaux à zéro après le 25 juillet 1957, pour épouser les vues du président Bourguiba, qui était notoirement favorable à un système présidentiel fort. Avant même la conclusion du processus, un éminent constitutionnaliste étranger, le professeur Georges Lavau, ainsi que deux juristes avertis, Noë Ladhari et Mansour Moalla, alors tout jeune inspecteur des finances, avaient pointé du doigt les carences et les insuffisances d’un texte qu’ils jugeaient insuffisamment protecteur des droits et libertés : « Les droits fondamentaux sont énoncés de façon trop restrictive, les droits sont reconnus dans leur principe, mais leur étendue est laissée à l’appréciation du législateur […] ; toute la partie réservée aux droits et devoirs du citoyen est très mal rédigée, donne le sentiment d’avoir été faite à la hâte et est insuffisante […] ; beaucoup d’articles sont d’une imprécision regrettable […] ; les garanties offertes aux magistrats sont dérisoires […] ; le pouvoir judiciaire, censés faire office de contrepoids [dans un schéma de séparation des pouvoirs] manque ici, et n’est pas instauré ». C’était en janvier 1958, dans les colonnes de l’Action, l’ancêtre de Jeune Afrique. On ne les avait malheureusement pas entendus.
Habib Bourguiba était obsédé par les droits de l’Etat, bien plus que par ceux des individus. Le fondateur de la République tunisienne était hanté par le passé de division de la Tunisie, par ce « démon numide » stigmatisé par Ibn Khaldoun, que la sédition yousséfiste venait de raviver. Bourguiba voulait à tout prix consolider l’Etat, affermir son autorité, le protéger contre « l’anarchie et l’effritement ». Il pensait que, pour s’élever et prospérer, l’homme devait « vivre à l’abri d’un pouvoir juste et fort ». Mais, avec les années, ce pouvoir s’est mué en pouvoir despotique et les droits de l’individu s’en sont trouvés gravement lésés. Aussi, à la lumière de l’expérience, nous pensons qu’il serait véritablement judicieux que le débat sur la déclaration des droits précède le débat constitutionnel. C’est un débat essentiel, il doit bénéficier de toute l’attention nécessaire. La Constituante doit en faire sa priorité.
4. Chaque Constitution porte la marque de son temps et d’une tendance de l’esprit. Œuvre humaine, elle est susceptible d’être amendée, enrichie ou révisée. Comme la pensée, elle évolue avec la vie. Il en va tout autrement d’une déclaration des droits. Elle est générale et atemporelle. Ses principes valent pour toute époque et sont hors d’atteinte du législateur constituant. Ils peuvent, au mieux, être complétés. Mais ils ne peuvent en aucun cas être altérés. Isoler la déclaration des droits du corps de la Constitution, c’est donc lui conférer une majesté et un relief singuliers. Ajoutons pour finir qu’une telle charte, si elle venait à être adoptée, marquerait une étape supplémentaire sur le chemin de l’accession de la Tunisie à la modernité politique. Et aurait valeur d’exemple et de source d’inspiration pour les peuples arabes frères engagés dans le combat pour leur émancipation.
5. Une fois cette charte discutée et votée, la Constituante pourra se pencher sur le débat institutionnel proprement dit. Et, dans l’hypothèse où le peuple tunisien serait invité à se prononcer par référendum sur le travail de la Constituante, on peut imaginer que les deux textes fassent chacun l’objet d’une approbation séparée. Autrement dit, que le référendum porte non pas sur une mais sur deux questions, qui seraient : « approuvez-vous la déclaration des droits et libertés personnels ? » et « approuvez-vous la Constitution de la deuxième République ? ». Nous voyons deux avantages à un tel mécanisme. Il permettrait d’une part de délier les destins des deux textes, et la déclaration pourrait être solennellement approuvée et entrer en vigueur même dans le cas où le texte de la Constitution venait à être rejeté. Il permettrait d’autre part de conférer une valeur à la fois juridique et politique supplémentaire à la déclaration, conférerait implicitement aux principes qu’elle énonce une valeur supra-constitutionnelle, qui rendrait dès lors tout retour en arrière difficile à envisager en matière de droits et libertés.
Samy Ghorbal.
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Ce qui est remarquable monsieur, c'est que vous avez fait preuve de véritable reflexion qui seule donne du sens à votre technicité (dans le domaine institutionnel) et vous a très justement orienté vers La Déclaration dont je vous approuve l'idée. .. Je vais pas me mettre à énumérer vos compétences et qualités...je finirais jamais... ! Ce qui attire mon attention le plus est que dans un domaine qui pouvait paraître à beaucoup technique vous avez été amené à parler de dimension philosophique et au sujet de la Déclaration de principes et surtout de valeurs...qui doivent eux guider le technique et lui donner un sens que nous recherchons vainement dans ce que nous avons pris l'habitude de réaliser.... En tout dernier lieu j'observe toutefois que vous avez le souci de faire "perdre à ces principes et valeurs.." leur caractère importé" lol, vous avez raison car notre révolution a ses spécificités et nos textes et domocratie doit l'être aussi c'est à dire ni copié sur l'occident sauf que je pense on pouarraient allez plus loin en regardant notre patrimoine historique culturel archéologique pour trouver exactement les mots les plus près de notre identité Tunsienne et çela serait le top car celà voudrait dire que nous avaons un modèle crée par nous même ... Je pense que si on allait dans ce sens on reconcilerait bcp de monde (partis politiques et on éviterait des risques de divisions de blocages et ses conséquences sur la construction du projet démocratiques ... mais nos archéologues et Universitaires vont à contre courant en ce moment et sont loin de penser qu'ils peuvent eux aussi bâtir une démocratie aux côtés des politiques et des juristes... Bravo Monsieur.
Bravo à Samy Ghorbal ! L'idée de rendre la déclaration des droits et libertés personnels inattaquable est excellente. j'espère que vos propositions seront entendues.
excellente idée si la classe politique et la commission chargée de la préparation des éléctions, l'acceptaient.
bravo, clair et précis. Le problème c'est qu'en ce moment la grande commission est en train de mijoter des choses sans informer le citoyen et à la fin ils nous donneront des surprises? Je suis pour la déclaration des droits de l'homme avant la constituante
Je trouve l'idee d'une Declaration des droits et des libertes est excellente .Je pense que cette declaration doit mentionne la refernce des conventions internationales des DH + La Declaration universelle des DH .
Préambule de la nouvelle constitution : Pour une charte nationale des droits fondamentaux 1-La Constituante qui sera élue dans moins de 19 semaines (!) décidera pleinement, au nom du peuple tunisien, de la nouvelle constitution et par suite des droits fondamentaux qui régiront notre société et la vie des tunisiens durant les prochaines décennies. 2- La Constitution est considérée comme la règle la plus élevée de l’ordre juridique d’un pays. Elle précise les droits fondamentaux et définit les différentes institutions composant l’Etat, dont en particulier les 3 pouvoirs : législatif, exécutif et judiciaire. 3- Les droits fondamentaux, valeurs et principes auxquels la société est particulièrement attachée sont en général précisés par le préambule de la Constitution. En Tunisie, la Constitution de 1959, en vigueur pendant plus 50 ans, précise dans son préambule et surtout dans son chapitre premier certaines valeurs et principes. 4- Depuis la déclaration universelle des droits de l’homme, les droits fondamentaux ont intégré de nouvelles valeurs, en particulier celles liées à la préservation de l’environnement et à la bioéthique. La « charte des droits fondamentaux de l’UE » est à cet effet l’expérience la plus complète, la plus récente et la plus large : les 29 pays de l’Union ont adopté, en décembre 2000, une charte commune précisant 50 droits fondamentaux déclinés en 6 chapitres : Dignité, Libertés, Egalité, Solidarité, Citoyenneté et Justice. Nous serons fixés dans moins de 19 semaines … Mais entretemps n’hésitez pas à réagir !!!
Merci pour tout j'irai même plus loin en disant qu'une bonne déclaration des protections des droits et des libertés du citoyen dans tout ses détails avec un code des libertés du citoyen suffisent largement.nous pouvons très bien vivre sans constitution source de division et discorde.Choisissons un mode électoral et de gouvernance et stop.
La première révolution arabe de ce 21ème siècle il faut qu'elle soit la plus parfaite possible et pour qu'elle ne soit récupérable par aucun parti quelque soit son orientation;les tunisiens sont aujourd'hui mûs et asoiffés de liberté dans ce pays et attendent avec impatience ce moment depuis un demi siècle pour les plus âgés d'entre nous;il faut donc absolument que la nouvelle constitution puisse nous garentir ce voeux qui nait avec chaque personne et on met ainsi un point final au délapidement de ce droit par les gouvernants quelque soit bord: enciens et futurs.
On a vu comment ZABA jouait de la constitution pour se faire un plaisi , croyait-il immuable, cela dénote du risque encouru. Une Charte des droits et des libertés, serait le rempart infranchissable à tout éventuel manipulateur politique (groupe ou individu). La charte sera le symbole de la Révolution du 14 janvier et en cela s'imposera comme socle immuable autour duquel se retrouveraient toujours les Tunisiens sans regard ni orientakiste ni occidentaliste mais tout simplement humaniste. Quand les valeurs mettront le seul ètre humain comme piedestal de leur drapeau alors toutes les idéologies poltiques se mettront au pas. OUI pour la charte!! à bon entendeur ....
We also need to declare our own Tunisian Bill of Rights to protect the citizen against the power of the state or the police and provide guarantees of citizen rights to free public education, health and equal treatment under the law.Nobody should be above the law. The culture of corruption will take time to disappear as citizens become more and more accustomed to living in a democracy.All Tunisians will become aware of their rights and their duties.LIFE WILL BE BEAUTIFUL IN A FREE AND DEMOCRATIC TUNISIA,Inchaa Allah.
merci a Samy Ghorbal pour ces précisions et propositions, je suis tout a fait daccord que notre veritable salut est cette Charte des droits et des libertés, il faut absolument tout faire pour la faire adopter avant même la constitutionelle.
Que valent de supposés "droits" s'ils n'ont pas été conférés par Dieu, et s'ils ne sont pas sous l'autorité de celui-ci ?
ce texte très bien écrit, clair et très bien charpenté ne tient malheureusement pas compte des hommes. Le beau pricipes des Droits de l'Homme à peine promulgé a ét bafoué par la Révolution française de 1789
Bravo Mr Ghorbel, on vous doit beaucoup de clarifications sur des sujets assez techniques, j'ai lu votre article sur les différents modèles de démocraties et ca m'a apporté beaucoup d'informations, je suis complétement pour une déclaration des droits et des libertés mais avec une connotation arabo-musulmane si possible car notre pays est arabo-musulman, je trouve que Mr Youssef Seddik nous sera d'une grande utilité dans ce domaine. Et que vive notre Tunisie
Très bonne analyse et propositions. Je suis tout à fait d'accord pour une Déclaration des droits et libertés du citoyen, qui soit tuniso-tunisienne et qui se réfère à nos inspirations communes et nos valeurs communes et protège notre identité arabo-msulmane. Sans rester otages à la déclaration universelle des droits de l'homme, résultat quand à elle des inspirations et objectifs d'autres peuples, à majorité et dominante occidentale, avec qui nous partageons une bonne partie des valeurs morales mais pas toutes.
La grande majorité des tunisiens ne comprennent rien à la politique et par paresse intellectuelle ils vont se rabattre sur la religion et vont préférer continuer à croire qu'une force céleste veille sur eux et fera le travail à leur place!
bravo Samy, je suis tout à fait pour une déclaration des Droits Humains, il ne faut pas oublier d'y inclure les Droits de l'enfant. Par contre je réponds à ceux qui la réclament arabo-musulmane: NON et NON les Droits Humains sont UNIVERSELS!!!!!! par ailleurs ceux qui font référence uniquement à notre culture arabo-musulmane, l'appauvrissent, notre culture a des millénaires, et s'est adaptée aux diférentes cultures passées sur notre terre, les arabes, et musulmans n'en sont qu'une partie. par ailleurs rappelez-vous que les tunisiens juifs, chrétiens, atés, ou autres, sont tout aussi tunisiens que les arabo-musulmans!!!!Seul l'HOMME est universel!
Je félicite Samy Ghorbel pour cet article et je partage parfaitement aussi bien son analyse de la dérive du pouvoir sous la Constitution de 1959 qui a fait prévaloir les droits de l'Etat sur ceux de l'individu, que la feuille de route qu'il préconise en insistant particulièrement sur la nécessité d'élaborer une charte qui aura un caractère supra-constitutionnel où seront consignés les principes fondamentaux, les droits et libertés immuables et inaliénables du citoyen sous quelque motif que ce soit. Il a même eu l'intelligence et le mérite de recommander de soumettre cette charte (au cas où sa proposition sera retenue) à un référendum séparé de celui de la nouvelle Constitution (au cas où cette dernière sera soumise à un référendum). De la sorte - comme il le précise bien - non seulement le juge judiciaire et le juge administratif pourront s' y référer si une loi (même conforme à la Constitution) leur parait contredire les libertés et principes consignés dans la charte, mais le pouvoir constituant pourra, au fil des années, amender certaines dispositions constitutionnelles sans pour autant pouvoir transgresser cette charte supra-constitutionnelle. N'oublions pas que Bourguiba et Ben Ali se sont servis, à leur guise, du pouvoir constituant "formellement légal et régulier" pour réviser la Constitution chaque fois qu'il voulaient instaurer la présidence à vie ou toute autre dénaturation du régime républicain. Seulement, ma déception fut grande à la lecture de certains commentaires qui m'ont précédé qui, tout en saluant les réflexions et les propositions de Mr. Ghorbel, plaident pour que les principes et les libertés qui seront inscrits dans la Charte soient conçus à partir d'une "spécificité tunisienne" ou par référence à "notre civilisation arabo-islamique". Dois-je comprendre par là que (je cite)" les principes généraux : les droits fondamentaux de la personne, inviolables et sacrés, dont le respect s’imposera aux pouvoirs publics en toutes circonstances; que le recours à la torture et aux châtiments inhumains, cruels ou dégradants sera proscrit à jamais, et le droit à ne pas être inquiété pour ses opinions et pour ses croyances; que les femmes et les hommes naissent libres et égaux en droits; que le droit au procès équitable et les droits de la défense sont garantis; que l’attachement indéfectible et profond du peuple tunisien à la liberté sous toutes ses formes : la liberté de pensée, la liberté de conscience, la liberté d’association, la liberté de réunion, la liberté de circulation, la liberté de communication des pensées et opinions, ainsi que les libertés politiques et syndicales" ne sont pas des valeurs universelles et peuvent AVOIR UNE SPECIFICITE TUNISIENNE ou qu'elles peuvent être en conflit avec la CIVILISATION ARABO-ISLAMIQUE. Le danger est que chaque fois qu'on veut nous éviter le bénéfice d'une liberté fondamentale ou un droit, universellement partagés, on nous sort l'argument que ces valeurs sont ETRANGERES à notre civilisation ou à nos mœurs (mouch m'te3na). Nous avons été gouvernés pendant plus d'un demi siècle (et le monde musulman continue à l'être ) sous la menace de l'accusation d'allégeance à l'étranger (takhouine) ou d 'apostasie (ridda ou takfir) chaque fois que le gouvernant ou les forces extrémistes de la société veulent sévir un démocrate ou un libre penseur. Mr. Ghorbel a été attentif à cela en suggérant de consigner les principes fondamentaux et libertés individuelles qui sont proclamés à l'échelle mondiale dans la Charte préconisée (même si cela est supposé être évident du moment que la Tunisie est signataire des traités y afférents) rien que pour affirmer expressément (et non pas tacitement) que lesdites valeurs, droits de l'homme et libertés individuelles, ne seront plus considérés comme IMPORTES , mais bel et bien partagés par tous les tunisiens quelles que soient leurs tendances politique, religieuse ou culturelle. J'ai l'impression en lisant certains commentaires qu'il a été mal saisi dans le sens où ceux qui se déclarent être d'accord avec lui, parlent de "spécificité tunisienne" alors que lui plaide plutôt pour une "tunisification des valeurs universelles". C'est à ce niveau bien précis que je voudrai ajouter une contribution à l'article de Mr. Ghorbel en précisant que les éléments qui seront inclus dans la Charte préconisée ne doivent pas faire l'objet d'une approche uniquement verticale (les rapports gouvernants - gouvernés) mais obéir aussi à une approche horizontale (rapports des gouvernés entre eux)
Ouiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii pour la "déclaration des droits et libertés", tout le reste n'est qu'une traduction sous forme d'articles d'une constitution de notre 2ème république, mettons-nous d'abord d'accord sur les valeurs communes
Bonjour Samy.l' article est bien charpenté et clair.Cependant, croyez- vous que cette déclaration serait vraiment protégée par un corps judiciaire (magistrats, avocats, auxiliaires de justice ..) dont les doléances ,et on le voit toujours les jours sont encore d'ordre " végétatif".Il fut un temps ou l'avocat défendît la veuve et l'orphelin.A présent, les enjeux sont d'une autre épaisseur.Dans les pays démocratiques , il n'existe pas un pouvoir judiciaire mais " une autorité judiciaire" , chargée de rendre la justice tout en prouvant, à chaque étape du procés équitable son autonomie par rapport aux autres pouvoirs ( exécutif et législatif). Aussi , en rendant cette justice, le corps de la magistrature enfante la jurisprudence en l'adaptant aux mutations socio-économiques et du niveau culturel atteint par la société. Exemple : il est aberrant que le code pénal inflige une sanction d'emprisonnement plus lourde à l'auteur d'un larcin ( vol d 'une poule ) qu'à un auteur de malversation ou d'abus de pouvoir portant sur des millions de dinars ! Ceci pour l'anecdote. Mais revenons au sérieux. Une remise en question philosophique et ontologique est une urgence .Cela suppose un esprit critique qui a fait , hélas défaut sous nos cieux arabo - musulmans. La Tunisie, ce petit pays par sa superficie a été au centre de la confluence , toujours dans les conflits, de nombreux apports éthnico - culturels. La révolution du 14 janvier saura t elle libérer les esprits afin qu'on ne procède plus par demie amnésie? Continuera ton à se cantonner à une identité linéaire, comme s'il n' y avait que l'arabo -musulman sur terre , quand bien même tout prés de nous un pays , la France accueille plus d'un demi millions de concitoyens , à la fois attachée à leur identité et évoluant dans un Etat de droit et des libertés.Tout comme l'homme , les droits et les devoirs sont universels. Enfin , je comprends parfaitement votre démarche pédagogique pour l'établissement d'une déclaration des droits et libertés , mais la constitution en tant que loi fondamentale est suffisante pour énoncer ces droits inaliénables , en premier lieu desquels : le droit à la vie et son integrité, le droit à la santé , à l'education et à l'emploi et surtout A l'INFORMATION.