Enseignement à distance: Mettre la main à la pâte
Par Salma Damak Ayadi - Depuis que ce virus a pointé le nez dans notre pays, date encore inconnue, le monde universitaire vit sous son rythme. Tantôt méfiant, tantôt confiant, tantôt défiant…
Les universités étaient le lieu de savoir mais surtout le lieu de rencontre de toutes les classes sociales en quête de savoir et en soif de connaissances scientifiques dans toutes ses variétés.
Malheureusement, elles sont devenues le lieu privilégié pour ce maudit virus pour se mettre en vedette et monter des barrières que les scientifiques et universitaires ont mis des années à briser. Le contact physique, l’échange verbal, gestuel … et émotionnel qu’ils génèrent… ont été remplacés par des écrans, des boutons, des symboles … de nouveaux codes de conduite auxquels certains ont adhéré et que d’autres ont boudé.
Mais que retenir de cette expérience d’EAD qui va bientôt fêter sa première année?
Commençons par le commencement.
Lorsque le gouvernement Tunisien a décidé l’arrêt des cours le 12 mars 2020 suivi d’un confinement total le 22 du même mois, l’enseignement à distance n’était pas le plat préféré à cette époque. Outre l’université virtuelle, lieu de culte dédié depuis les années 2000, des initiatives timides souvent personnelles ont surgi de part et d’autre sans pour autant cultiver l’appétit et l’émerveillement pour ces pratiques d’enseignement à distance.
Pourtant, le corps enseignant bien que peu adapté a mis la main à la pâte à partir de la fin des vacances du printemps et a commencé à tester les recettes. Les ingrédients n’étaient pas forcément à portée de la main.
Il faudrait préciser qu’il a fallu d’abord beaucoup d’efforts pour établir les premiers contacts virtuels avec les étudiants. Habitués à un contact direct et solennel, il a fallu jongler entre les listes officielles administratives muettes, les adresses emails personnelles et professionnelles incomplètes, les réseaux sociaux bouillants… pour amener les apprenants à table.
Ensuite, il fallait préparer un menu généreux pour des étudiants parfois réticents. Les enseignants ont alors remonté les manches et ont concocté des contenus pédagogiques qui étaient parfois trop épicés, parfois trop fades mais souvent à saveur de débutant.
Et puis n’oublions pas que tout cela ne peut fonctionner sans que les parties intéressées ne soient connectées et en mesure de suivre la cadence. Les problèmes techniques se multiplient, le matériel informatique est souvent en avarie, les plannings se chevauchent et s’encombrent créant un environnement numérique surchargé, morose voire même une indigestion chez les étudiants.
Une fois le plat consommé, l’exercice n’est pas encore terminé, au contraire. Il vient juste de démarrer… qu’en est-il de l’évaluation? A-t-on atteint les objectifs visés? Peut-on établir un réel échange et une réelle appréciation de l’exercice pédagogique? Souvent, cette dernière étape est passée sous silence et on préfère débarrasser la table et penser au prochain menu que de se mêler de cette affaire.
Cette période d’essai s’est terminée pour certains à la date du déconfinement partiel avec la reprise progressive des cours en juin 2020. Les adeptes du présentiel se sont alors régalés à délivrer leurs recettes magiques en dépit des mesures sanitaires et de distanciation sociale contraignantes.
On croyait que ce calvaire est passé! L’année est bouclée tant bien que mal, avec des programmes parfois tronqués, des négociations interminables avec les étudiants sur le contenu et le format des examens et des calendriers d’examens retardés.
Hélas! La rentrée universitaire s’annonce houleuse: fin septembre, remix…
Salma Damak Ayadi
Professeur des universités, Vice-présidente de l’Université de Carthage
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