BMCI : Quels impacts de la crise du Covid-19 sur les pays du Maghreb ?
La Banque Maghrébine d’Investissement et de Commerce Extérieur (BMICE) vient de publier un rapport intitulé : « Impacts économiques, financiers et sectoriels de la crise de la pandémie du Covid-19 sur les pays du Maghreb : Quelles stratégies de sortie de crise, quels scénarii de résilience à moyen terme et quels nouveaux enjeux pour l’intégration maghrébine ? » :
Ce rapport a été préparé sous la direction technique et l’encadrement de Said Berbale, Directeur Général de la BMICE, et Abdelghani Ait-Ikhlef, Directeur Général Adjoint de la BMICE.
Le rapport a été principalement rédigé par Prof. Sami Mouley, Chief Economist de la BMICE et Directeur de son Pôle des Etudes Economiques et de la coopération, qui a aussi assuré la coordination scientifique d’une équipe d’économistes de la banque.
Au moment où la crise sanitaire pandémique du Covid-19 s’est transformée en une crise économique et financière globale inédite, d’une ampleur sans précédent, la BMICE s’est fixée comme objectif à travers cet important rapport riche et complet de contribuer à l’évaluation des impacts économiques, financiers et sectoriels de la crise sanitaire sur les cinq pays du Maghreb, en mettant aussi en lumière les réponses mises en œuvre dans les différents pays, les politiques adoptées pour la gestion de cette crise et surtout les perspectives de sorties de crise dans la région de l’UMA.
A travers ce rapport, la BMICE, en tant que bras financier de l’intégration maghrébine et force de propositions pour la consolidation et le renforcement de cette intégration, alimente ainsi fortement les réflexions sur les nouveaux débats pour l’intégration maghrébine, tout en favorisant le dialogue entre les différents acteurs institutionnels, économiques et académiques sur les enjeux de cette intégration dans un environnement international et régional en profonde mutation.
Les effets de contagion économique de la crise sanitaire se ressentent de plus en plus dans les pays du Maghreb. A l’instar des autres régions du monde, les pouvoirs publics des pays du Maghreb ont mis en place des mesures, aussi bien sur le plan sanitaire que sur le plan économique, afin d’endiguer la pandémie et de préverser les aspects socio-économiques de chaque nation. Les impacts négatifs attendus de l’arrêt partiel ou total qui s’en est suivi de certaines activités productives et de services dans la région se sont en plus juxtaposés à des conditions économiques initiales déjà problématiques, avec des degrés de résilience qui varient d’un pays à l’autre.
Les éléments qui permettent d’évaluer les impacts économiques de la crise sur les perspectives d’activités sont tributaires de plusieurs facteurs. D’abord, les capacités d’endiguement de la crise sanitaire et la limitation de la vitesse de propagation du virus ont été conditionnées par la qualité des réponses des systèmes de santé publics, l’efficacité des dispositifs de médication, de distanciation sociale et de confinement. Bien que la nature de ces réponses ait permis dans certains pays d’entamer des étapes de déconfinement progressif et ciblé, la gestion de la reprise économique sera tributaire de la vitesse avec laquelle les économies redémarreront leurs activités après une période de confinement.
La récession attendue à l’échelle mondiale n’a pas épargné les pays du Maghreb qui ont été également confrontés aux canaux de transmission et aux chocs simultanés d’offre et de demande, réel et financier, de la crise pandémique, impactant négativement leurs perspectives de croissance.
L’objectif de ce rapport est d’avancer une première évaluation des impacts économiques, financiers et sectoriels de la crise du Covid-19 sur les pays du Maghreb, qu’il s’agisse des perspectives économiques attendues et des répercussions sectorielles, mais aussi des impacts des stratégies mises en œuvre dans la gestion de la sortie de crise et des politiques de réponses, en matière de politiques macroéconomiques et sociales (politiques monétaires non conventionnelles, politiques de change, politiques macroprudentielles et de stabilité financière, politiques budgétaires pour l’atténuation des risques économiques et sociaux) qu’en matière de stratégies de mobilisation de ressources de financement externe.
Au terme de l’analyse qui a été menée, des réflexions sur les nouveaux débats et les nouveaux enjeux pour l’intégration maghrébine en période de post-crise Covid ont été avancées. Dans cette perspective, le rapport de la BMICE démontre que la sortie de crise peut constituer un effet d’aubaine ou une fenêtre d’opportunité pour la relance de l’intégration régionale maghrébine et pour la création d’opportunités et de niches nouvelles d’opérations commerciales et d’investissement intra-maghrébines. Les leçons à tirer pour revisiter ou repenser la stratégie d’intégration économique dans la zone UMA sont nombreuses et posent des enjeux cruciaux pour un modèle renouvelé d’intégration régionale dans les pays du Maghreb en période de post-crise Covid, qui peut transformer la crise en opportunités.
Parmi les enjeux multiples, les auteurs du rapport Said Berbale, Abdelghani Ait-Ikhlef et Sami Mouley, identifient trois opportunités novatrices à court terme pour relancer l’intégration au sein de l’UMA :
L’opportunité d’émergence de nouvelles tendances sectorielles intra-régionales
L’émergence de nouvelles tendances sectorielles présente autant d’opportunités à saisir par les pays de la région dans des secteurs où ils ont clairement démontré des avantages comparatifs révélés, notamment dans les filières liées à l’industrie agroalimentaire, l’industrie pharmaceutique, les services liés à la santé tels les instruments médicaux, et les secteurs liés aux technologies de l’information, qui semblent être les gagnants de cette crise, outre l’accélération du développement de l’économie verte, des services logistiques et de tourisme. Ces secteurs, ainsi que ceux de l’intelligence artificielle et de la biotech, mais aussi de l’industrie des composants mécaniques et électriques seraient davantage capables de réaliser des croissances significatives de leurs activités en période de sortie de crise. Dans le cadre des stratégies de sécurité énergétique et alimentaire dans la région du Maghreb, le potentiel de développement des énergies alternatives permettrait une meilleure efficacité énergétique. Dans le même temps, la crise du Covid-19 a révélé l’efficacité du télétravail et des paiements mobiles ainsi que l’opportunité d’utilisation des solutions d’intelligence artificielle, ce qui peut être un accélérateur pour la transformation digitale. A ce titre, les services financiers et la finance digitale offrent un réel potentiel de reprise et devront permettre de donner une nouvelle impulsion aux nouveaux instruments de la finance technologique (Fintech).
La création de nouvelles chaînes de valeur régionales
Les nouvelles tendances sectorielles doivent amener les opérateurs du secteur privé maghrébin à remodeler leurs chaînes d’approvisionnement, et ce, en les relocalisant et/ou en privilégiant des circuits courts d’approvisionnement, ce qui pourrait renforcer la dynamique d’intégration régionale au Maghreb. Cette relocalisation sera d’autant plus opportune pour exploiter le potentiel commercial existant mais aussi pour la création de nouvelles niches croisées de commerce et d’investissement intra-maghrébines.
L’implémentation de réformes de rupture
Les gouvernements des pays du Maghreb devraient saisir l’occasion, en ce moment stratégique de réflexion sur leurs plans d relance, une fois la crise pandémique contenue, pour repenser les politiques macroéconomiques structurelles et implémenter des réformes de rupture avec leurs modèles actuels de développement. La première rupture concerne la valorisation du secteur de santé. La seconde concerne le développement de l’entreprenariat et de l’initiative privée. La troisième concerne le contrat social avec une meilleure assise des filets de sécurité sociaux pour préserver les couches les plus vulnérables, et garantir l’inclusion et l’employabilité.
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