Abdelkader Maalej: à propos d'un arrêt administratif
Par Abdelkader Maalej - Dans la vie d’un homme tout n’est jamais toujours rose et comme le dit l’adage connu nul n’est infaillible. Comme il est dit dans une chanson célèbre de chez nous العصمة لا تكون إلا لنبي Il n’est pas vrai que l’ex suffète de Carthage n’avait rencontré aucune. difficulté au cours de sa longue carrière politique et administrative. Malgré tout le respect que je voue pour le grand homme de culture qu’était notre grand disparu je me trouve obligé à révéler, pour l’histoire, quelques vérités dont j’ai été moi-même un témoin oculaire.
Dans l’un de ses ouvrages un professeur de la faculté de droit de Tunis a mentionné un verdict rendu par le tribunal administratif à propos d’un différend qui avait opposé le Secrétaire d’Etat à l’information de l’époque, le grand disparu feu Chedly Klibi, que Dieu lui accorde sa miséricorde, à un haut responsable de ce département.
Mais avant d’entrer dans le vif du sujet nous devons signaler qu’un autre conflit avait déjà opposé les deux parties concernées ; ce conflit tournait autour d’une villa sise à Carthage appartenant à la municipalité de céans et louée par cet ex haut fonctionnaire dont nous allons parler et que le suffète avait vainement essayé de récupérer.
L’arrêt dont nous allons traiter fut intégré dans la jurisprudence civile depuis sa promulgation et est devenu susceptible de faire l’objet d’un cours de TP (commentaire d’arrêt) .Je n’aurais pas osé parler de cette affaire si je n’ y étais pas moi même partie prenante voire influente..
Quid maintenant de l’arrêt en question. Il s'agit d'un haut fonctionnaire au ministère de l’information ou plus exactement Secrétariat d’Etat à l’information. A deux fois, il fut appelé à occuper le poste de chef de cabinet de deux grands ministres. A la fin de ces deux missions l’homme devait normalement réintégrer son département d’origine. Au lieu d’être désigné à un poste digne de lui, selon lui, le haut fonctionnaire fut rattaché à l’une des directions du département. Ce dernier refusa ce poste et ne réintégra pas la direction concernée. L’abandon du poste qualifié à juste titre comme faute grave dura plusieurs mois ou même une année. Le chef du département décida alors de traduire ce haut fontionnaire devant le conseil de discipline après les délais impartis. La commission paritaire administrative du département, dont j’étais membre représentant le personnel devait selon la loi de la fonction publique siéger en lieu et place du conseil de discipline. A titre de rappel le conseil de discipline était composé de 3 membres à savoir le président qui était le directeur administratif et financier du département, le représentant de l’administration et le représentant du personnel qui n’était autre que moi-même.
Le conseil de discipline tint deux longues et harassantes réunions en présence de l’accusé et de son avocat feu maître Abderrahmen Abderrahmen Hila. L’oukase n’était pas facile à prendre. Le président du jury voulait à tout prix décider l’expulsion pure et simple de l’accusé sans aucun droit matériel ou financier. Le représentant du personnel exigea quant à lui l’application d’un article de la fonction publique disposant que dépassé le délai de 4 mois le fonctionnaire incriminé ne pouvait plus être jugé et expulsé et avait droit de recevoir tous ces émoluments durant la durée de l’abandon de poste. Courroucé par mon attitude le président du conseil prit contact par téléphone avec le chef de cabinet pour l’informer de ma position. Ce dernier lui demanda de me passer le téléphone pour me faire plier à sa volonté. Le chef de cabinet me tint ce langage. Quoi M Abdelkader tu veux te dresser contre la volonté du ministre. Calmement je lui répondis, M le ministre nous a demandé d’appliquer la loi et c’est ce que j’essaie de faire. Le chef de cabinet ne trouva pas mieux que de décrocher. Poursuivant le débat le conseil décida l’expulsion de l’accusé tout en mentionnant la réserve émise par le représentant du personnel. Le rapport élaboré par le conseil fut soumis à l’approbation du Premier ministre. Tenant compte de ma position celui-ci refusa d e ratifier la décision du conseil. Fort de cette juste oukase du Premier ministre l’accusé introduit une action en justice contre le département de l’information et obtint gain de cause.
En guise de conclusion disons que le gagneur du procès n’avait jamais pu obtenir l’application matérielle du verdict; mais c’est là une autre affaire.
Abdelkader Maalej
Ancien communicateur
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