Mourou et Jebali, candidats : les islamistes tunisiens en votes dispersés
L’électorat islamiste fait face à un grand dilemme : pour qui voter à la présidentielle. Maintenant qua Hamadi Jebali s’est porté candidat ‘’indépendant » et qu’Abdeleffattah Mourou a été officiellement investi comme candidat d’Ennahdha, à la confusion s’ajoute le choix difficile à faire. Chacun compte ses alliés au sein du camp des islamistes, jouit de sa notoriété, se distingue par son propre parcours, mais tous deux puiseront dans le même réservoir électoral.
Le mouvement Ennahdha ne voulait pas s’inscrire absent des délibérations pour les présidentielles qui occuperont d’ici, au moins le 15 septembre, date du 1er tour, de l’espace médiatique, qui impactera par la suite les législatives du 6 octobre prochain. Se contenter d’accorder son soutien à un candidat non-issue des rangs la priverait d’une enceinte de grand écho. Y aller avec l’un des siens ne manque pas de risques en cas d’échec. Sans parler des relations vouées à complication avec d'autres candidats ''déjà promis''.
Il y mouillera la jebba
En interne, le débat a été long, passionné parfous, raisonné autant que possible, non sans intrigues et intiguants, et finalement tranché : Mourou montera au charbon, même si ses chances ne sont pas totalement garanties. Le risque était à prendre, pense-t-on à Montplaisir, en espérant gagner ou du moins ne pas creuser des fractures sorties au grand jour.
Mourou, une des figures emblématiques fondatrices du Mouvement de la Tendance Islamique, et de ses meilleurs trubins, apportera à la campagne électorale son bagou, son style et ses couleurs. Il y mouillera la jebba.
Abdelfattah Mourou est-il le premier choix de Rached Ghannouchi ? Ou, le cheikh s’est-il finalement plié à la majorité de la Choura ? On le saura bientôt.
Electron islamiste libre ?
Hamadi Jebali n’est pas sans historique ni poids chez les islamistes. Premier à déposer en mars 2011, avec Ali Laaryedh et d’autres co-équipiers, la déclaration d’autorisation officielle de la constitution du parti Ennahadha, et l’obtenir, il sera aussi le premier dirigeant islamiste nommé chef du gouvernement, le 24 décembre 2011. Il n’y restera pas longtemps. Cherchant à se libérer de certains pour former autour de lui un cabinet enrichi d’indépendants, il sera désavoué par les siens en février 2013, et obligé de remettre quelques jours après, en mars 2013, les clefs de la Kasbah, à Ali Laarayedh. Son successeur affrontera le sit-in de l’été au Bardo, et sera contraint de démissionner. Mais il exigera de ne libérer la fonction, à la faveur du Dialogue national ayant adoubé Mehdi Jomaa, qu’après la signature le 27 janvier 2014, de la nouvelle constitution.
Jebali prendra de la distance vis-à-vis d’Ennahdha. Sans désarmer. S’il ne briguera pas la présidentielle de décembre 2014, remportée par Béji Caïd Essebsi, c’est qu’il se savait mal préparé incapable de le battre. Il fera alors alliance avec Moncef Marzouki. Privé du soutien officiel de son parti, devant se battre cette fois-ci contre Marzouki et tous les autres, avec des poids lourds comme, chacun à son aune, Karoui et Zbidi, notamment, il entend sans doute s’imposer au débat avec l’espoir de récolter un bon score.
Sans appel, mais avec des conséquences
Pour qui voteront les Islamistes ? Pour l’un des deux ? Pour d’autres ? Un vote uni et massif serait difficile à croire. Le verdict des urnes sera sans appel et non sans conséquences.
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