Opinions - 17.06.2019

La Révolution du «Jasmin»: un démarrage prometteur, une conduite plutôt mitigée et une fin… imprévisible !!! (II)

Ben Kraïm 2eme Partie

Chaque gouvernement, dès son investiture, fait de belles promesses mais les mêmes problèmes qui gênent et dérangent nos concitoyensdemeurent : cherté du couffin de la ménagère, chômage,évasion fiscale, contrebande et commerce parallèle. Certains problèmes comme la cherté de la vie et essentiellement des produits agricoles, peuvent être sérieusement atténués parce qu’il n’est pas difficile d’estimer et même de calculer, pour chaque saison, le prix de revient de chaque produit agricole (légume, fruit, viande, etc…). Enassociant les organisations nationales concernées, la société civile  et les services de l’Etat, on peut fixer le prix de revient du producteur, le gain de l’intermédiaire et celui du marchand de légumes, par exemple et ainsi, on peut maitriser le prix du couffin de la ménagère car c’est le sujet qui touche la majorité des classes laborieuses et le bon petit peuple. Il s’agit là d’une volonté politique, de courage et de détermination sans lesquels, la période transitoire se prolongera jusqu’au 22° siècle.

Nous nous sommes vantés d’avoir l’une des meilleures Constitutions du monde mais je crois que nous nous sommes prononcés trop tôt parce qu’un texte de Loi a besoin d’une certaine pratique et d’un certain temps pour être évalué. Nous nous sommes rendus compte que notre pays est gouverné par un système tricéphale qui ne permet à personne ou presque de prendre des initiatives et nous avons bien constaté ses limites surtout quand il s’agit de prendre des décisions importantes. D’autre part, en mettant sur pieds toutes les Instances Indépendantes, je pense que nous sommes allés trop vite en besogne car il faudrait du temps pour que le niveau de la grande majorité de la population atteigne un certain degré d’évolution intellectuelle lui permettant une participation active à la vie sociale et politique du  pays. Le meilleur exemple que je peux citer est celui du Code des Collectivités locales avec les difficultés qu’on rencontre jour après jour. Pour ma part, et étant donné ma modeste expérience, ayant été responsable d’une région, et étant donné les capacités financières du pays et l’endettement inquiétant que nous avons, il m’est difficile de comprendre pourquelle raison a-t-on décidé que les 350 maires soient rémunérés, alors que pareille mesure n’est pas monnaie courante dans le monde.Ceux qui ont conçu ce système, ou ont eu cette idée, ont-ils voulu mettre à genoux notre pays  ou le contraindre à faire faillite? Avant janvier 2011, seuls six ou sept grandes municipalités avaient des maires à plein temps. En Europe et surtout en France, les maires reçoivent des jetons comme remboursement de certains frais, de transport ou autres. Comme la grande majorité de nos municipalités ont une population de moins de dix mille personnes, et avec l’inconscience populaire qui n’est pas convaincue de la nécessité de payer les taxes municipales, les recettes des impôts qu’elles percevront de leurs administrés, ne suffiront même pas à payer le salaire du maire et des quelques employés et ce sera l’Etat qui le fera à leur place. Quant aux services à la charge de la mairie et ils sont nombreux, le bon Dieu,s’en chargera. Doit-on, nous endetter, encore, pour subvenir aux besoins financiers des mairies ? En outre, comment se fait-il, que chez nous, le payeur (l’Etat), celui qui fournit ou qui sera obligé d’avancer l’argent n’est pas le contrôleur ? Est-ce que nos concitoyens, tous sans exception, ont atteint le niveau politique, social, économique, leur permettant de se prendre, totalement, en charge ? d’accepter le point de vue de l’autre etde respecter les idées contraires ? Comment le Gouverneur, le représentant de l’Etat et du Gouvernement, n’a pas un droit de regard, de contrôle, même provisoire en attendant des jours meilleurs, sur les maires ? A propos du Code des Collectivités locales, nous aurions dû y aller mollo mollo, par étape et donner à chacune des étapes, suffisamment de temps pour habituer les citoyenset chaque conseiller à négocier avec ses semblables, àsavoir convaincre les autres pour faire admettre son idée, à se prendre en charge et à composer avec les autres élus. Faisons le bilan de la première année de gestion et agissons de telle sorte que les démissions qui ont eu lieu au Bardo, à la Soukra et à Souk Jedid (Sidi Bou Zid) et dans plusieurs autres agglomérations nous servent de leçon. Les maires ne peuvent et ne doivent se conduire en maitres absolus mais doivent, en collaboration avec leurs conseillers, quelque-soit leur sensibilité politique, chercher le consensus de la majorité pour gérer la ville et ses problèmes.

Notre pays, se trouve, depuis 2012, fortement endetté (augmentations salariales et injection de cent à deux cents mille amnistiés dans la fonction publique qui n’en avait nullement besoin), et les politiques et les gouvernants qui, quoique sérieusement, conscients de cette situation, ne formulent ni question ni interrogation à ce propos.Et ce qui posent, aussi, problème à nos finances, ce sont les nombreuses Institutions indépendantes qui ont été créées (entre 7 et 9) qui nécessitent d’importants budgets de fonctionnement. En y ajoutant le budget pour les 330 ou 340 maires que l’Etat pourrait être obligé de prendre en charge, ce sera  le budget de deux ou trois importants ministères à prévoir.

D’autre part, on a l’impression que lors des préparations des textes, que ce soit ceux des Institutions indépendantes, ou ceux des Collectivités locales ou des Députés, l’Etat n’était pas présent pour défendre ses deniers et temporiser l’élan et l’enthousiasme de tout le monde.

Aussi,on ne comprend pas comment un an après les élections municipales, nos villes et nos villages n’ontpas encore, retrouvé la propreté qui était la leur avant la révolution alors que le personnel chargé de la propreté n’était, à ce moment- là, ni bien payé, ni titularisé. Il est inadmissible que le pays du jasmin, cette fleur aux odeurs enivrantes et exaltantes, pays voulant être un leader dans le tourisme, ne retrouve pas la propreté, la netteté, la transparence de ses villes, villages et quartiers dont certains sont de renommée mondiale. L’étonnement est d’autant plus grandque le personnel de voierie chargé de la propreté a vu, depuis 2011, sa situation matérielle, sérieusement, améliorée. Si cet état de malpropretéet d’immondice perdure, il ne peut y avoir qu’un problème de commandement et de gestion et la nécessité de révision de cette situation s’impose d’urgence avant la saison touristique qui ne saurait tarder. Monsieur le ministre du tourisme qui fait du beau travail dans la promotion du site *Tunisie* ne tarderait pas, nous l’espérons, à s’en occuper sérieusement en associant les services de ses collègues des ministères concernés.

Une Justice Transitionnelle a été instituée dans le but de permettre d’aider à cicatriser, assez rapidement et un tant soit peu, certaines blessures pour que la 2°République qui pataugedepuis le 14 janvier, trouve son chemin. Ayant, quand même, perdu huit longues années qui nous ont coûté très cher, notre pays doit se remettre au travail dans la sérénité, dans l’unité, dans la ferme volonté de rattraper le temps perdu et reprendre la place qui est la sienne. Mais voilà qu’on nous annonce l’ouverture d’un procès contre le Président Bourguiba pour assassinat du grand leader Salah Ben Youssef. Celui ou celle qui a eu cette idée n’a-t-il pas pensé, un instant, que pareil procès peut déclencher une guerre civile ? Bourguiba est mort, et étant donné sa stature et son œuvre gigantesque, et malgré ses erreurs, il ne peut être jugé que par l’Histoire et l’Histoire uniquement. D’ailleurs, je recommande à ceux qui veulent avoir une idée objective sur le différend Bourguiba-Benyoussef, de lire la revue *jeune Afrique*parue au lendemain du comportement  héroïque de la ville de Ben Gardane quand elle a été attaquée par des daéchistes, l’article du doyen de nos journalistes, Mr Bechir Ben Yahmed, et consacré à cette affaire et auquel il a joint la photocopie d’un facsimilé signé par Mr Salah Benyoussef et adressé à l’un de ses chefs de bande lui demandant de conduire ses troupes et attaquer la capitale Tunis pour faire tomber le régime et s’emparer du pouvoir. Celui qui télécommande des complots et des renversements de régime ne mérite-t-il pas, aussi, de rendre des comptes devant la justice ?

Ce procès souhaité ne serait-il pas né d’un certain désir de revanche sur un Homme qui n’est plus là ?De toute façon, la majorité des tunisiens lui sont, à jamais, redevables de beaucoup de choses, d’énormément de réalisations.

Pour ceux qui ne connaissent pas suffisamment Bourguiba, et surtout pour les jeunes, je vais essayer d’éclairer leur lanterne sur cet Homme exceptionnel.
En fait  qui est Habib Bourguiba, le Combattant Suprême?

De tous les hommes d’Etat d’une époque qui en connaît beaucoupde flamboyants ou d’abusifs, Habib Bourguiba est probablement celui dont le nom se confond le plus totalement avec la fondationet les premiers développements d’un Etat. Créateur de lapremière organisation qui posât avec sérieux le problème de l’indépendance,militant, chef de parti et d’insurrection, négociateur,prisonnier, libérateur du territoire, fondateur de l’Etat, « combattantsuprême » et guide incontesté, il aura dominé de sa puissante personnalitéla vie du peuple tunisien et imprimé sa marque et sa pensée,pour le meilleur et pour le pire, sur le nouvel Etat. Son origine le prédisposait à incarner la Tunisie moderne: il vientde la petite bourgeoisie rurale à demi ruinée par la concurrencede la colonisation, de cette région du Sahel. Son père, sans ressources,avait dû s’engager dans l’armée. Habib Bourguiba est né,officiellement, à Monastir en 1903, le 3 août, dernier d’une famillenombreuse. Avec l’aide pécuniaire de son frère aîné, il a pu fairedes études sérieuses à Tunis au collège Sadiki, foyer de culturefranco-arabe et au lycée Carnot, puis à Paris, à la Faculté de Droitet à l’Ecole libre des sciences politiques (1924-1927).De retour à Tunis, nanti de diplômes, et profondément séduit parle système politique français et par toutes les libertés dont jouissentles Français, il constata le cruel décalage entre les principeslibéraux, base de l’enseignement qu’il a reçu à Paris, et la pratiquequotidienne coloniale. Très vite, il milite au sein du « Destour » (partilibéral constitutionnel) dont il découvre la vanité et l’inefficience.Il lui faut donc transformer, rajeunir, et muscler ce parti dont leschefs préfèrent plutôt les réunions de salons. Entouré d’un groupede jeunes intellectuels, il provoque une dissidence et convoque, à Ksar Hellal au sahel, en 1934 un congrès où est fondé le « Néo-Destour ». Le nouveau parti tranche sur l’ancien: il n’est plus aristocratiquemais populaire ; il n’est plus, exclusivement, urbain maislargement rural ; il n’est plus intégriste, refuse le «tout ou rien», etaccepte la négociation avec le pouvoir colonial. C’est ainsi qu’est née l’organisation qui restera longtemps leseul parti moderne du monde arabe, qui fera passer la société musulmanede l’âge théologique à l’âge politique, et le groupe orientaldu style de la caravane conduite par le «zaïm» prophétique, à celuide l’organisation de masse appuyant le leader politique.

Un tel appareil attire sur lui les foudres de la colonisation: Bourguiba est arrêté en 1934, puis en 1938. Libéré par les Allemands en 1942, il sait ne pas se laisser séduire par les forces de l’Axe et joue courageusement la carte des démocraties. Ceci lui  vaut l’estime durable des Américains, mais non des Français qui mettront longtemps à comprendre que, dans le monde arabe, il représente une chance exceptionnelle d’entente avec l’Occident. La lettre qu’il adressa de la prison du Fort Saint Nicolas à Marseille à ses camarades du Bureau Politique du Néo-Destour, la plus haute instance du Parti, dans laquelle il leur ordonnait de ne pas aider les Forces de l’Axe et d’être du côté des Alliés, pour se trouver avec les Vainqueurs à la fin de la guerre, restera célèbre et démontrera ses grandes capacités de visionnaire et de fin politique. Ce n’est qu’en 1954 sous le gouvernement du socialiste PierreMendes France que Paris tend la main à Bourguiba qui l’accepte.Un an après, la Tunisie est autonome. Deux ans plus tard, elle estindépendante. Bourguiba a fait prévaloir sa stratégie des «étapes» sur celles des exigences immédiates préconisées par son rival SalahBen Youssef : mais l’évolution a été plus rapide que prévu.Premier Ministre en 1956, il fait déposer le Bey de Tunis en 1957,fait proclamer la République et en devient le Président.

De son oeuvre gigantesque, l’Histoire retiendra, et indépendammentdes erreurs commises et dont certaines étaient importantes,qu’il a été:

1- le Fondateur de l’Etat Tunisien moderne,
2- l’Emancipateur de la Femme avec la promulgation, dès 1956, duCode du Statut personnel, unique dans le monde musulman,
3- et celui qui a généralisé l’enseignement qui deviendra obligatoirepour les garçons comme pour les filles et gratuit pour tous.

Après ce bref rappel de ce que fut BOURGUIBA aujourd’hui attaqué en justice par des  revanchards, revenons à cette longue période transitionnelle.

Le système Syndical, à tous les niveaux (Centrale- Fédérations et syndicats de base), qui sontune fierté pour notre pays, autant ils sont, presque quotidiennement, présentset souvent exigeantspour les revendications salariales, autant ils sont absents pour mobiliser leurs adhérents à plus de rentabilité, à plus de compréhension et à plus de responsabilité, compte tenu des moyens et des possibilités financières du pays. A ce propos, quel secteur d’activité ne s’est pas mobilisé et n’a pas fait grèvepour demander des augmentations salariales sachant pertinemment que notre pays, vivant un changement politique difficile, a perdu beaucoup de ses moyens, de ses activités, de ses ressources et de son crédit ? Et d’ailleurs, aucune voix ne s’est élevée pour rappeler aux travailleurs de raison garder, d’avoir de la patience pour faire redémarrer la machine de production pour réclamer quelques avantages, et  utiliser tous les moyens constitutionnels et pacifiques pour obtenir satisfaction. On a, même, vu des syndicats outrepasser leur rôle et s’opposer aux décisions du gouvernement quant à certaine désignation de Directeur d’Etablissement Hospitalier allant jusqu’à démettre de Hauts responsables de leurs fonctions et cela est grave et même très grave et ne peut prouver que la faiblesse de l’Etatest arrivée à un niveau plus qu’inquiétant.

Nous combattons le terrorisme et notre Armée Nationale et nos Forces de Sécurité Intérieure sont mobilisées depuis huit ans à cet effet. Cependant, le Service National que doit accomplir tout jeune tunisien apte et âgé de vingt ans est un devoir constitutionnel. Chaque citoyen qui ne s’acquitte pas de cette obligation, est passible du tribunal militaire. Alors que nos Armées ont besoin, régulièrement, de renfort, les jeunes sont aux abonnés absents. Et ce qui est étonnant est que personne ne s’en inquiète : ni gouvernants, ni partis politiques, ni organisations nationales, ni société civile, à tel point qu’on croirait que le patriotisme est devenu une denrée rare, très rare même. Tout le monde déclare aimer ce pays et prêt à le défendre mais dans la pratique, tout le monde fait la sourde oreille et la réaction des politiques, à ce propos, est inexistanteet ce, dans le but inavoué d’obtenir les voix de ces jeunes lors des élections à venir. Mais notre beau et merveilleux pays, notre Tunisie, qui a tant donné à chacun de nous, quelque-soit son rang social, ne doit –elle pas être défendue et protégée par ses propres enfants ? Aussi, l’Armée, n’est-elle pas la Grande Oubliée des Politiques !!!

La révolte ou la révolution nous a, certes, donné la liberté d’expression qui, quoiqu’elle ne nourrit pas son monde, demeure un garde- fou inestimable etpermet aux citoyens et aux associations de la société civile d’avoir un contrôle indirect sur les gouvernants et les politiques d’une part et d’autre part, c’est une acquisition remarquable qui n’est  octroyée qu’en démocratie. Aussi, les politiciens, ballottés et bâillonnés par les deux premiers présidents de la Tunisie indépendante, se sont donnés à cœur joie et ont formé tellement de partis politiques, qu’on en trouverait presque un, dans chaque quartier. Cela n’est pas sérieux et notre pays n’a pas besoin de plus de quatre ou cinq grands partis. On ne doit pas ignorer que la politique est une action noble, importante et réfléchieet a, quand même, certains principes moraux. Nombreux de nos respectables députés, négligeant et outrepassant les programmes de leur parti et leurs engagementspropres envers leurs électeurs, ont introduit dans le jargon de la politique* le tourisme électoral* leur permettant de changer, sans aucun scrupule, de parti même si les orientations de l’un et de l’autre n’ont rien de commun. Ces nombreux partis politiques n’ont ni réglé les difficultés économiques que rencontrent nos concitoyens, ni trouvé des solutions au renchérissement du couffin de la ménagère. Tout cela est la preuve irréfutable de l’échec de ces partis et de leurs dirigeants. Comment peut-on expliquer l’absence de la majorité des Députés lors du vote d’un texte de Loi devant sauver les caisses sociales en difficultés ? Ont-ils oublié que, pas plus tard que demain ou après-demain, ils seront, à leur tour, des retraités ?

N’oublions pas de signaler que le 14 janvier 2011 a, malheureusement, transformé, négativement, le comportement du tunisien qui était connu et renommé pour son amabilité, sa gentillesse, sa serviabilité, sa générosité, sa bienveillance, sa tolérance et son indulgence. Il est devenu un autre homme, très différent de ce qu’il était : agressif, malveillant, incorrect, paresseux et peu travailleur, partisan du moindre effort,coléreux et égoïste. Son caractère et son comportement sont perceptibles à l’œil nu et tout cela affecte certainement ses rapports avec la société tunisienne.A voir son comportement lors d’un match  de football et les réactions de ces jeunes et des moins jeunes qui, jetant sur l’équipe adverse  bouteilles, pierres, pétards sans oublier les grossièretés et que sais-je encore, ce spectacle désolant, déshonorant et inacceptable est la démonstration que nous sommes encore très loin des peuples civilisés. Que leur équipe gagne ou  perde, ce sont les gradins et les installations qui en paient les frais.De même, on agresse, très facilement, et régulièrement, les contrôleurs des prix, le personnel paramédical et même des médecins,en service commandé, sans que cela ne gêne, outre mesure, le commun des mortels.A le voir aussi conduire une voiture comme un chauffard qui n’a jamais tenu un volant, à le voir circuler en sens interditpour qu’il ne perde pas cinq minutes pour faire le détour, et enfin,il pense que rien n’est interdit pour lui : stationner en 2° ou 3°position, monter dans un bus ou dans un métro sans payer son billet, arrêter le train qu’il conduit pour aller chercher des fruits, ne pas assurer son service alors qu’il doit piloter un avion de Tunis Air, ou quitter le gouvernail de son bateau qui est rentré en collision avec un autre bateau en pleine mer, ou agresser physiquement et impunément, les contrôleurs des prix en service commandé ainsi que le personnel paramédical,nous aurions parier, il y a une dizaine d’années, que si notre concitoyen serait capable de commettre une faute aussi monstrueuse, il serait,immédiatement sanctionné et pourrait, même, être licencié et son syndicat ne pouvait intervenir pour le défendre. Cet état de fait dure depuis de nombreuses années et il est étonnant qu’on n’ait pu rien faire pour éradiquer ces usages interdits et d’un autre âge. A propos des voyous des stades, pourquoi ne pas utiliserla méthode des anglais qui sont arrivés à *dompter* leurs fameux Hooligans. Et puis, quelle formation morale, patriotique et civique réserve-t-on, dans les programmes pédagogiques à ces jeunes que ce soit à l’école, au collège et au lycée ou dans les clubs et associations ou à la Télévision? Aussi, cette jeunessequi, quoiqu’on en pense ou on en dise, ne doit pas être négligée ou oubliée parce qu’elle doit prendre le relai et la relève.Ceci est plus important et plus urgent que les querelles et discussions des plateaux télé et radio stériles et une attention toute particulière doit être portée à cette question. Ce qui est plus qu’inquiétant, est que notre jeunesse n’a plus de rêve et ceci doit être aussi angoissant qu’effrayant et préoccupant pour le pays et  surtout pour les Hommes politiques. Aussi, les ministères de la jeunesse, de l’éducation, de la culture, de l’enseignement supérieur, de l’emploi et de la formation professionnelle sont concernés par ce problème qui est aussi grave que capital. Ils ont du pain sur la planche pour avoir une nouvelle vision et trouver et préparer une politique de formation, de réformation et de redressement concernant cette tranche d’âge non négligeable qui concerne près de 35 % de la population. Il y va de l’avenir du pays et notre responsabilité vis-à-vis des générations futures est, bel et bien, engagée.

D’autre part, une bonne partie de cette jeunesse est fatiguée et désespérée de vivre en chômage. D’ailleurs, sur une population active de quatre millions et quart environ, le chômage représente entre 15 et 15,5% soit près de 638.000 dont 260.000 diplômés du supérieur.Lutter contre le chômage nécessite l’attraction de beaucoup d’investisseurs nationaux et étrangers. Mais nous devons veiller à ce que certains secteurs stratégiques tels que les ports, les aéroports, les finances et l’éducation, soient, s’agissant d’investissement, des domaines, hautement, réservés.   
Cependant, il y a lieu de signaler le rôle éminemment positif joué par la femme qui, devant être qualifiée, au départ, par un certain parti politique de complément de l’homme, s’est mobilisée et a imposé à l’ARP de réviser cette définition et de la considérer comme étant le partenaire et l’égal de l’homme. Ce qui est absolument normal et conforme au Code du statut personnel.
Gouverner un pays n’a jamais été une chose aisée surtout pour ceux, indépendamment de leur niveau intellectuel et de leur militantisme, n’ont aucune expérience dans la gestion de la chose publique ou n’ayant pas servi, de près ou de loin, dans le système ou dans la fonction publique. C’est cette méconnaissance de la gestion de la chose publique par le premier gouvernement issu des élections de 2011 qui  a dépensé sans compter conduisant le pays à une situation de chaos et de difficultés financières sérieuses. De même, le comportement en public de certainsresponsables, techniciens et spécialistes de haut niveau tels que pilote de lignes, commandant de navire, conducteur de train a été, à plusieurs reprises, inacceptable et irresponsable. C’est pourquoi des erreurs fatales ont été commises dont :

1- Tel ministre de l’intérieur qui supprime, le plus simplement du monde,la Direction de la Sûreté de l’Etat( AMN EDDAWLAH), organisme capital et essentiel dans tous les pays du monde, et dégage la trentaine de ses cadres spécialisés dans le renseignement, ces cadres dont la formation nous a coûté les yeux de la tête et dont l’expérience acquise a nécessité des décennies de formation et de pratique,
2- Tel autre ministre de l’intérieur qui, sous le conseil intéressé de certaines âmes charitables, trouve normal et régulier de décider, seul et sans l’avis du chef du gouvernement, l’avancement de plusieurs centaines, si ce n’est plus, de cadres des forces de sécurité intérieure, en leur accordant, le même jour, deux ou trois grades, du jamais vu,même pas dans les républiques bananières.
3- Un syndicat qui s’oppose à la nomination d’un Directeur d’hôpital en imposant son point de vue !!! Etc………
4- Tel pilote qui s’est battu, en public, avec son technicien ; tel autre, désigné de service, s’absente sans se soucier des passagers qui étaient dans l’avion; tel commandant de bateau qui, en pleine mer, ne trouve pas mieux que de laisser son navire heurter un autre ; tel conducteur de train qui s’arrête en rase campagne pour aller acheter des pêches. Ces comportements, signalés par les médias etindignes de notre pays, nécessitent, s’ils ont vraiment eu lieu, de très sévères sanctions, pour l’exemple.

Il est très regrettable de constater que nos villes, nos villages et même nos patelins sont plus sales que jamais et les municipalités, fraichement élues, nous donnent l’impression qu’elles ne connaissent ou ne jouent pas leur rôle. Nombreuses sont celles qui sont, plutôt, préoccupées par leurs divisions et leurs mésententes.  Nos grandes villes et surtout notre capitale qui a toujours été d’une grande propreté et d’une netteté certaine, est pleine de détritus, d’ordures ménagères et de déchets de toutes sortes à tel point qu’on croirait que les agents de la voirie ne passent que rarement et sans efficacité aucune.                

D’autre part, il me semble que nous avons perdu tout ce qui donne à l’être humain la fierté d’exister, d’être content d’appartenir à un pays à l’histoire trois fois millénaire, d’avoir une situation sociale qui peut s’améliorer, d’être ambitieux pour fonder une familleet subvenir à ses besoins, en fait nous sommes devenus, tellement, paresseux que le travailet surtout le rendement et la rentabilité semblent devenir quelque chose de secondaire. D’ailleurs comment expliquer que quelques mois après le 14 janvier, on décide, aussitôt, l’application de ce qu’on appelle, communément, le week-end anglais, pour qu’on ne travaille pas le samedi ? Avons-nous besoin d’accorder trois jours de congé pour certaines fêtes religieuses ? Si on veut imiter certains pays du Golfe, nous sommes loin d’avoir les mêmes richesses !! Puisque même les journaux s’abstiennent de paraitre les jours de fête, n’est-ce pas le comble ? Est-ce cela la conséquence de la révolution ?

Aussi, notre pays, après ces huit ans de vacances, de laisser aller et de laisser faire et surtout de *farniente*, a besoin d’une reprise en mains salutaire dans tous, absolument tous les domaines. Souhaitons qu’après les prochaines élections, nous aurons des gouvernants courageux, capables de siffler, une bonne fois pour toutes, la fin de la récréation et usant de cette autorité qui nous a fait défaut depuis le 14 janvier, engageront le pays dans la voie du Labeur, du Travail, de l’Action, de l’Ouvrage, de l’Activité, de l’Emploi et du Service.

Et lorsqu’on jette un coup d’œil sur le paysage politique du pays, on constate que nous sommes encore très loin du compte. Et  en évaluant tout ce qui s’est passé durant ces huit dernières années, et du fait de l’attrait et du goût du pouvoir, certains politiciens se croyant professionnels dans ce domaine, oubliant ou ignorant les fondements, les règles et la moralede la politique,se préparent, becs et ongles, à se jeter dans la prochaine campagne électorale pour se maintenir en poste ou gagner une députation. Qu’ils se rappellent, surtout, qu’ils n’ont, pratiquement, rien fait et pour le pays et pour leur région. Aussi, l’exemple du Nidaaet de ses clans est révélateur de cet état d’esprit qui estime et qui a démontré que l’intérêt personnel et l’égoïsme priment, contrairement à ce qu’on affirme régulièrement, sur l’intérêt général. Et dans ce cas précis, la responsabilité historique de l’affaiblissement de ce parti politique qui a bien joué son rôle en 2014, incombe à certaines Hautes Personnalités qui n’ont pas eu le courage de tenir leurs promesses et de prendre, quand il le fallait, les décisions mémorables qui s’imposaient. L’Histoire les jugera sans aucun doute..

Notre pays a besoin d’un nouveau Hedi NOUIRA, que Dieu aie son âme et l’accueille dans son Eternel Paradis car c’est grâce à lui que le pays a réussi son examen de passage économique dès les années 70. C’est lui qui a été l’initiateur du développement du pays. La Tunisie n’a pas besoin de cette pléthore de politiciens mais plutôt d’experts et de visionnaires en économie et c’est celui qui aura le meilleur programme de développement qui marquera la 2° république et qui sera le Grand Homme d’Etat dont nous rêvons tous et que, certainement, nous soutiendrons de toutes nos forces. Et pourtant, notre pays est riche en cadres dans tous les domaines mais pour ne pas faire appel à eux, on les qualifie, très injustement, *d’azlems *. Il faudrait, seulement, que nos politiciens se départissent de leur égo, de leur vanité et de leur complexe pour faire appel à ces compétences dont certaines sont de notoriété internationale et que nombreux pays souhaiteraient avoir.

Quant aux prochaines élections, nous risquons d’avoir des surprises suite aux égoïsmes des uns et aux mauvais calculs des autres, surprises que nous regretterons beaucoup, puisqu’en cinq ans, les forces politiques, à sensibilité démocratique et surtout les néo-destouriens se déclarant comme tels et ils sont fort nombreux,ont manqué de courage pour s’unir en vue de continuer l’œuvre du Combattant Suprême et mener la Tunisie sur la voie tracée par le grandissime BOURGUIBA qui a dit et ne l’oublions jamais: « je ne crains pour mon pays que les malheurs que lui feront subir ses enfants ».

Que Dieu protège notre beau pays, la Tunisie, l’héritière de Kairouan et de Carthage.

Boubaker Ben Kraiem
Ancien Sous-Chef d’Etat- Major de l’Armée de Terre,-Ancien Gouverneur.

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