News - 28.06.2010

Le Pr Mustapha Besbes reçu en séance solennelle de l'Académie des sciences

Sous la Coupole de l’Institut de France à Paris, le Pr Mustapha Besbes devait faire le 15 juin dernier son entrée à l’Académie des Sciences, lors de la solennelle séance d’admission des nouveaux associés étrangers.

Dans l’allocution qu’il a prononcée à cette occasion, l’éminent  hydrogéologue tunisien, s’est déclaré honoré par son élection qui s’inscrit dans un double mouvement d’ouverture en faveur de l’hydrogéologie et des pays du Sud. « Un double mouvement, dit-il, car à travers ma nationalité tunisienne, l’Académie signe son engagement envers la recherche conduite dans les pays du Sud, confortant nos efforts pour une contribution effective aux progrès de la connaissance universelle. Pour nos jeunes générations, votre signal offre un nouveau souffle, un nouveau challenge, une source de dépassement. » Extraits.

 

« J’aurais difficilement imaginé être admis un jour dans le cercle où a siégé l’illustre Darcy, inventeur de l’hydrogéologie moderne.

Jeune géologue formé à la Sorbonne au début des années 60, je n’avais pas de projet scientifique particulier, mais le souci d’être un acteur du développement de mon pays. J’ai ainsi vécu plusieurs années des joies des populations à la découverte d’eau dans des régions totalement dépourvues, avec toujours cette part de doute, d’angoisse stimulante que procure la responsabilité solitaire du forage profond.

Quelques années auparavant, l’UNESCO faisait de l’Hydrologie de la zone aride son projet scientifique majeur. Mon arrivée sur la scène coïncidait avec les brassages qu’ambitionnait cette première mondialisation scientifique. Ces échanges allaient imprégner ma vie professionnelle et susciter une vocation scientifique durable.

La plaine de Kairouan était mon laboratoire. Méthodiquement, j’y avais tissé un réseau d’observation dont je savais qu’il servirait à découvrir les mystères de la recharge par infiltration des crues d’oueds, source d’alimentation des nappes dans cette région aride. Et en 1969 survint la crue la plus importante.

La concomitance de ce phénomène exceptionnel et d’un système d’observation préexistant impulsa une avancée considérable des connaissances, permit l’identification du processus et le développement de nouveaux modèles.

Je pressentais que la modélisation allait révolutionner les méthodes de l’hydrogéologie. J’émigrai à l’École des Mines de Paris qui en était devenue le Temple. La grande force de ce groupe était sa polyvalence : à l’hydrologie mathématique, j’apportais mon regard de géologue et ma perception du terrain. Immergé dans ce bouillon de culture, je devins vite le grand spécialiste de la modélisation des nappes.

En 1999, je fus appelé à coordonner le projet de modélisation des grandes nappes sahariennes : un projet gigantesque pour un continent aquifère. Avec une équipe acharnée, nous avons conçu le Modèle du Sahara comme un outil pédagogique, un instrument de médiation internationale autour duquel a pu s’organiser la concertation entre les pays. Les retombées scientifiques notables furent la construction stratigraphique et hydrologique du Multicouche saharien, et l’établissement d’une recharge des nappes réputées fossiles.

L’avenir de l’eau constitue certainement l’un des grands défis des pays arides comme la Tunisie, où toutes les ressources sont utilisées, où il faut en gaspiller le moins, dessaler et recycler les eaux; mais ces palliatifs ont une limite, physique ou économique. Les pays arides sont certes confrontés à la rareté, mais le concept de stress hydrique acquiert une nouvelle perspective lorsque le paradigme de l’eau douce est élargi, notamment à l’eau utilisée par les cultures pluviales, qui constitue une réserve gigantesque bien qu’aléatoire, et à l’eau que représentent les produits alimentaires échangés entre les nations. Avec un groupe de collègues, nous développons cette recherche depuis des années et les perspectives sont prometteuses.

L’hydrogéologie est certes jeune. C’est au milieu du 20ème Siècle qu’elle apparaît comme discipline scientifique avec ses théories, ses applications, sa communauté. Elle est enseignée dans les universités dès la fin des années 50, puis se trouvera pleinement consacrée avec l’élection de Ghislain de Marsily à l’Académie des sciences. Depuis, l’Académie ne cesse de conjuguer l’hydrologie aux autres disciplines.

Je suis honoré que mon élection s’inscrive dans ce mouvement d’ouverture. Un double mouvement car à travers ma nationalité tunisienne, l’Académie signe son engagement envers la recherche conduite dans les pays du Sud, confortant nos efforts pour une contribution effective aux progrès de la connaissance universelle. Pour nos jeunes générations, votre signal offre un nouveau souffle, un nouveau challenge, une source de dépassement. »


 

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8 Commentaires
Les Commentaires
Ben Hamida Noureddine - 29-06-2010 00:03

Un grand bravo pour le professeur Mustapha BESBES. Un scientifique tunisien , élu en tant qu'associé étranger à l'académie française des sciences, est un événement d'une très grande importance pour tous les chercheurs, ingénieurs et scientifiques de Tunisie. C'est un signe de plus de reconnaissance, par une institution prestigieuse, du savoir et des résultats des travaux de recherche appliquée de nos élites scientifiques. Tous les tunisiens doivent être fier de cette distinction et surtout les jeunes pour qui le professeur "académicien" Mustapha BESBES peut être pris comme l'exemple d'une réussite scientifique qui a traversé la méditerranée.

Besbes Raouf - 29-06-2010 00:55

Féliicitations si Mustapha, les Besbes devraient en être fièrs. Bon courage et bonne continuation

khaldounin - 29-06-2010 08:58

C'est un honneur pour la Tunisie et pour ses efforts sacrifiés à l'éducation et la recherche scientifique. On n'aurait mieux connaitre cet homme noble si il passait bien dans une mission télévisée au lieu des mezoiedias et de leurs supporteurs.

CH . jalel - 29-06-2010 09:41

Mes sincères félicitations, et merci C’est Un grand honneur pour toute la Tunisie

Rafla Fakhar Cheikh - 29-06-2010 16:18

Honneur à toute la Tunisie. 1000 mabrouk à mon Professeur Monsieur BESBES. Votre entrée à l’Académie des Sciences est un honneur à nous tous. Vous êtes notre « prix Nobel ». Une ancienne élève « Rafla Fakhar »

Imed Nouri - 29-06-2010 16:30

Quelle fierté nous procure l'honneur fait à notre éminent professeur !

Labidi - 29-06-2010 19:49

Malgré la contribution efficace des hydrogéologues tunisiens dans l'effort de developement du pays, le ministère de l'agriculture , des ressources hydrauliques et de la pêche ne les reconnait pas etant qu'ingénieurs mais comme etant de petits simples fonctionnaires c'est pour cette raison qu'ils sont trés bien vus à l'extérieur et trés marginalisés dans notre pays.

HLALI Mimoun - 02-07-2010 13:38

BRAVO ENIT Un grand bravo pour le professeur Mustapha BESBES. Un scientifique tunisien , élu en tant qu'associé étranger à l'académie française des sciences, est un événement d'une très grande importance pour tous les chercheurs, ingénieurs et scientifiques de Tunisie. C'est un honneur pour la Tunisie et l'ENIT( Ecole Nationale d'Ingénieurs de Tunis) et pour ses efforts sacrifiés à l'éducation et la recherche scientifique.

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