Mohamed Larbi Bouguerra: Trump reçoit un camouflet à l’ONU… et une palestinienne de 16 ans en donne un autre à Israël !
Ainsi donc, jeudi 21 décembre 2017, l’Assemblée Générale de l’ONU a massivement rejeté la décision unilatérale américaine du 6 décembre tendant à faire de Jérusalem la capitale du seul Israël, décision qui brisait un consensus international de 50 ans sur la Ville Sainte. Ce consensus, sanctionné pourtant par un vote des Nations Unies en date du 4 juillet 1967, déclarait « nulles et non avenues » les actions unilatérales d’Israël à Jérusalem. Aujourd’hui, le texte rédigé par le Yémen et la Turquie souligne que la question de Jérusalem doit faire partie d’un accord de paix final entre Palestiniens et Israéliens.
Une gifle a l’homme le plus puissant de la planète
Mais M. Trump - en bon businessman et en bon capitaliste - n’a comme référence que l’argent. « In dollar, he trusts. » Il a donc menacé de couper les vivres aux pays qui voteraient contre sa volonté. Mais cela n’a pas suffi ! Et c’est une retentissante gifle que l’ONU a asséné au 45ème président des Etats Unis. 128 membres ont voté contre la décision américaine - toutes les grandes puissances dont la Grande Bretagne, la France, l’Inde, la Chine, le Japon et la Russie - tous les pays d’Europe Centrale et tous les pays musulmans. 35 pays se sont abstenus comme le Canada et l’Australie pourtant alliés des Etats Unis.
Qui a donc voté en faveur de la résolution américaine ? Outre Israël et les Etats Unis, on trouve le Togo, le Guatemala, le Hondura, les îles Marshal, la Micronésie, Nauru, Palau, des Etas microscopiques qui dépendent des subsides américains. 21 pays n’ont pas pris part au vote étant absents.
Résolution symbolique des Nations Unies ; oui, mais ce vote prouve l’isolement des Etats Unis. Comme il prouve l’échec de la diplomatie de Netanyahou. Récemment, le premier ministre sioniste a visité et déployé force amabilités à de nombreux pays notamment du continent africain. Cela n’a servi à rien puisque l’Inde - dont le premier ministre a visité Israël il y a quelques mois et dont l’aviation s’entraîne avec celle des sionistes - a voté contre les Américains et contre Israël. Netanyahou se satisfait de ce vote moins massif que celui de 2000 mais la communauté juive des Etats Unis, par la voix de David Harris de l’American Jewish Committee (AJC), exprime sa frustration et son inquiétude face à cette forte réaction de la communauté internationale.
M. Trump fait du chantage à l’ONU mais il ne peut couper les vivres à la Jordanie et à l’Egypte*** étant donné les accords sur la reconnaissance d’Israël par ces deux pays. Comme il ne peut couper les vivres à l’Afghanistan, à l’Irak et au Pakistan qui l’aident à lutter contre le terrorisme. Du reste, le porte-parole du Département d’Etat, Heather Nauert, s’est senti dans l’obligation d’atténuer les termes de M. Trump en disant que l’administration ne tient pas compte seulement du vote à l’ONU pour attribuer des fonds à un Etat donné. (The New York Times, 21 décembre 2017).
Le président Abbas, dans une lettre de Noël adressée aux chrétiens - alors qu’il était reçu à l’Elysée ce vendredi 22 décembre 2017- a qualifié de « biaisé » en faveur d’Israël et des colonies le rôle des Américains dans le conflit. Il a affirmé que « le plan américain n’est pas fondé sur la solution à deux Etats sur les frontières de 1967 et il n’est pas fondé sur le droit international ni sur les résolutions onusiennes. » Abbas a rappelé le message « d’amour, de paix et de justice » du Christ et déploré les exactions et les crimes commis par l’armée israélienne à Bethléem, là où est né le fils de Marie.
Quoi qu’il en soit, le roi est nu. Quelqu’un devrait le dire à M. Trump. Il s’agit d’une magistrale gifle. L’arrogant milliardaire qui occupe la Maison Blanche - et qui, depuis plus d’un an, n’a pas obtenu le moindre succès dans l’arène diplomatique - est plus visé par ce vote de défiance que son sulfureux compagnon israélien qui qualifie l’ONU de « maison des mensonges », cette maison qui a présidé à la naissance de l’Etat d’Israël en 1948 !
La gifle d’une héroïne palestinienne
Les journaux israéliens ne parlent plus que d’Ahed Tamimi âgée de 16 printemps et qui habite Nabi salah.
Ces mêmes organes de presse n’ont guère évoqué les drames de trois de ses jeunes camarades victimes de l’armée d’occupation sioniste. Silence sur toute la ligne !
Mardi 12 décembre 2017, l’armée israélienne a tiré directement une balle dans la tête du jeune Hamed al-Masri, 15 ans, non armé habitant à Salfit. Sévèrement atteint, le jeune homme est entre la vie et la mort dans un hôpital palestinien.
Vendredi 15 décembre 2017, ce fut au tour de Mohamed Tamimi, âgé lui aussi de 15 ans, de recevoir une balle israélienne dans la tête. Il était non armé et habitait Nabi Salah. Ce même vendredi, l’armée sioniste - invincible comme chacun sait - a remporté une nouvelle « victoire » : elle a tué le jeune Ibrahim Abou Thouraya, amputé des deux jambes, et là encore, en visant la tête.
Ces drames, ces assassinats, cette volonté barbare d’éliminer le Palestinien comme on arrache une mauvaise herbe, rien de tout cela n’intéresse la presse et les médias d’Israël.
Pourtant, ce vendredi fatidique allait enflammer et enrager la presse israélienne, sa télévision, ses commentateurs et même certains de ses ministres.
Ce vendredi en effet, Ahed Tamimi était dans la cour de sa maison avec des amies lorsque l’armée d’occupation a fait irruption dans la demeure. Ni une ni deux, elle a giflé l’officier israélien et a donné un coup de pied à ce militaire qui osait ainsi violer sa demeure.
Gideon Levy écrit (Haaretz, 21 décembre 2017): « Comment a-t-elle osé ? se sont écriés en chœur les Israéliens. Cette Tamim a vraiment du culot. Elle a transgressé les règles. Gifler est seulement permis aux soldats. C’est elle l’auteur de la provocation, non le soldat qui est entré chez elle sans y être invité. Elle a osé résister à l’armée qui a tué trois de ses proches. C’est elle la provocatrice ; elle dont les parents ont été arrêtés tant de fois et dont le père a passé quatre mois en prison pour avoir manifesté. Elle a résisté. Culot palestinien. Tamimi était supposée tomber amoureuse du soldat qui a envahi sa maison et lui lancer du riz. Quelle ingrate. C’est à cause de ces gens qui passent leur temps à inciter les Palestiniens car sans eux, sans cette incitation, elle n’aurait pas haï son conquérant…. Pour le ministre de l’Education, Naftali Bennet, « elle devrait finir sa vie en prison. » Et Levy de poursuivre : « Ce faisant, la fille de Nabi Salah a détruit de nombreux mythes chez les Israéliens. Le pire de tout : elle a osé porter atteinte au mythe israélien de la masculinité. Soudain, il se trouve que l’héroïque soldat qui nous garde nuit et jour avec courage et audace a pour adversaire une fille aux mains nues. Que va-t-il arriver à notre testostérone et à notre machisme que Tamimi a si aisément fracassés ? Soudain, les Israéliens ont vu le cruel et dangereux ennemi qui leur fait face : une jeune fille de 16 ans aux cheveux frisés. Toute la déshumanisation et toute la diabolisation des médias flagorneurs et serviles ont volé en éclats face à une fille en sweater bleu… qui n’avait même pas une paire de ciseaux à la main. » Il est difficile de faire de cette fille une terroriste. Elle était si humaine mais ne nous faisons aucune illusion : la propagande israélienne et son lavage de cerveau si efficace tueront bientôt cette Tamimi là, ce phénomène.
Gideon conclut : « Tamimi est une héroïne, une héroïne palestinienne. Elle a rendu fous les Israéliens. Que vont dire les correspondants et les experts militaires ? A quoi vont servir les unités spéciales comme Kfir, Duvedan et Oketz et toutes les autres si l’armée israélienne n’a à affronter qu’une population civile sans défense, fatiguée de l’occupation et représentée par une jeune fille avec un keffieh sur l’épaule ? ….Israël a répondu comme à l’accoutumée : enlèvement de Tamimi de nuit de sa maison et détention avec sa mère. »
Gideon Levy espère que l’exemple de Ahed Tamimi déclenchera une intifada de la gifle. Une intifada qui prenne exemple donc sur l’Assemblée Générale des Nations Unies qui a collé une magistrale gifle à M. Trump. Rappelons au président des Etats Unis ce que disait le grand poète anglais William Blake (1757-1827) : « Partout où l’argent s’immisce, il n’est plus possible de faire de l’art, mais la guerre seulement. »
Mohamed Larbi Bouguerra
***L’été dernier, M. Trump a retardé le versement de 300 millions de dollars à l’Egypte pour punir le Caire qui violait allègrement les droits de l’homme.
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