Notes & Docs - 12.11.2012

Les nouveaux enjeux politiques ?

Vu de l’intérieur de la Tunisie, il semble que rien ne bouge et que tout le monde est dans l’attente d’un énième « miracle tunisien ». Mais, comme les autres, notamment ceux qui gèrent les grandes puissances géopolitiques, militaires et économiques, sont convaincus que les miracles historiques et politiques ne se produisent qu’une seule fois. Alors il est peut-être urgent que les tunisiens lisent et relisent les significations des changements qui viennent de se produire au niveau des relations internationales. Par ailleurs, de grands réseaux financiers originaires des Pays du Golf s’implantent à travers le monde  et on se demande si cette nouvelle manne de financement du capitalisme international pourrait changer la carte politico-financière actuelle.

I - L’environnement International

• La crise économique persiste en Europe. Elle touche progressivement la Chine, le Japon, l’Inde,… Les sauveurs d’hier sont aussi menacés par cette économie au service de la haute finance.
• Certes, les élections aux Etats Unis au début de novembre prochain auront des prolongements sur les relations internationales et sur l’état géopolitique du monde. Cependant, nous considérons que le prochain Congrès du Parti Communiste Chinois est aussi déterminant que l’issue de ces élections américaines : Ce congrès du parti de l’Etat Chinois aura comme objectif de changer toute la direction du parti. Il aura également à actualiser sa stratégie économique, industrielle et énergétique tout en renouvelant le contenu du nationalisme chinois qui risque d’être récupéré par les nationalistes et perturbé par les contestations sociales qui se multiplient sur tout le territoire. Enfin, la priorité de la Chine est d’affirmer un positionnement géopolitique concurrent et ferme en Asie et en Afrique limitant en même temps l’influence de Japon.
• La Russie ne cèdera pas pour le moment sur une éventuelle  intervention militaire des forces étrangères en Syrie. Toute hésitation de sa part laisse penser que cette puissance est sur le bord d’abandonner son positionnement géopolitique au Proche Orient en Iran et au Golf Persique ou Arabique. En d’autres termes, si la Russie fait cette concession, elle signe la fin de son statut de puissance et perd définitivement son influence dans la région.
• L’Europe, même avec ce nouveau Traité, semble toujours une organisation qui ne peut accéder à un positionnement géopolitique aux limites claires et visibles. Par ailleurs, dans sa crise économique et d’austérité c’est les plus pauvres qui seront touchés. Cette situation pourrait donner une naissance à de grands mouvements de contestation contre les pouvoirs en place. (semblable à mai 68).
• L’Espagne traverse une crise économique et institutionnelle, la revendication de l’indépendance de Catalogne mettra certainement l’unité espagnole en dérive.
• Le réchauffement planétaire se poursuit : la banquise arctique a fondu ces derniers mois plus que jamais ce qui risque de conduire à la transformation  de la cartographie du monde.

II - L’Environnement régional

• Une situation toujours confuse en Libye et aux frontières subsahariennes. L’Algérie prône une solution politique pour résoudre cette crise et considère qu’il est encore possible de négocier avec les mouvements identitaires les séparant ainsi de la stratégie de l’Aqmi, alors que certains pays frontaliers privilégient l’intervention militaire dans tout le nord du Mali.
• Un faux vrai coup d’Etat en Mauritanie ! 
• L’intervention militaire au Mali se confirme, une armée africaine sera mise sur pied pour organiser l’offensive. La France et les USA s’engagent à apporter un appui logistique (un apport nécessaire quand il s’agit d’un territoire aussi vaste que les frontières subsahariennes du Maghreb). Faut-il voir derrière ce schéma une intervention de l’OTAN similaire à celle effectuée en Lybie ?
• Cette offensive OTAN, France, USA, certains pays africains, etc. est tout à fait atypique :
-  Elle est annoncée depuis plus de trois mois (ce n’est plus une guerre surprise)
- Il n’a y a pas  un Etat précis à attaquer (tel que l’Iraq ou la Syrie).
- Elle mobilise avant même son déclenchement un grand membre du Jihadistes d’origine diverse qui sont prêts à soutenir les mouvements islamistes au nord du Mali dans toute la zone subsaharienne.  S’agit-il là d’un scénario qui rappelle par certains aspects d’Afghanistan ?

• Une cacophonie entre Pays Arabes à propos de la solution à adopter pour mettre fin aux différents massacres qui se répètent quotidiennement en Syrie.
• La question syrienne divise les Pays Arabes en trois groupes :
- Le premier, qui vue sa situation intérieure, n’a même pas la possibilité politique d’émettre un avis (Libye, Yémen, Bahrain..)

- Le deuxième, qui refuse toute intervention militaire étrangère, même Arabe, tel que l’Egypte dont le rôle géopolitique dans la région Arabe s’affirme de jours en jours.

- Le troisième groupe(Les Pays du Golf), ceux qui appellent à l’intervention militaire avec un sentiment de profonde inquiétude parce qu’ils ne savent pas  où cette guerre va les mener (idem pour les pays occidentaux).

• Enfin, la Turquie, l’Iran et Israël disposent-ils déjà d’un scénario clair et définitif sur leurs positionnements dans un éventuel conflit armé en Syrie ?
• Le Maghreb, ce mythe et cette mythologie politique qui revient tous les ans dans le discours politique et dans les médias avec une argumentation de plus en plus superficielle  sans véritable projet politique. Les pays qui composent ce Maghreb sont-ils en mesure d’envisager  dans la situation actuelle une approche stratégique et géopolitique commune ? Peuvent-ils renouveler et moderniser le discours politique pour construire un Maghreb démocratique et de sociale et pluriel ? Y a-t-il des partis politiques qui représentent aujourd’hui  un  nationalisme maghrébin rénové ? Faut-il s’arrêter à l’approche économique « le coût du non Maghreb »  formulation hélas négative.
• Les pays maghrébins pourront t-il adopter une position commune sur des éventuelles interventions militaires au Mali et en Syrie ? cette convergence ouvrirait certainement  de grandes perspectives en matière de coopérations stratégiques.

III. L’Environnement National

• En dehors des enjeux  politiques sept phénomènes approfondissent les facteurs d’instabilité en Tunisie et confirme la fragilité de l’Etat :
- Le Marché noir ou parallèle qui prend aujourd’hui des proportions inquiétantes.
- Les mouvements des contestations à l’intérieur du pays qui se multiplient tous les jours dans les villes et les villages du sud tout particulièrement.
- Les actes de destructions des saints qui s’amplifient ; «  Saida Mannoubia »  la quatrième  opération menée dans ce cycle.
- Les faits divers violents préoccupent de plus en plus la société et se transforment en indicateurs (objectifs) sur l’absence d’une stratégie sécuritaire intérieure.
- Les événements qui se sont produits à l’embrassade des USA ne sont toujours pas compris ni admis par l’écrasante majorité des tunisiens.
- La dérive de Tataouine, un mort dans des conditions inacceptables.
- Les affrontements survenus à Gabès dont les conséquences sont encore mal évoluées.

• Au niveau  de l’actualité politique, l’Etat semble mal outillé pour le moment en vu de  trouver des solutions consensuelles, dynamiques, définitives  et porteuses d’espoir dans des secteurs vitaux tels que le développement économique régional, le statut des médias, de la magistrature, etc.
• L’importance du dialogue entre tous les acteurs politiques ne semble toujours pas un Impératif  pour mettre la transition démocratique réellement en marche : l’initiative de l’UGTT du 16 Octobre n’a pas été saisie par deux partis au pouvoir à savoir Ennadha et le CPR. Pourtant elle constitue une issue (même provisoire) qui aurai  pu  créer un climat plus serein  et une confrontation politique plus mesurée et moins idéologique.
• L’urgence d’un pacte national contre toutes formes de violence n’est toujours pas ressentie comme une priorité absolue dans la mise en forme du projet démocratique.

Il y a donc urgence pour l’Etat, les partis au pouvoir de se rapprocher d’avantage de la société et de tenir compte des revendications des nouveaux acteurs apparus après le 14 Janvier à savoir :
- Le peuple, les régions et les chômeurs.
 
Il y a donc urgence pour l’Etat de définir un projet de société « vendable » à l’intérieur et l’extérieur du pays.
 
Il y a donc urgence pour l’Etat et tous les acteurs politiques, la société civile et les syndicats de réfléchir sur les bases d’un nouveau nationalisme incluant et solidaire.

Enfin, la Tunisie a besoin plus que jamais d’un Pacte National Contre La Violence et ce malgré toutes les avancés conquises depuis le 14 janvier 2011.

Ridha Tlili

Lire aussi :

La Fondation Ahmed Tlili plaide pour un pacte national contre la violence

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