La Tunisie, entre optimisme vu de Washington et inquiétude en zoom sur le terrain
Où faut-il mettre exactement le curseur. L’image globale de la Tunisie auprès des financiers à Washington, comme dans nombre de capitales occidentales, est optimiste. On admire la révolution, qualifiée d’unique en son genre, et on cherche à comprendre son déroulement et entrevoir son évolution. C’est l’impression rapportée par le Gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie, M. Mustapha Kamel Nabli, après avoir pris part aux Réunions du Printemps, dans la capitale fédérale américaine. Mais, en zoomant sur le terrain et en analysant de plus près les indicateurs, il ne peut s’empêcher d’exprimer son inquiétude. Sans verser pour autant dans l’alarmisme.
Ce mouvement de fond tout à fait exceptionnel a permis au Tunisien de reprendre toute sa liberté et d’engager un véritable processus de transition démocratique avec des acquis déjà significatifs en quelques semaines seulement. Mais, il ne manque pas de générer, en même temps, des pressions sur l’économie, surtout du fait du comportement individualiste de certains et de la surenchère revendicative de nombreux groupes. Dans ce bouleversement «sismique », le manque de visibilité est compréhensible et l’incertitude, intrinsèque, mais si un certain niveau d’incertitude est acceptable, l’essentiel est de s’assurer le passage vers la démocratie de la façon la plus acceptable possible.
La situation économique est encore délicate, sans être grave ou alarmante. L’économie a commencé à reprendre sans être capable d’assurer pour le moment une croissance suffisante pour garantir de bonnes conditions de vie. Réduites entre 0 et 2%, les prévisions de croissance à ces taux très limités, ne sont pas sans impacts significatifs. La destruction des capacités de production et les conflits sociaux, ajoutés à ce climat d’incertitude et d’attente, ont accéléré le ralentissement, faisant baisser la demande effective de consommation et d’investissement. Les effets amplificateurs sont nombreux : la crise du tourisme, le retour en masse de travailleurs tunisiens en Libye et l’affluence massive de réfugiés fuyant la guerre civile dans ce pays voisin.
Face à cet impact très sévère, le plan de relance initié par le gouvernement a, entre autres actions, permis l’injection de liquidités, s’efforçant également d’éviter la détérioration de la balance extérieure et privilégiant le recours à des financements de qualité à des coûts acceptables. Pour le secteur bancaire, déjà éprouvé par la baisse des dépôts, Il fallait également réduire l’impact négatif, afin que les banques ne subissent pas, en boomerang, l’effet des entreprises en difficultés et que leurs portefeuilles ne se détériorent pas, ce qui plombera leurs capacités de financement. C’est ainsi que celles-ci ont été encouragées, par circulaire de la BCT, à aider les entreprises en difficulté à restructurer leurs dettes et se refinancer. Si la signature de l’entreprise est habituellement de bonne qualité, il n’y a pas lieu de reclasser la dette à un risque plus élevé. En outre, le niveau des réserves obligatoires à bloquer auprès de la BCT, a été baissé afin d’améliorer les ressources des banques. Si aujourd’hui, la Tunisie est quelque peu à l'abri de l’inflation, elle continue à faire preuve de vigilance et s’employer à la juguler pour l’avenir, ce qui n’est pas totalement acquis.
Deux lueurs d’espoir pointent cependant à l’horizon. Il s’agit des prévisions de bonnes récoltes agricoles et de la croissance des exportations des produits manufacturiers, hors produits phosphatiers, durant le 1er trimestre 2011, en évolution de 10% par rapport à l’année précédente.
Si l’optimisme l’emporte, il ne faut pas baisser la garde : la Banque Centrale de Tunisie veille sur le radar.
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bq de courage à MR NABLI qui fait face à des defis internes herités de l'ex gouverneur qui a fait tous les torts à la Banque et à l'économie entière n'ayant de souci que de servir le clan lexcellant dans tous les montages financiers qui servait ses maitres