News - 17.03.2011

Le monde du football dans tous ses états

Compétitions suspendues depuis le 13 janvier, joueurs en grève, clubs en faillite : le football tunisien traverse la crise la plus grave de son histoire. Le feu couvait sous la cendre depuis des décennies, mais il a fallu attendre la révolution pour que tous les maux de notre sport-roi apparaissent au grand jour. Pourtant, le professionnalisme a été introduit en 1998 (il y a 13 ans déjà !) après une période de transition de plusieurs années qui devait  permettre aux  clubs de se doter de structures solides  et aux joueurs d’acquérir une mentalité professionnelle. Mais avec le recul, on s’est aperçu que ni les clubs, ni les joueurs, ni même les infrastructures n’étaient prêts pour  cette aventure.  Bien au contraire, le football tunisien a continué de régresser tant au niveau des clubs qu’à celui de l’équipe nationale, malgré la Coupe d’Afrique de 2004, remportée, il faut bien le préciser, à Tunis.

Parallèlement, les difficultés financières des clubs s’aggravaient (ce qui ne les empêchait pas de vivre au dessus de leurs moyens, distribuant à leurs joueurs et entraîneurs des salaires royaux et en tout cas bien au dessus de la moyenne nationale),   la corruption se généralisait, les stades devenaient des zones de non droit, avec la multiplication des scènes de violence revêtant de plus en plus un caractère politique du fait de l’absence d’espaces de liberté qui auraient pu servir d’exutoire au mécontentement général.  Dans une société qui se délitait, le sport ne pouvait rester à l’abri des soubresauts qui secouaient le pays.

Le problème est de savoir si les clubs, privés des revenus du promosport et de la télé, sont en mesure de reprendre la compétition avec des caisses vides, des joueurs qui n’ont pas touché  leurs salaires depuis deux mois et, par dessus tout, les risques de violence qui pourrait émailler les matchs d’autant plus que le service d’ordre se limitera désormais aux alentours du stade et n’interviendra à l’intérieur qu’en cas de besoin, à charge pour les clubs d’assurer par eux-mêmes, la sécurité à l’intérieur des stades, comme partout dans le monde. Généralement, cette tâche  est confiée à des « stadiers », recrutés parmi les supporters. Une pratique inconnue chez nous où on préfère s’en remettre toujours à l’Etat.  C’est pourquoi, les présidents des clubs, après avoir donné leur accord à la reprise du championnat, ce weekend, se sont rétractés et, finalement, obtenu le report sine die des compétitions.

Néanmoins, l’Etoile du Sahel tentera l’expérience ce dimanche pour son match dans le cadre de la CAF, en faisant encadrer ses supporters par 400 stadiers. Si cette tentative se révèle opérante, elle permettra au moins de dissiper les appréhensions, au demeurant légitimes, des dirigeants du football tunisien et favoriser la reprise du championnat, dans les plus brefs délais, peut-être même, la semaine prochaine. Une mesure dont la portée dépasserait  largement  le cadre sportif  dans la mesure où elle signifierait le retour à la normale dans le pays, s’agissant d’une discipline qui occupe une place de choix dans le mode de vie des Tunisiens et dont les effets d’entraînement sur les autres secteurs sont évidents. Bien évidemment, les maux dont souffre notre football ne disparaîtront pas de sitôt. Mais, son aggiornamento ne sera pas pour cette année, compte tenu des défis  auxquels le pays aura à faire face dans les mois à venir et de la nécessité d’engager  des réformes structurelles, seules susceptibles de sauver notre football.   

HB
 
     

 

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