News - 03.06.2022

Farouk Bouasker: Le juge, le maire et l’expert en élections

Farouk Bouasker: Le juge, le maire et l’expert en élections

Il avait manqué de peu de devenir diplomate de carrière. Une semaine de décalage a fait endosser à Farouk Bouasker la robe de magistrat et le voilà président de l’Isie. Titulaire d’une maîtrise en sciences juridiques (2002) et d’un mastère en droit des affaires (2003), obtenus à la faculté des Sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis, il avait postulé à deux grands concours très prisés. Le premier, celui ouvert pour le recrutement de secrétaires des Affaires étrangères, avec deux années d’études à l’Institut diplomatique, et le second, celui de l’Institut supérieur de la magistrature (ISM). Malgré une rude concurrence pour un nombre de places réduit, il sera admis aux deux concours. Sauf que… L’ISM sera le premier à lui notifier son admission. Alors qu’il venait juste d’accomplir les formalités d’inscription, un télégramme du ministère des Affaires étrangères lui annonçait de son côté la bonne nouvelle… Trop tard. La voie est prise.

Passionné de chasse, de sport et de lecture, marié, père de trois enfants, et très attaché à sa famille, il marquera rapidement ses repères professionnels et personnels, cultivant abnégation et discrétion.

Issu de la véritable «école de la République»

Farouk Bouasker est né le 20 septembre 1979 à Zaouiet Sousse, à quelques encablures de Sousse, non loin de Msaken, formant le triangle Zaouiet Sousse, Ksibat Sousse et Ethrayet. De père en fils, ses aïeuls sont agriculteurs, cultivant leurs champs et élevant leur bétail, notamment les fameux ovins et les vaches laitières . L'attachement à la terre d n’empêchera pas le père de Farouk d’encourager ses enfants —quatre garçons— à réussir leurs études et les pousser le plus loin possible. Ils seront médecin, ingénieur, professeur de mathématiques et magistrat… A six ans à peine, Farouk perdra sa mère. L’affection de son père et des autres membres de la famille redoublera, mais il apprendra à être exemplaire et toujours compter sur lui-même et les siens les plus proches.

Il commencera par fréquenter l’école primaire de La République, à Zaouiet Sousse. Puis, puis au collège avant d’intégrer le lycée de la Cité Ezzouhour à Sousse. Bachelier en lettres en 1998, il préfèrera la faculté des Sciences juridiques à Tunis, où il décrochera une maîtrise (2002). Il réussira son mastère à la faculté de Droit de Sousse (2003). Sur les bancs des amphithéâtres et dans les salles de travaux dirigés, il avait apprécié l’enseignement d’éminents professeurs dont Kaïs Saïed…

Face au Chaambi

Farouk Bouasker garde un souvenir impérissable de sa première affection en 2005 au tribunal de première instance de Sousse, une fois diplômé de l’ISM. Tour à tour, il sera à la chambre pénale, la chambre fiscale, la chambre civile et juge de l’enfance par intérim…

Trois ans après, le mouvement du corps de la magistrature le mutera en 2008 au tribunal de première instance de Sousse 2. Il sera alors juge de la chambre civile, la chambre civile d’appel, juge chargé de l’état civil, juge chargé de la tutelle, juge chargé de la distribution des deniers, juge des référés par intérim, juge des ordonnances sur requêtes par intérim, juge d’instruction par intérim, président du tribunal cantonal d’Enfidha par intérim…

Farouk Bouasker sera nommé en 2012 juge cantonal près le tribunal cantonal de Sousse 1, en tant que président de la chambre correctionnelle, président de la chambre civile, président du tribunal cantonal de Sousse par intérim, président du tribunal cantonal de Msaken par intérim…

Gagnant la confiance de sa hiérarchie, il traitera de grands dossiers. Accédant au deuxième grade, Farouk Bouasker sera, comme tous ses pairs, concerné par un mouvement le nommant dans d’autres régions. C’est ainsi qu’il sera désigné en 2016 conseiller à la chambre criminelle près le tribunal de première instance de Kasserine, puis nommé en 2018 juge d’exécution des peines près le tribunal de première instance de Kasserine.

De son bureau, il pouvait regarder à loisir mais non sans appréhension le mont Chaambi, alors en dépit de sa verdure et de son air vivifiant, en pleine effervescence terroriste.

En son âme et conscience

Tout au long de ce parcours judiciaire, Farouk Bouasker a fait montre de rigueur, d’indépendance, gagnant le respect de tous. Il lui est arrivé plusieurs fois de repasser en tête des décisions qu’il avait prises ou des jugements qu’il a prononcés, mais sans jamais les regretter et en perdre le sommeil. En son âme et conscience, il a toujours tranché. Très jeune juge encore débutant, chargé des enfants, il réfléchira longuement, mais n’hésitera pas à placer dans un centre de rééducation une jeune fille délinquante arrêtée en flagrant délit de racolage dont les parents sont divorcés et démissionnaires. A contrecœur, certes, mais il devait s’y obliger. Tout comme lorsque, plusieurs années plus tard, il fallait condamner un assassin, à la culpabilité dûment prouvée, à la peine de mort. Il savait bien que la sentence ne serait pas exécutée, mais la peine capitale était de rigueur…

S’il se plaisait beaucoup dans sa carrière de magistrat, Farouk Bouasker commençait à apprécier l’action volontaire et bénévole au sein de la société civile. Le déclenchement de la révolution en 2011 et l’annonce de l’élection d’une assemblée nationale constituante ne pouvaient le laisser de marbre. Comme pourrait-il s’y investir sans se départir de son statut de magistrat et de son indépendance politique totale ? Comment surtout se rendre utile ?

Monsieur le Maire

Une première occasion lui sera donnée avec la dissolution, au printemps 2011, des conseils municipaux et la désignation de délégations spéciales pour diriger les communes. La famille Bouasker, profondément ancrée depuis des générations à Zaouiet Sousse, bénéficie d’une bonne réputation auprès de la population. Jeune magistrat, droit, indépendant et intègre, Farouk incarnait un bon profil pour présider aux destinées de la ville. Pouvait-il se dérober? Il acceptera la mission, en ces temps de tumultueuses tempêtes, pour une durée initialement provisoire qui finira par s’étendre sur cinq ans, jusqu’en 2018.

«La municipalité est une véritable grande école de la vie au quotidien, dira-t-il. J’y ai beaucoup appris au contact des habitants, des équipes et de l’administration. J’en garde le meilleur souvenir.»

L’Isie, à partir du terrain

Dans la foulée, Farouk Bouasker sera sollicité pour faire partie de la section de Sousse de l’Isie, justement en tant que magistrat indépendant. La mission lui convient parfaitement, coïncidant encore plus avec les vacances judiciaires…

Farouk Bouasker avait alors 31 ans, et l’ambition démocratique chevillée au corps. Il rejoindra l’Irie et commencera alors à apprendre le métier au bas de l’échelle. Chargé de suivre les inscriptions au registre électoral, il partira sur le terrain accompagner les agents, tout en supervisant leur recrutement et en s’occupant de leur formation. De Sidi Abdelhamid à Bouficha, les deux extrémités du gouvernorat de Sousse, il sera constamment dans les quartiers, sillonnant les rues et les ruelles, expliquant la portée des élections et incitant la population à s’inscrire pour voter.

Cette première expérience sera exaltante. A l’approche des élections législatives et présidentielles de 2014, l’Isie fera appel à lui de nouveau, cette fois en qualité de formateur principal en matière électorale. A la lumière du scrutin de 2011 et des nouvelles exigences, il fallait dispenser une formation de haut niveau à toute la chaîne des intervenants dans le processus électoral, élaborer des guides pratiques, former les formateurs et se conformer aux normes internationales. Farouk Bouasker était bien indiqué pour s’en acquitter avec une équipe aussi compétente que dévouée.

En 2017, l’Isie devait préparer les élections municipales et désigner un président à la tête de sa section de Sousse. Le choix n’était pas difficile à faire : Farouk Bouasker recueillera l’unanimité. Mission réussie.

D’une seule voix obtenue à la majorité absolue

Une nouvelle opportunité s’est présentée en 2017 : celle de faire partie du Conseil de l’Isie. L’Assemblée des représentants du peuple devait procéder au renouvellement du tiers des postes et élire à 145 voix notamment deux magistrats (judiciaire et administratif) ainsi qu’un universitaire. Sans trop s’y attacher, Farouk Bouasker était cependant fortement encouragé par des collègues et amis et y postule. Bien que sachant qu’il n’avait pas beaucoup de chance, n’étant pas connecté avec les partis et les groupes de pression, il finira tout de même par déposer sa candidature, sans se faire beaucoup d’illusion sur son aboutissement. Les conciliabules sont intenses au Bardo pour sceller les fameux tawafouks. En lice avec sept autres magistrats, Farouk Bouasker ne recueillera au premier tour qu’une seule voix. Grande déception, ou plutôt désillusion confirmée.

Le quorum n’ayant pas été réuni en faveur d’un candidat, les conciliabules reprennent. Les grands groupes parlementaires sont à la négociation. Ne parvenant pas à se mettre d’accord sur l’un de leurs candidats potentiels, ils se décident à favoriser un outsider parmi les compétents et les indépendants. Pourquoi alors ne pas prendre celui qui a obtenu le minimum de voix? N’est-ce pas l’indice de sa non-appartenance à aucun parti ? L’accord est scellé : Bouasker sera ainsi élu, le 1er août 2017, haut la main avec 147 voix. Une semaine après, il prêtait serment devant le président de la République, Béji Caïd Essebsi.

Avant dernier round, en février 2019. Le poste de premier vice-président de l’Isie était vacant. Il s’y présentera. Avec succès. La dernière marche du podium de la présidence, il la montera en mai 2022.

Lire aussi

Farouk Bouasker (ISIE): De très grands défis à relever

Vous aimez cet article ? partagez-le avec vos amis ! Abonnez-vous
commenter cet article
1 Commentaire
Les Commentaires
DJERIDI - 01-08-2022 09:04

D'après le rédacteur c'est un profil de futur président de la République. CESSEZ DE PRENDRE LES ENFANTS DU BON DIEU POUR DES CANARDS SAUVAGES.

X

Fly-out sidebar

This is an optional, fully widgetized sidebar. Show your latest posts, comments, etc. As is the rest of the menu, the sidebar too is fully color customizable.