Ce qu’il faut retenir du discours de Habib Jemli devant l’ARP: les engagements fermes et les mesures concrètes (Album Photos et Vidéo)
S’il commence par saluer la mémoire des pères fondateurs, Thaalbi, Hached et Bourguiba, et s’incliner devant le sacrifice des martyrs, mutilés et blessés du mouvement national, puis de la révolution, Habib Jemli s’empressera par attaquer les questions politiques. S’adressant aux députés ce vendredi matin 10 janvier en quête de leur investiture pour son gouvernement, il doit brasser large dans la thématique à traiter, apporter de véritables solutions convaincantes et oser des réponses sans langue de bois, ce qui n’est guère facile.
Une indépendance difficile à être reconnue
«Vous en aurez la preuve, promet Habib Jemli. Je suis un chef de gouvernement indépendant de tous les partis. Mon gouvernement ne dépend ni de partis, ni d’organisation, ni de régions, ni de groupes de pression ou autres. Cette indépendance ne signifie pas rupture avec tous. Nous sommes ouverts sur tous, déterminés à collaborer avec tous». Bien qu’il s’époumone à le répéter, Jemli doit savoir d’avance qu’il lui sera difficile d’en persuader les députés et les Tunisiens. Il embrayera immédiatement, sur la compétence des membres de son équipe et leur détermination à réussir. «J’instaure, annoncera-t-il, une charte d’honneur qui sera signée par chacun des ministres et secrétaires d’Etat, mais aussi les hauts cadres de la nation, adossée à un contrat de performance selon des objectifs précis, mesurables et soumis à évaluation continue.»
Des mesures d’urgence
La sécurité prend une place particulière dans le programme de Jemli. Il annonce la création de brigades spéciales nationales au sein du ministère de l’Intérieur, pour la traque de la contrebande, la criminalité cybernétique, la sécurisation des enceintes scolaires et universitaires extérieures contre les dealers de drogues et le harcèlement sexuel, la lutte contre les braquages avec dispositif d’alerte et moyens d’intervention d’urgence. Aussi, les systèmes de télésurveillance seront généralisés et la lutte contre la violence, le crime et le banditisme renforcée avec des effectifs additionnels.
Le volet économique du discours de Jemli reprend une série d’actions déjà amorcées par ses prédécesseurs. Il s’y inscrit en affirmant l’accélération très rapide de leur mise en œuvre, en y introduisant des ajustements appropriés. La mesure la plus importante, même s’il l’annonce de manière globale, c’est de soumettre à l’adoption de l’ARP, d’un « mécanisme » permettant au chef du gouvernement l’octroi d’autorisations d’investissement, et de toute la liasse des procédures y afférentes, dans des délais très brefs. Ce one-stop, longtemps recommandé par la Banque mondiale et vivement revendiqué par les opérateurs économiques tunisiens et étrangers, abrège les formalités et les délais, réunit sous une même seule signature, et met fin au long parcours du combattant qui freine les investissements.
Habib Jemli annoncera également la création de deux agences gouvernementales spécialisées pour la gestion, la première des participations de l’Etat au capital d’entreprises publiques, et la seconde de la dette publique, en les dotant des compétences de haut niveau requises.
Un fond spécial de lutte contre la pauvreté
La précarité et le dénuement constituent des facteurs redoutables de toutes formes de délinquance, violence et criminalité, en plus des mouvements de contestation sociale, affirme Jemli. Il y relève aussi un risque majeur de dislocation sociale et un manquement à l’impératif de solidarité nationale. La première action qu’il se propose d’entreprendre, c’est la création d’un fond national de réduction de la pauvreté, doté d’une mise initiale sur le budget de l’Etat d’un montant de 200 millions de dinars en 2020. Ce fond sera ouvert à la contribution des entreprises, personnes physiques, organisations et autres composantes de la société civile et aux dons étrangers. La gouvernance sera fondée sur la redevabilité et la transparence.
Sur le même registre, Jemli se propose de faire prendre en charge par le budget public les frais de soins de santé arriérés des familles démunies auprès des établissements publics de santé.
Sur le plan international, le chef du gouvernement candidat s’inscrit dans les fondamentaux de la diplomatie tunisienne, sans y prendre le moindre écart. Il ne cache pas la grande inquiétude de la Tunisie face à l’aggravation de l’escalade en Libye, rappelant les liens fraternels indéfectibles entre Tunisiens et Libyens.
«That is the question !»
Plus qu’un simple catalogue d’intentions ou un round-up des grands dossiers, Habib Jemli a voulu donner de lui une image d’homme politique et de chef de gouvernement capable de conduire une équipe qu’il considère harmonieuse. « Je suis moi-même issue d’une famille modeste, fils d’un cultivateur, issue des fins fonds du pays, ponctuera-t-il avant de conclure. J’ai servi dans le secteur public, appréciant ainsi tout le rôle structurant de l’Etat. J’ai également servi dans le secteur public, mesurant alors la précieuse contribution de l’entreprise. Fort de ma sincérité, de ma détermination, et de mon sens du devoir national qui anime également chacun et chacune de mes collègues, que je m’adresse à votre conscience et sollicite votre confiance.»
Le débat commence, s’annonçant long et animé. Près de 100 députés se sont inscrits pour prendre la parole. Commencées peu après 11 heures du matin, les interventions limitées à 3 minutes par député et 6 minutes par président de groupe, prendraient pas moins de 10 heures de séance plénière, hors pauses et prières. Vous pouvez calculer aisément le temps que prendrait l’annonce du verdict du Parlement.
Passera ou ne passera pas? «That is the question!»
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