Dernier adieu à Slim Chaker : Retour sur les moments forts d’une émouvante journée (photos)
Lundi 9 octobre 2017 - 17 heures
La dernière dalle posée sur le tombeau où était inhumé le corps du défunt Slim Chaker, des récitateurs du Coran élèvent les ‘’douas’’ dans la ferveur et le recueillement au milieu d’une foule nombreuse qui a tenu à accompagner leur parent, leur ami, leur collègue, jusqu’à sa dernière demeure. En haut de la colline de Sidi Belhassen Chedly, dans le carré des martyrs là où reposent d’illustres martyrs patriotes, leaders du mouvement national, et du combat pour la transition démocratique (Chokri Belaid, Haj Mohamed Brahmi...).
Il avait fallu déjà plus d’une heure et demie pour que des centaines et des centaines de Tunisiens et de Tunisiennes présentent, tout près du patio central d’entrée, leurs condoléances à la famille. Mais nombreux parmi eux ont tenu cependant à arpenter les allées du Jellaz pour aller dire un tout dernier adieu à Slim Chaker.
La journée était très éprouvante pour la famille du défunt, très émouvante pour tous. La veille, dimanche, dès l’annonce de la tragique nouvelle, le président Béji Caïd Essebsi avait dépêché en début d’après-midi, son directeur du cabinet, Selim Azzabi et des membres de son cabinet, au domicile de Slim Chaker pour présenter ses condoléances et apporter réconfort à la famille. Tout commençait à se mettre en place : la logistique, les formalités et tant de questions à résoudre. Décision est annoncée de réserver au défunt des funérailles nationales. L’armée nationale en assurera les honneurs.
Tard dans la soirée, deux des trois enfants de Slim Chaker qui poussaient leurs études supérieures à l’étranger, ont pu regagner Tunis, fortement ébranlés par le choc. Il avait fallu l’intervention personnelle du chef du gouvernement Youssef Chahed pour leur trouver des places d’avion dans le premier vol vers Tunis. Minuit passé, la maison familiale ne désemplissait pas. Affligés par la nouvelle, des parents et amis, des dirigeants et militants de toutes les familles politiques affluaient sans relâche, certains venus de régions lointaines de l’intérieur du pays. Mohamed Ennaceur, président de l’ARP, Noureddine Hached, Noureddine Tabboubi, Ouided Bouchamaoui, Yassine Brahim et Habib Essid étaient parmi les premiers à accourir. Suivis de ministres, députés, chefs de partis, ambassadeurs, figures de la société civile, capitaines d’industrie, médecins, avocats, et autres professions libérales : de larges franges d’amis et de proches n’ont cessé de défiler. La Kasbah a dépêché en précurseurs, Fayçal Hefiane et Mofdi Mseddi, ainsi que Mehdi Ben Gharbia et Iyad Dahmani. La nuit sera courte. Il fallait se préparer pour la grande journée du lendemain.
Lundi 9 octobre 2017 - 8 heures du matin
Le directeur du Protocole de la Présidence du gouvernement et des officiers supérieurs de l’Armée ainsi que de la Police étaient les premiers à arriver au domicile de Slim Chaker. Ils devaient régler avec la famille les détails de la cérémonie, les horaires, l’itinéraire du cortège...
Parents et amis commencent à affluer.
11 heures du matin
Des éléments de l’escorte présidentielle se mettent en place. Signe de la venue du président de la République. Confirmation, avec l’arrivée peu avant midi du directeur général du Protocole, Mondher Mami et de son équipe. Des récitateurs du Coran psalmodient des versets du Livre Saint.
12 heures 30
Visiblement affecté, essayant de contenir son émotion, le président Caïd Essebsi descend de la voiture, accueilli par des membres de la famille du défunt. Conduit au salon, il donne de chaleureuses accolades compatissantes à son vieil ami, Si Mhammed Chaker, le père de Slim, à sa maman, à son épouse et à chacun de ses enfants. Ami de longue date, il connait bien chacun d’entre eux. Pendant plus d’une demi-heure, il s’emploiera à les réconforter dans leur peine, ne tarissant pas d’éloges sur Slim qui a été pour lui « comme un fils ». Conduit par Slim Azzabi, le cabinet présidentiel était présent au complet et restera sur place après le départ du Président.
13H00
Le président intérimaire de la République, en 2011, Foued Mebazaa arrive les larmes aux yeux. Maya Jeribi a tenu, elle aussi à venir. Hafedh Caïd Essebsi, Mohsen Marzouk et d’autres chefs de partis présentent leurs condoléances. La maison s’avère incapable d’accueillir tous les visiteurs.
13H30
Des éléments du régiment d’honneur de l’armée tunisienne arrivent à bord d’un véhicule Hammer. Ils sont huit caporaux en tenue d’apparat, encadrés par des officiers et des officiers supérieurs.
14H00
Un moment de forte émotion. Personne n’arrive à retenir ses larmes. Le corps de Slim Chaker est placé dans le cercueil qui sera recouvert du drapeau national. Sur un coussin qui sera placé sur le cercueil a été épinglée la dernière décoration décernée au défunt. Il s’agit des insignes de l’Ordre de la République que lui avait remis le président Mebazaa, en décembre 2011, en reconnaissance à ses fonctions de ministre de la Jeunesse et des Sports, dans le gouvernement Béji Caïd Essebsi.
Les éléments du Régiment d’honneur lèvent le cercueil pour le porter jusqu’à la voiture Hammer, puis prennent place à bord, de part et d’autre.
14H30
Le cortège s’ébranle vers le cimetière El Jallaz, escorté par la police. Tout au long du parcours, des agents de la circulation facilitent le passage.
15H00
Le patio d’El Jallaz est archi-comble. Des centaines et centaines de personnes sont déjà là. Le gouvernement au grand complet (sauf Khemaies Jhinaoui en visite à Londres), Mohamed Ennaceur, Habib Essid, des ambassadeurs étrangers, Rached Ghannouchi (et un grand nombre de dirigeants d'Ennahdha), Hamma Hammami et Radhia Nassraoui, Ahmed Néjib Chebbi, Issam Chebbi, Mohamed Jegham, Ahmed Seddik et quasiment toute la classe politique et syndicale, sur plusieurs générations et de nombreux chefs d’entreprise. Le gouverneur de Sfax ainsi que le Maire de la ville et une forte délégation d'importantes figures régionales ont fait le déplacement.
15H15
La voiture Hammer fait son entrée. Le cercueil est déposé à même le sol. Une haie d’honneur rend le salut. Les prières commencent.
Derrière un pupitre installé pour la circonstance, le chef du gouvernement prononce l’oraison funèbre. Youssef Chahed est dans la douleur. Jamais il n’avait prévu pareil moment. Ses mots sont justes, sincères. A son compagnon de route à Nidaa, puis au gouvernement, « tombé en martyr de la nation », il prend « l’engagement de poursuivre le combat pour les mêmes idéaux partagés ».
15H45
Installée sous une tente aménagée par cette journée fortement ensoleillée, la famille restreinte reçoit les condoléances. Stoïquement, Mohamed Ali, le garçon unique du défunt prend place à côté de son grand-père Si Mhammed Chaker. Lui aussi, alors qu’il poursuivait ses études en France, avait appris la mort de son père. Le 13 septembre 1953, Si Mhammed qui préparait son bac à Etampes subissait de plein fouet l’assassinat de son père, le leader Hédi Chaker, à Nabeul...
Du rarement vu à El Jallaz : il aura fallu pas moins d’une heure et demie pour que les derniers présentent leurs condoléances. Le régiment d'honneur fait sonner les clairons. Le drapeau national flotte sous un vent léger.
L’hommage est unanime. La Tunisie pleure son enfant fauché en plein engagement au service de la nation, par une mort soudaine. Une fois de plus, la famille Chaker inscrit le nom de l’un des illustres fils dans le marbre du patriotisme. Allah Yerhamou.
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Un homme simple et grand patriote qui travailler pour la Tunisie est parti Allah Yerhamou