Par Slaheddine Dchicha - Les comportements des dictateurs n’obéissant pas à la raison commune, ils peuvent sembler irrationnels alors qu’ils relèvent en fait d’une autre rationalité, la leur propre. Sinon comment comprendre l’acte ignoble attribué à Bachar Al-Assad, à moins qu’on ne prête qu’aux r…
Le Dictateur
Chassons tout de suite cette furtive tentation « complotiste » et condamnons fermement, d’où qu’il vienne et quel qu’en soit le coupable cet acte odieux et horrible consistant à gazer pêle-mêle bébés, enfants, adultes et vieillards, hommes et femmes, êtres humains, animaux, tout être vivant…la précieuse vie saccagée, détruite, anéantie !
Mais l’horreur, le dégoût et la nausée ne doivent pas empêcher l’examen calme et serein de quelques faits :
Voilà un tyran qui, fort de ses soutiens iraniens et surtout grâce au solide appui russe, ne cesse de fortifier sa position sur le terrain et de modifier en sa faveur les rapports de forces, se rendant ainsi, aux yeux de presque tous, indispensable et incontournable pour toute solution à la tragédie syrienne…,
L’émotion et l’indignation ne doivent pas interdire la réflexion :
Cet homme réputé froid, pervers et calculateur, a décidé le mardi 4 avril en un geste impulsif et irréfléchi, l'attaque aux armes chimiques de la localité de Khan Cheikhoun faisant au moins 87 (dont 27 enfants) et plus de 500 blessés.
Bachar Al-Assad est capable d’un tel forfait à en juger par le passé récent de ses méfaits, mais pourquoi fait-il cela alors qu’il sait très bien qu’il est dans l’oeil du cyclone occidental et que le moindre de ses faits et gestes et la nature de chaque arme qu’il utilise sont scrutés à la loupe par toutes les ONG et par tous les services de renseignement intéressés par le conflit syrien et présents sur le terrain des opérations ?
Le Dictateur syrien est capable de cette abomination, il est capable par excès de confiance et par un sentiment d’impunité de vouloir exercer sa cruauté et assouvir ses instincts sadiques. Mais qu’va-t-il à y gagner? Rien sinon s’affaiblir, semer le trouble parmi ses soutiens, faire l’unanimité contre lui et fournir à ses ennemis les prétextes ou les occasions dont ils ont besoin pour agir contre lui et son régime.
L’Elu
Et le fraichement élu, Donald Trump n’a pas manqué de sauter sur l’occasion pour lancer en représailles une action punitive contre la base aérienne d'Al-Chaaryate d'où seraient partis les appareils qui ont bombardé Khan Cheikhoun. 59 missiles Tomahawks ont atteint la dite base et tué six soldats syriens.
Le comportement de Trump, pourtant dirigeant démocratiquement élu surprend tout autant que celui du dictateur syrien. Le président américain a pris de court son monde par la rapidité de sa réaction et surtout par sa justification. Le motif de cette action précipitée, le bombardement d’un pays souverain, serait l’émotion forte qu’aurait éprouvée l’ancien homme d’affaires devant l’horreur de cette attaque qui a tué des « gens innocents, des femmes, des petits enfants et même de beaux petits bébés ».
Ainsi donc, l’émotion, cette expérience subjective et singulière de l’individu est érigée en critère d’action en faisant fi d’une part de la réflexion et donc de la raison et d’autre part de l’avis de la Communauté internationale ou de ce qui en tient lieu, l’ONU.
Aujourd’hui, « son émotion » lui donne l’occasion de montrer ses muscles, de se démarquer de son prédécesseur et de faire le matamore littéralement, c’est-à-dire « tueur de maures ».
Mais demain, cet homme imprévisible, impulsif et désinhibé, comme il l’a largement prouvé lors de sa campagne électorale, peut, sous l’emprise d’une « émotion plus forte », s’ériger en gendarme international et afin de faire « USA Great again », il pourrait décider seul de transformer le monde entier en un western et de le précipiter ainsi dans un conflit généralisé.
Slaheddine Dchicha