Le droit à la transparence et l’urgence de sortir le pays de l’ornière
Le Président de la République, soucieux de préserver ce qui peut l’être encore, nous a fait part de son initiative de former un Gouvernement d’Union Nationale, mais sans consulter le Chef du Gouvernement qui était pourtant prêt, selon ses dires, à l’aider.
Une simple hiérarchisation de chapitres d’actions générales a été signé solennellement à Carthage et le Président de la République nous a déclaré que sa tâche était terminée et qu’il appartient aux parties à cet accord de proposer un chef de Gouvernement.
C’est là un pas positif, mais la difficulté résidera, à notre avis, dans les détails d’application de ce cadre général tout en signalant qu’il ne peut y avoir réellement de priorités car tout doit être mené en même temps.
Le chef du gouvernement en place s’est résolu à ne pas présenter sa démission au chef de l’Etat, mais, à solliciter le vote de confiance de l’ARP tout en sachant pertinemment qu’il ne l’obtiendra pas vu que les partis qui détiennent la majorité, et particulièrement Nidaa, ont signé son arrêt de mort politique.
Monsieur Essid n’a pas obtenu, comme prévu, la confiance de l’ARP. Seulement trois députés ont voté pour lui et parmi les abstentions on comptait, aussi bien, quelques députés d’Ennahdha que de Nidaa.
Le citoyen a remarqué que tous les députés ont loué sa droiture, son honnêteté, son sens de l’Etat et son dévouement à la chose publique. Mais tous, et à des degrés divers, ont fait état aussi bien de ses réalisations que de ses échecs. Nous avons remarqué la virulence des critiques émanant des députés de Nidaa Tounes mis à part le député Fadhel ben Omrane.
Ce qui étonne plus d’un, c’est que si la volonté réelle était de faire repartir l’économie, on aurait pu garder le Lion et l’inviter à redresser la barre et à restructurer son équipe.
Fort du vote de l’ARP, le Président a réuni les parties à l’accord de Carthage qui s’attendaient, à tort ou à raison, à discuter le profil à choisir et voilà que, certains d’entre eux, sont surpris de voir BCE les informer qu’il se propose de nommer le jeune Youssef Chahed vu qu’aucune proposition ne lui a été faite.
Désaccords et nouvelle réunion où l'opposition devait présenter un profil qui recueille l'accord de toutes les parties. Face à l’absence de cet accord, BCE a maintenu sa position initiale et a usé de son droit constitutionnel, de nommer Monsieur Chahed avec l’accord des «grands» partis (Ennahdha, Nidaa, UPR).
On était bien loin de la philosophie de l’initiative et l’idée même d’un gouvernement d’union nationale a été bien malmenée. Trois petits partis se sont déjà retirés.
Avez-vous compris ce qui s’était vraiment passé et pourquoi? BCE n’a pas cru bon de s’adresser au pays.
D’où un appel à plus de transparence car ce peuple le mérite.
Se basant sur ce qui aurait été dit lors du déjeuner pris par des journalistes à Carthage, certains disent que BCE donne l’impression qu’il se sent à l’étroit dans ses attributions et rêve des pouvoirs qu’aurait un Président dans un régime présidentiel. Par conséquent, si Essid n’aurait pas accepté qu’on piétine sur ses plates bandes, il était devenu persona non grata. Essid a, d’ailleurs, avoué en public qu’à force de dialogue, il finissait par s’entendre avec le Président en dépit des différends qui se sont manifestés. Et que c’était de bonne guère.
Si, BCE a voulu «virer» Essid parce qu’il ne s’entendait pas parfaitement avec lui, sur le partage du Pouvoir, pourquoi cette initiative qui a bien été vidé de son contenu, tout ce remue ménage et toute cette perte de temps ?
Savez-vous que ce peuple mérite la transparence car l'absence de transparence entame la confiance du citoyen et sans confiance, on ne peut rien bâtir de solide et de durable.
Les jours prochains nous montreront si le futur locataire de La Kasbah a accepté les conditions de BCE, c'est-à-dire que nonobstant les textes constitutionnels, l’exécutif, en pratique, ne sera plus bicéphale.
Plus d’un estime que le régime que nous a imposé Ennahdha ne convient pas à notre pays et à la situation que nous vivons. Ennahdha semble souscrire à ce retournement en soutenant BCE dans son initiative et dans la nomination du nouveau chef de gouvernement. Si tel est le cas, pourquoi ne pas aller droit au but et modifier carrément la constitution qui a besoin, par ailleurs, d’un toilettage?
Voilà pour ce qui est de la transparence et de la nécessité de rétablir la confiance.
Venons-en à l’urgence de sortir le pays de l’ornière.
Aujourd’hui, les jeux sont faits et le pays exige de nous tous qu’on oublie cet épisode et qu’on se remette au travail.
Le diagnostic que nous fera le nouveau chef de gouvernement ne fera que conforter ce que nous ont avancé déjà de nombreux experts sur la situation du pays et de ses finances.
Monsieur Chahed a ma sympathie tout comme hier, Monsieur Essid qui est sorti, soit dit en passant, par la grande porte.
Outre que Monsieur Chahed est jeune et donc plein d’énergie, qu’il a un sérieux bagage et une expérience, bien que l’économie en soit absente, il semble, au vu de sa déclaration, avoir la volonté de tirer le pays de la situation dans laquelle il se trouve. Encore faut-il qu’il garde le cap et que ceux qui l’ont propulsé à ce poste lui prêtent main forte.
Il est majeur et vacciné mais, on pourrait quand même lui faire, sans aucune prétention, quelques suggestions, qu’il pourrait jeter à la corbeille.
- Bâtir sur ce qui a été fait de bien et ne pas repartir de zéro
- Eviter que les erreurs du passé ne se renouvellent dans le choix et la structure de l’équipe. Il devrait avoir l’entière liberté de son choix et se mettre être à l’abri des pressions de son parti et de ceux qui voteront pour lui, demain à l’ARP. Si ces pressions deviennent intolérables, il devrait avoir le courage de démissionner.
- Qu’il se garde de diriger à partir de son bureau en fourrant le nez dans le détail des dossiers qui devraient être des attributions du Ministre concerné et d’un super ministre ou d’une cellule d’études pour la vérification, le contrôle et le suivi des actions du gouvernement. Sa mission est de fixer les grandes orientations, de trancher les éventuels conflits (budget par exemple), de rectifier le tir, d’être sur le terrain, d’être disponible pour plaider certains dossiers auprès de nos partenaires…
- Certains dossiers brûlants n’attendent plus, à savoir celui du bassin minier, Petrofac, et la pénurie d’eau en plein été et en pleine saison touristique. Il devrait étudier ces dossiers puis se déplacer sur le terrain pour annoncer des mesures concrètes. A cet égard, une partie des revenus des exportations de phosphates serait consacrée, à mon humble avis, au développement de la région. Entre ne rien exporter et reprendre nos exportations, reconquérir nos marchés et consacrer une partie des ressources à la région, nous aurons tout à gagner. Le renforcement de nos réserves en devises, le temps et la Paix sociale.
- Se rapprocher de l’opposition et engager avec elle un dialogue direct et franc ce qui pourrait lever certaines appréhensions, ambiguïtés, notamment sur nos rapports avec le FMI , la BIRD et les bailleurs de fonds. L’idée qu’on se fait, à tort, de ces organismes est fausse. C’est nous qui les avons appelés à la rescousse et qui leur avons proposé certaines mesures nécessaires à prendre et que tout gouvernement, quelle que soit sa coloration politique, devra prendre. Pareille attitude négative se rencontre aussi chez certains dirigeants de l’UGTT qu’il faudrait convaincre également.
- Convaincre certains dirigeants de l’UGTT que, sous d’autres cieux, l’action syndicale peut aller jusqu’à freiner et même à diminuer les salaires et à exiger de leurs adhérents davantage de productivité car leur survie est liée à celle de l’entreprise qui les emploie.
- Demander à ceux qui détiennent le capital, qu’il est temps qu’ils fassent preuve de plus d’esprit entrepreneurial pour faire démarrer la croissance sans attendre des incitations qui tardent à venir.
- Accélérer la promulgation du code des Investissements après l’avoir revu. Je n’ai pas accepté, par exemple, que parmi les encouragements aux investissements figure l’exonération du règlement des cotisations à la CNSS, alors que les caisses de sécurité sociale vivent un gouffre financier.
- Le pays foisonne de compétences inexploitées. Apprenons à en tirer parti, par exemple, en ressuscitant le conseil économique et social qui donnera ses avis aussi bien au Gouvernement qu’à l’ARP. Pourquoi ne pas créer aussi, une structure qui réunit ceux qui ont déjà une expérience du Pouvoir ou une expérience professionnelle avérée (Ministres, Gouverneurs, Universitaires, chefs d’entreprises..)?
- Réformer la justice en adaptant les textes et les structures et en protégeant le juge pour qu’il décide à l’abri de toute pression. Un pays où règne la justice, outre qu’il y fait bon vivre, attire l’investisseur.
- Se préparer à l’arrivée des milliers de terroristes avec le retour de la Paix en Syrie, en Irak et en Libye.
La France, pays des droits de l’homme, abrite les immigrants, à Calais, dans des containers aménagés où il y fait bon vivre, sans être bien sur, dans des hôtels à quatre étoiles, mais de loin préférable à la vie dans les grottes et sans eau. Ce seront des camps de rééducation jusqu’à l’âge de 40 ans par exemple. On pourrait ensuite, libérer, certains d'entre eux, avec un bracelet électronique.
Prochainement, monsieur Chahed formera son gouvernement.
Qu’il s’en tienne, pour sa composition, à ce qu’il a déclaré.
Qu’il nous présente à l’ARP son programme en précisant le cadre, en fixant des objectifs chiffrés et en nous donnant une idée sur les moyens. Il peut le faire, dés maintenant, car on accepte difficilement que quelqu’un, d'aussi intelligent, puisse accepter cette lourde charge sans savoir ce dont il hérite et où il peut nous mener.
A lui de faire adhérer les jeunes, la sphère politique, y compris l’opposition, le capital et le travail, la société civile avec ses intellectuels et ses médias et de prendre le bon cap. Ce qui nous intéresse le plus ce ne sont pas les acrobaties politiques des uns et des autres mais la mise sur orbite de notre économie.
Nous ne pouvons que lui souhaiter bonne chance.
Bon vent comme disent les marins.
Mokhtar el khlifi
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