Matthieu Croissandeau dans L'OBS: Qu'attend-on pour aider la Tunisie ?
Nous reproduisons ci-après l'édito de Matthieu Croissandeau, directeur de L'Obs, paru dans la dernière livraison de l'hebdomadaire.
C’est un appel à l’aide, une demande simple et directe, comme on est en droit d’exiger de la part d’un ami. A 800 kilomètres de nos côtes, de l’autre côté de la Méditerranée, la Tunisie a besoin de nous.
Quatre ans après avoir chassé son despote et accompli sa révolution, elle s’est engagée, non sans mal, sur le chemin de la démocratie. Et fait aujourd’hui figure d’exemple dans cette région du globe où le formidable souffle de liberté de 2011 a trop souvent sombré dans le chaos et la répression. Le pays s’est doté d’une Constitution – saluée comme la plus progressiste du monde arabe –, il a organisé avec succès des élections législatives, puis présidentielles, installé un gouvernement pluraliste au pouvoir.
Mais les défis qui l’attendent sont immenses et le plus dur commence. Car le peuple tunisien attend toujours du travail et de meilleures conditions de vie. La sécurité, surtout, reste un enjeu majeur pour faire repartir le pays. Lundi dernier, quatre gendarmes ont trouvé la mort dans deux affrontements avec des djihadistes. Preuve, s’il en fallait encore une après la tragédie du Bardo, que la Tunisie est loin d’en avoir fini avec le terrorisme. De l’autre côté de la frontière, à l’est, la Libye se décompose, menaçant chaque jour un peu plus le fragile équilibre de savoisine.
L'heure du passage à l'acte
La démocratie ça ne se décrète pas, ça se pratique, a coutume de dire son président Béji Caïd Essebsi. Pendant deux jours, des hommes et des femmes, réunis par "l’Obs" cette semaine à Tunis, ont débattu des chantiers qui attendent le pays. En toute amitié, en toute franchise.
Les Européens présents ont dit leur admiration devant le chemin accompli. C’est maintenant que nous avons besoin de vous, ont répondu les Tunisiens polis. De fait, le pays a besoin de tout : de moyens matériels pour circonscrire autant que faire se peut la menace djihadiste, comme de moyens financiers pour relancer l’économie.
Qu’attend-on pour passer à l’acte ? De ce côté-ci de la Méditerranée, les gouvernements multiplient les discours d’encouragement et les belles paroles. Là-bas, on attend tout simplement des gestes concrets, l’arrivée d’investisseurs, comme la visite de nombreux touristes.
La France et l’Europe ne pourront se contenter longtemps de répéter combien la réussite de cette jeune Tunisie démocratique est essentielle à la bonne marche du reste du monde. Il va falloir qu’elles le prouvent, et vite. Il en va de la survie de la démocratie dans la région. Il en va de la survie d’un pays ami!
Matthieu Croissandeau
L'OBS
Photo L'OBS
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