Boujemaa Remili: Formation du Gouvernement, l’unique voie passante
Contrairement à ce qu’on l’on pourrait penser ce n’est pas Nida Tounis qui est dans l’embarras concernant la phase ‘formation du gouvernement’ mais Al Jabha Chaabia. En effet, en décidant de ne pas soutenir tout Gouvernement qui englobe Ennahdha ce parti a barré la route à toute solution de type ‘Gouvernement d’union nationale’, c’est-à-dire celle qui aurait pu fonder l’unique justification d’une participation d’Ennahdha au Gouvernement, et s’est ainsi mis dans l’obligation de soutenir Nida Tounis, si ce parti répond à ce choix. Toute autre considération devenant ainsi très secondaire par rapport à cette option principale concernant la non participation d’Ennahdha. Etant entendu qu’au niveau du programme gouvernemental il n’y aura pas de quoi provoquer un rejet puisqu’il y a presque un consensus national de tous les partis sans exception sur l’essentiel, du moins concernant les mesures d’urgence, et pour ce qui est de tel ou tel ministre qui ‘ne plairait pas’, on ne peut pas tout demander à la fois.
Mais, tout en relevant la position très délicate de la Jabha, il faut lui reconnaitre non seulement l’intérêt de la clarté mais également celui de la clairvoyance. En effet, ‘le parti des deux leaders martyrs’ connait l’origine du capital de sympathie dont il a électoralement bénéficié et sait ainsi qu’il risque une double sanction, la première s’il entre dans un ‘Gouvernement d’union nationale’ et la deuxième s’il ne soutient pas Nida Tounis sur la base de l’unique condition de non participation du parti islamiste.
De là à penser que c’est la position de la Jabha qui commandera le vote de confiance, il s’agit d’un pas à ne pas franchir. En effet, le Comité Exécutif de Nida Tounis vient de voter à l’unanimité une motion qui appelle à ‘la formation d’un Gouvernement sur la base des valeurs de Nida Tounis pour un projet sociétal réformiste et progressiste tel que l’a voulu et l’a clairement exprimé sa base électorale’.
Tout cela est-il interprétable comme étant de l’anti-Ennahdha primaire ? Résolument non. Il s’agit simplement mais fondamentalement de l’apprentissage démocratique sain pour une vaillante et non moins solide deuxième République, où l’on apprend que le respect des électeurs, ceux de Nida comme ceux d’Ennahdha, est trop précieux pour le soustraire à toute forme de marchandage, quelque soit la valeur politique des arguments avancés.
Et qu’en est-il précisément en matière d’argumentaire favorable à l’intégration d’Ennahdha dans le prochain Gouvernement ? Il s’agirait essentiellement de la ‘stabilité’, celle qui proviendrait d’un vote ‘confortable’ en faveur du Gouvernement proposé, laquelle stabilité pouvant être à l’origine d’un plus de ‘confiance’, notamment de la part des partenaires et bailleurs de fonds étrangers. On avance par ailleurs, comme soutien à cette option, l’idée que la non participation d’Ennahdha pourrait être à l’origine de surenchères à caractère social ou régional et donc de perturbations nuisibles au retour de la stabilité, vu notamment le fait que certaines mesures d’assainissement pourraient être douloureuses et politiquement difficiles à faire aboutir sans un soutien suffisamment ‘large’.
C’est un argumentaire qui donne l’apparence de la solidité et la rationalité mais qui ne résiste pas à un examen un tant soit peu plus approfondi. Car il n’y a pas pire que les alliances contre nature en matière de stabilité. Etant entendu que l’obligation d’aller vers des ‘gouvernements de coalition’, comme cela est proposé entre Nida et Ennahdha, forme nettement plus faible que l’‘alliance’, n’est admissible et envisageable que comme solution de dernier recours, après avoir tenté toutes les autres.
Ainsi, considérer comme point de force et de non vulnérabilité le fait de former un Gouvernement non pas sur la base de la volonté du peuple exprimée par le suffrage universel mais contre elle, constitue une drôle de manière d’envisager la stabilité démocratique. Et c’est précisément cette manière alambiquée de jouer avec le vote populaire qui sera considérée par les démocraties occidentales notamment, et leurs opinions publiques qui comptent plus que leurs gouvernements, comme étant du rafistolage (talfiq) déstabilisant.
Quant à l’idée qu’Ennahdha viendrait perturber un processus de réforme juste, en faveur des masses populaires et des régions déshéritées, contre le chômage et la pauvreté, pour la sécurité et la mise hors état de nuire du terrorisme, pour l’assainissement et le bon fonctionnement des institutions de l’Etat, une telle idée donc ne serait qu’un istibleh ridicule, qui consisterait à présenter Ennahdha comme un parti suicidaire alors qu’il peut être tout sauf cela.
Ainsi, peut-on constater qu’en ramenant le tout à ‘un jeu de partis’ et en évacuant la dimension ‘programme’ dans le vote de confiance, on est tombé dans des travers politiciens dont le peuple n’en a cure. Négliger cette dimension constitue la véritable option suicidaire. Mais dans ce cas pour toute la classe politique.
Boujemaa Remili
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Bien dit.
Partant de son programme de campagne électorale et du mandat de ses électeurs, Nidaa Tounes gagne à maintenir le cap et à poursuivre son action pour sauver la Tunisie. Rien ni personne ne doivent le dévier de cette voie, ni les soucis et les difficultés d’Ennahdha, ni les ambitions démesurés des nouveaux arrivants en politique, ni l’agitation et l’inconscience de nostalgiques des temps passés. Place aux militants, place aux patriotes, place aux convictions, et place aux engagements sincères, seuls garants de toute réussite en politique ! ‘’La patrie avant les partis’’, nous dit-on. Laissons donc Ennahdha se débrouiller - seule - avec ses problèmes, abandonnons à leurs illusions et chimères les opportunistes et les carriéristes de tous bords, et empêchons dans le même temps que d’éventuels incompétents ou amateurs nous entraînent dans le sillage de leurs erreurs ou fautes d’appréciation. Nidaa Tounes doit rester Nidaa Tounes, toujours fidèle à ses engagements, et toujours prêt à assumer ses responsabilités, seules conditions pour garder la confiance placée en lui par celles et ceux qui l’ont soutenu. Avec ou sans Jabha, avec ou sans UPL, avec ou sans Afek … Nidaa Tounes doit tendre la main à tous, sans piège, ni faux calculs, ni naïveté, mais sans jamais perdre de vue l’impérieuse nécessité de rester le centre de gravité du pouvoir au cours de cette mandature issue des élections législatives et présidentielles. Ne permettons pas à Ennahdha de s’engouffrer dans la brèche pour se créer une position de pouvoir autour de laquelle finiraient tôt ou tard par s’articuler les autres forces politiques tunisiennes. La réussite ne serait créditée à Nidaa Tounes qu’en partie. Mais Nidaa Tounes serait tenu seul responsable de tout échec.
Analyse bien approfondie que j'approuve on a souffert de l'exclusion au temps d'ENNAHDHA (quand elle repond du negation a l appel de NIDA TOUNIS pour cooperer dans l'interet de la TUNISIE alors on ne doit pas faire la mm erreur (rien que se venger) et ignorer le message des ELECTEURS et l'INTERET du PAYS qui prime le PLUS.Quand a Jibha Echhaabia qui patoge et ne sait mm pas ce qu'elle veut vraiment avec Hamma a la tete d'aillers je pense son sort va rejoindre EL JOUMHOURI c'est bien dommage.
Je suis comme vous pour la stabilité de la Tunisie. Par contre, pour votre demande d'un vote de confiance confortable, je ne suis pas de votre avis. Pour la simple raison que la Tunisie a fait des élections (3 tours) et le peuple (la démocratie) a voté contre la troïka à 55%. Alors, pourquoi cette recherche de confort ridicule à 80%? En plus, vous dites vous même, qu'il y a consensus national de l'ensemble des partis sur les mesures d'urgence. Je vous rassure aussi que je ne suis pas un anti- Ennahda mais, il y a eu élection démocratique pour la première fois en Tunisie que nous devons tout simplement respecter pour notre bonne éducation démocratique .
C'est un article très intéressant, mais pour gouverner et imposer des réformes douloureuses et parfois impopulaires, il faut bénéficier d'une majorité confortable à l'ARP! D'où la nécessité d'associer le mouvement ENNAHDHA au gouvernement Essid, sans lequel le passage des nouvelles lois constitutionnelles et autres serait presque impossible!! Quant à la Jabha, les années qui suivent démontreront si elle a vraiment fait le bon choix, en essayant d'éliminer de la course la deuxième puissance électorale et politique du pays...!!
Analyse bizarre et contraire au bon sens. C'est plutôt Nida qui sera dans l'embarras. Un grand risque d'émiettement le guette s'il ne redresse la barre en ne votant pas ce gouvernement.La présidence du gouvernement devait revenir à Mr Baccouche.