News - 30.04.2012

Syphax où l'âpre lutte pour la réussite

« Autant je veille aux intérêts de la compagnie nationale Tunisair, autant  je tiends à ce que Syphax réussisse ! » affirme, le ministre du Transport, Abdelkérim Harouni, sans parvenir, cependant, à apaiser et encore moins convaincre les membres de l’Assemblée nationale constituante qui l’interpellaient fortement ce lundi matin. Le weekend était très perturbé pour la dernière-née des compagnie aériennes privées, lancée à partir de Sfax, par Mohamed Frikha. Samedi, tôt le matin, ses passagers,  presque tous touristes, qui devaient embarquer à 5 heures de Djerba vers Paris essuyaient à l’aube, un refus d’enregistrement de la part du personnel au sol de Tunisair Handeling, la filiale du transporteur public national. Les négociations menées par les représentants de Syphax n’ayant pu aboutir, ce sont les touristes qui ont dû se battre eux-mêmes pour obtenir, finalement, gain de cause.

Le même scénario s’est répété, dimanche après-midi, à l’aéroport de Tunis-Carthage. Le vol à destination de Roissy Charles-de-Gaulle, subissait le même refus, avec une plus forte tension. Programmé à 18 heures, il n’a pu prendre les airs que vers minuit. De quoi faire sortir Mohamed Frikha de ses gonds, n’hésitant pas à envisager la dissolution de la compagnie. A peine annoncée sur les ondes, cette option a dissuadé une vingtaine de passagers sur les 45 qui devaient emprunter, lundi matin, le vol Sfax-Paris. La tension était alors montée d’un cran et le personnel de Syphax s’est mobilisé pour aller manifester devant le siège régional de Tunisair à Sfax.

Un sentiment d’injustice

Au Bardo, sous la coupole de l’Assemblée, nombre d’élus ont saisi l’occasion du débat avec le gouvernement sur le budget de l’Etat et la loi de Finances, pour interpeller le ministre Harouni. Jamel Gargouri, Chokri Yaiche, Jalel Bouzid et Slaheddine Zahaf, plus particulièrement ont posé le problème dans ce qui leur semble ainsi qu’à un grand nombre de sfaxiens, son vrai contexte : une obstruction manifeste contre une compagnie régionale qui a eu le courage de se lancer au lendemain de la révolution et préfigurant l’ouverture du ciel et la concurrence internationale. Ce ressentiment vivement exprimé par la région trouve un large écho qui s’amplifie particulièrement sur les réseaux sociaux. « Encore une injustice contre Sfax, encore un plombage de toute bonne initiative économique », clament-t-ils d’une même voix. « Dûment autorisée à opérer à partir de tous les aéroports tunisiens et ayant conclu dans ce cadre une convention d’assistance avec Tunisair Handeling qui s’engage à fournir ses prestations à partir de tous les aéroports, insiste Jalel Bouzid, on ne trouve aucune explication au blocage manifesté. D’autant plus qu’une nouvelle compagnie française a été autorisée à opérer dès fin juin prochain à partir de Tunis en vol quotidien. Alors, si vous voulez réellement protéger Tunisair, c’est contre cette concurrence directe qu’il faudrait la prémunir».

La régionalisation du problème, bien qu’évitée, devient de plus en plus évidente. Badreddine Abdelkéfi (Ennahdha, Sfax), affirmera « qu’il ne faut pas tomber dans ce travers et on doit tenir compte de l’opinion publique tunisienne dans son ensemble, Mohamed Frikha étant un entrepreneur compétent qui a fait ses preuves et s’élève au dessus de ces considérations ». Salah Chouaieb, dissident d’Ettakatol (Sousse) s’inscrira en faux contre « ce débat qui ne relève pas de l’intérêt général, ne concernant que deux compagnies ». Mais, les protestations des co-équipiers de Zahaf, remettront la question encore plus bruyamment en débat, relayant un sentiment d’injustice et de frustration.

Les explications du ministre Harouni

Le ministre du Transport essayera d’expliquer le contexte général. « Au départ, dit-il, l’accord stipulait que Syphax opèrerait en partance de Sfax, avec deux vols hebdomadaires à partir de Djerba. Mais face aux difficultés qu’éprouve le secteur du transport aérien et à la non-rentabilité de cette option initiale, Syphax a changé de cap en décidant d’opérer également en partance de Tunis-Carthage à destination de Paris, sans concertation avec Tunisair, ni autorisation préalable de l’Aviation Civile. Face aux vives protestations de Tunisair, une réunion tenue samedi 21 avril, sous la présidence du ministre a permis de débloquer la situation. Syphax a, en effet, été autorisée, à opérer à partir de tous les aéroports, en veillant à la complémentarité avec la compagnie nationale et à la non-concurrence, un examen plus approfondi devait permettre de fixer les modalités d’opération à partir de Tunis-Carthage afin de ne pas porter préjudice à Tunisair. Une réunion était fixée au 25 avril pour prendre la décision finale».

Toujours selon le ministre du Transport dont les propos ont été confirmés dans la journée par un communiqué de presse publié par Tunisair, celle-ci avait accepté que Syphax puisse lancer 3 vols hebdomadaires à partir de la capitale mais doit s’engager à ne pas pratiquer des tarifs concurrentiels, prendre en considération les horaires de vols de Tunisair et ne pas débaucher son personnel. Sur cette base, Mohamed Frikha a été reçu samedi 28 avril par le chef de Cabinet du ministre, puis, le ministre lui-même, et invité à déposer ses plans de vol et lui promettant d’envisager, à l’avenir, l’extension du nombre de fréquences autorisées.

La version officielle du ministre se termine en indiquant que  Syphax a programmé le vol du dimanche 29 avril sans avoir déposé au préalable le plan demandé. Quant à l’attitude du personnel de Tunisair, à l’encontre de la nouvelle compagnie, Abdelkérim Harouni a indiqué qu’elle peut s’apparenter, sans la justifier, à une psychose de ce qu’avait provoqué un désastre au transporteur public, Karthago. A peine la phrase prononcée, Slaheddine Zahaf, appuyé par d’autres élus s’est élevé en vives protestation contre cet amalgame que rien ne justifie. Le ministre a dû alors préciser ces propos, réaffirmant sa bonne foi et ses bonnes dispositions. « D’ailleurs, je tiens à vous dire, a-t-il indiqué, que je me suis concerté avec les syndicats qui n’ont manifesté aucune hostilité à l’égard de Syphax. Aussi, et suite aux incidents de dimanche soir, une séance de travail a été tenue au cabinet du ministre jusqu’à une heure tardive. Il y a été convenu de réunir, lundi après-midi, au niveau des experts, les représentants des deux compagnies et de l’Aviation Civile ainsi que les autres parties prenantes, pour parvenir à un accord définitif fixant les modalités de coopération entre Syphax et Tunisair».

Le ministre Harouni parviendra-t-il à faire aboutir un accord acceptable à même d’éponger la vive indignation suscitée non seulement dans la région de Sfax, mais aussi au sein d’une bonne partie de l’opinion publique tunisienne et des professionnels du transport aérien. Des TO étrangers qui ont conclu des accords avec Syphax n’ont pas manqué de l’exprimer, s’interrogeant sur les engagements publics affichés. « C’est un combat d’arrière- garde à éviter, dira l’un d’eux. Avec l’ouverture du ciel qui ne saurait tarder, la concurrence sera rude pour tous. Alors, autant préparer Tunisair à s’y habituer ».
 

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8 Commentaires
Les Commentaires
Zoubeir Abid - 30-04-2012 19:14

Un minimum de bon sens et d'intelligence de la part de ce gouvernement transitoire lui aurait fait comprendre que la concurrence ne peut être que bénéfique pour Tunis Air en l'incitant à améliorer la qualité de ses services, qui actuellement poussent bon nombre de voyageurs tunisiens à choisir des compagnies étrangères.

Benmosbah - 01-05-2012 07:10

Je pense que le problème réside dans une mauvaise étude de rentabilité initiale. Syphax comptait travaillait sur sfax et en moins d'un mois se rend compte que ce projet et non viable. Au lieu de procéder dans la sérénités au changement de cap, son PDG se lance dans une fuite en avalant qui ne présage rien de bon.

merchaoui - 01-05-2012 07:57

Si nos autorités gouvernementales ne sont pas en mesure de garantir la liberté d'exploitation à une compagnie tunisienne, comment vont-t-elles procéder pour faire respecter les accords qu'elles envisagent de signer sur OPEN SKY? Pour moi, Syphax aura le mérite par sa concurrence de pousser notre compagnie nationale à une meilleure gestion. Il ne faut pas oublier que SYPHAX crée des emplois et que rien ne lui interdit d'organiser son propre handling et même de l'offrir à une compagnie tierce, et de permettre aux sociétés aériennes d'échapper au monopole.

angel - 01-05-2012 10:30

Ridha Azaiez: messieurs et mes dames les commentateurs de cet évènement. Je me présente je suis cadre de Tunisair et fier de l'être mais avant tout ça je suis tunisien nationaliste, je déteste les régionalistes de cons et les superficiels qui prennent des positions sans fondement aucun rien que pour dire nous sommes là ou pour faire plaisir à quelqu'un. Tunisair a toujours souffert de l'intervention de l'état dans ses affaires du temps de ZABA et même avant. Nous avons vu Nouvelair et Carthago monter en flèche sur le dos de Tunisair et nous étions interdit de toute réaction. L'UGTT a fait beaucoup de mal à notre compagnie nationale en imposant sa dispersion en groupe de sociétés pour rendre service aux trabelsia et autres gougeas devenus maîtres du pays. Après la révolution la même UGTT est descendu avec tout son poids pour l'unification de la société avec tout le sacrifice financier que cela induit. Aujourd'hui Syphax veut avoir une place dans le ciel tunisiens et c'est son droit mais de grâce que cela soit fait dans les normes et respectant les lois, les conventions internationales et la part du marché. Ce n'est pas parce que Syphax est la première compagnie d'après révolution qu'on doit lui permettre de passer outre les lois et les conventions. Cela n'arrange personne qu'elle soit traitée comme l'a été Chartago du temps de ZABA. Pour nos amis sfaxiens je vous prie d'oublier cette musique un peu trop régionaliste et sachez que la majorité du personnel Tunisair viennent de cette chère ville connue pour l'amour du travail et de la création. On a toujours aimé Sfax alors s'il vous plait ne nous obligez pas à changer d'avis. Vive la Tunisie toutes régions confondues. Vive Tunisair et bonne chance à nos amis de Syphax

observateur - 01-05-2012 11:52

Toujours des anti sfaxiens le régionalisme n'est pas fini...

Abdo Maalaoui (Canada) - 01-05-2012 14:28

Syfax Air line : déménager dans un autre pays, la Tunisie ne vous mérite pas ? Oui à l’autonomie des régions ! Pourquoi ??? Je pense que le temps est arrivé de dire la vérité aux citoyens tunisiens, je suis expert en coopération internationale, ayant voulu aider industriellement la Tunisie à maintes reprises (voir les articles de journaux) et j'ai découvert les vraies raisons de ce blocage systématique ! Les régions ne peuvent pas s'auto-développer sans la bénédiction d'une Omerta politico-administrative installée à Tunis. On a trop parlé : J'ai deux conseils à offrir aux hommes d'affaires tunisiens honnêtes : 1) Premier conseil : Arrêtez de perde votre temps, aller faire vos projets industriels dans d'autres pays qui vont vous accueillir comme des Princes, en plus c'est plus, les affaires sont plus claires, plus fiables, plus durables, plus équitables et quand le gouvernement tunisien se rendra compte qu'il est entrain de « tuer la poule aux oeufs d'or »... Il n'aura pas le choix ! 2) Deuxième conseil : Il faut demander l'autonomie politico-économique de chaque région (autonomie régionale) afin que chaque région compte sur elle-même (Confucius) Il faut instaurer un « Système de péréquation national » ! Sans cette option, les régions vont rester dans la pauvreté pourtant elles regorgent de richesses humaines et naturelles et les promoteurs de projets natifs de ces régions vont continuer de souffrir en évoquant des excuses insultantes à notre intelligence tunisiennes... Je ne savais pas que le Ministre du Transport est devenu le Ayatollah de Tunis-Air et des entreprises étrangères de transport aérien... Nous sommes en 2012, nous sommes au coeur de la mondialisation, il y a une loi universelle qui est la « loi anti-dumping » ! Je ne comprends pas les autres raisons... Pourquoi protéger un pilote de Tunis-Air qui est payé plus de 40,000 DT par mois ? Vous ne trouvez pas que c’est du vol légal ? et si moi petit transporteur aérien, je trouve un pilote qui accepte 3,000 Dt par mois qui a la même compétence et qui fera le même travail ! .. Il est ou le problèmes ? Mais la vérité est que « Tunis-Air est une vache à lait » qui génère des millions d’Euros par mois à une mafia connue mais personne n'a envie de l'affronter parce qu’on profite aussi de son lait !.. A qui profite le bas prix ? C'est aux citoyens tunisiens ? Tunis-Air est déficitaire et elle le restera pour toujours : C'est une vache à lait ... De quel intérêt national vous parlez ? M. Frikha, vous avez fait votre devoir ! Vous avez voulu aider la Tunisie, vous avez investi beaucoup de temps et d'argent, je sais que c’est votre RÊVE ! Mais je suis certain que vous n’êtes pas à votre premier divorce émotionnel avec cette bureaucratie !... Il n'y aucune raison pour continuer de souffrir... Partez ailleurs, je vous aiderai bénévolement de vous trouver un beau pays qui vous accueillera royalement ! Les dirigeants tunisiens nous sous estiment .. ils n'ont pas compris que nous vivons la mondialisation des marchés ... avec notre argent et notre savoir-faire ... on peut s'installer partout !!! je ne suis pas Sfaxien, je suis un homme du Nord qui a assez des bêtises à répétition en Tunisie ! Les dirigeants tunisiens c'est assez ! Il ne faut pas nous sous-estimer ! J'ai honte ! M. Abdo Maalaoui, Montréal / Canada

KITAR - 01-05-2012 23:15

Notre problème, nous tunisiens, c'est qu'on n'a de respect que pour les roumis... Si c'était une compagnie étrangère, on lui aurait certainement trouvé une bonne solution. Mais là il s'agit d'une compagnie tunisienne, sfaxienne de surcroît,ces gens ont la réputation de réussir tout ce qu'ils entreprennent. Il fallait leur mettre les bâtons dans les roues, pour les empêcher de perturber leur magouilles... Du temps de Karthago, les Trabelsias pouvaient disposer de tout Tunisair, installations, matériel et même de ses hôtesses... On dit qu'on est allé jusqu'à immobiliser un avion Tunisair pour enlever une pièce de rechange nécessaire à karthago airlines et non disponible dans les magasins de Tunisair. Alors, le "client" est roi. Aujourd'hui on se permet de bloquer les clients de la jeune compagnie pour un papier, un programme de vol non déposé, nous dit-on, pour une simple formalité, on se paye le luxe de casser une jeune compagnie...

lassoued bechir - 02-05-2012 15:53

Je suis entièrement neutre, bienque je sois d'origine sfaxienne. Si "Syphax" a mal étudié son projet initial, qui ne l'autorisait pas à utiliser Tunis-Carthage, ce nest pas une raison pour ses dirigents à faire "du n'importe quoi". Qu'ils réétudient leur projet, les conditions de sa rentabilité, et qu'ils discutent avec Tunis-Air, ss l'égide de la tutelle gouvernementale, de sa faisabilité totale ou moyennant qqs retouches, tenant compte de l'intérêt de tous. Si nous sommes obligés d'accepter des compagnies étrangères sur notre sol, celà n'implique pas automatiquement, que des compagnies privées tunisiennes, peuvent agir en totale liberté,ss tenir compte des réalités nationales. Il ya le principe de réciprocité dont tiennent compte forcément les compagnies étrangères. Alors messieurs de "Syphax" soyez logiques,soyez patriotes, soyez patients et apprenez à partager, en tenant compte des conventions existantes ou futures, pour que l'intérêt général du pays soit sauvegardé.

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