Opinions - 26.03.2012

Sourçage et crédibilité

L'éclatement du paysage médiatique avec le  fulgurant développement des supports  multimédias a  généré un  irrésistible désir d'informer et de communiquer .Un échange  élargissant  certainement l'espace de la liberté d'expression  mais  pose également la lancinante problématique de  l'importance que revêtent les sources et leur impact sur la crédibilité des messages véhiculés.

La  récente résurgence sur  les colonnes de certains  journaux d'articles non signés (cas de l'hypothétique complot contre le gouvernement actuel de Jebali)  interpelle  sur les  visées des auteurs, alors que l'éthique professionnelle répugne ce type  de pratiques que l'on croyait révolues. Elles  nuisent à la crédibilité de l'organe de presse, en particulier et à la profession, en général .Une profession soumise, de nos jours à une batterie de  critiques  et aux  procès d'intention  venant  d'entités et de personnes peu aux faits des  rouages  du milieu de la profession.

C'est que la presse se situe à l'intersection d'intérêts complexes, à l'image des contradictions politiques socio-économiques  et culturelles  qui sillonnent  toute  société,  de surcroît ,en mutation. Qualifiée, par euphémisme, de 4 ème pouvoir, elle  reste le premier réceptacle de ces contradictions. Dans la foulée d'une révolution Tunisienne  à la recherche de nouveaux repères, la presse, outre sa mission   de mettre à la disposition du public une matière informative fiable, indépendante  et objective  risque  de se transformer – par glissement – en  un   terrain de manipulation, de propagande, de règlements de compte feutrés et de chantage. Difficile ici de tracer la ligne de démarcation entre l'information honnête et la communication encline plutôt au racolage et au marketing. S'il est  facile de monter une cabale contre une personne, une structure ou une entreprise, il n'est pas autant  facile de remédier aux dommages moraux et matériels en découlant, même si des démentis s'en suivent, par le biais du  droit de réponse garanti par la loi. 

A priori, cet  écueil  peut être évité  par un retour aux  normes  de la déontologie et une responsabilisation des sources qui doivent être identifiables et  transparentes . Outil fondamental de questionnement citoyen sur la marche de la société, une presse  digne    n'a pas à faire l'apologie de n'importe quelle politique. Son rôle de véhicule de  transmission   doit respecter, autant que faire se peut les multiples facettes d'une même question. A l'instar des procédures suivies, mais à huis clos, par les commissions des groupes parlementaires. Aux organes partisans  et autres lobbies  de justifier - parfois dans la polémique -   leurs objectifs  idéologiques et intéressés.  Les  exclusivités issues des fameuses "sources bien ou généralement informées" et autres "on croit savoir",  " On apprend de bonne source "  doivent être  utilisées, avec parcimonie après les précautions de vérification et de recoupement  avec la ou les parties visées par une information de quelque nature qu'elle soit. La crédibilité d'une information est tributaire de l'identification  de sa  source. Dans une démocratie naissante, ceux et celles qui se consacrent volontairement   au service public doivent se la jouer à visage découvert. Même si- comme disaient  les Grecs anciens-  la parole était donnée à l'homme pour cacher sa pensée (stratégie).

Dans ce  rôle de médium, où la  politique demeure comme elle  l'a toujours été  une illusion,  le journaliste peut citer des  sources non- identifiées, à condition que celles-ci exigent l'anonymat. Il doit garder, toutefois  sous la main  une trace  (un document) prouvant  l'option  de son informateur. Le secret des sources n'est pas absolu .Le journaliste, comme tout citoyen est tenu, par la loi de dévoiler sa source, lorsqu'une l'autorité judiciaire décide de se  saisir d'une affaire, à caractère sensible ou touchant l'honneur d'une personne par voie de diffamation. Bien que le journaliste bénéficie, dans certaines circonstances-  du préjugé favorable, la liberté de la presse n'a pas  de substance en l'absence du sens de  la responsabilité et du respect des règles de la convivialité (droits et devoirs).

Dans ce contexte, le secteur  de la presse n'aurait pas besoin d'une instance de régulation, si ses professionnels étaient autorégulés. Ce serait l'idéal, si  tous les autres protagonistes de la vie publique l’étaient, à leur tour.

HO