Opinions - 14.02.2012

Une demande politique nationale en attente d'une offre crédible

Une atmosphère d’‘On va remettre ça !’ flotte sur la Tunisie. La frustration est à son comble. Un sentiment d’inachevé et un goût de lendemains qui déchantent envahissent les cœurs et les esprits. Les Tunisiens ne sont pas sereins et la confiance n’est pas au rendez-vous. S’agit-il d’un simple à-coup dans une marche par nature non linéaire ou d’un doute plus profond quant à la justesse et la pertinence des processus à l’œuvre ?

Jusqu’aux élections on avait affaire à un peuple vibrant à l’unisson, fier de prendre son destin en main, prêt à s’engager dans l’aventure démocratique, certain de pouvoir franchir une étape décisive sur le chemin de la refondation nationale.

Les résultats des élections et surtout la grille de lecture mise en avant par les ‘vainqueurs’ ont donné un coup fatal à l’effervescence révolutionnaire. L’impression d’un ‘détournement de la Révolution’ s’est de plus en plus installée, fortement sous-tendue par les attaques en règle contre l’Université, l’agressivité vis-à-vis des ‘safirat’, nouvelle et étonnante catégorisation sociale insufflée à partir du sommet de l’Etat, le triomphalisme trop envahissant d’un pays du Golfe se prenant pour le tuteur de la Révolution, la poussée de la fièvre salafiste, la campagne orchestrée contre les médias pour insubordination, la confusion entre Parti et Etat comme pendant les cinquante-cinq années de l’avant-révolution, la perte d’un temps trop précieux dans les tractations de partage des maroquins ministériels, des messages clairement, gratuitement et agressivement anti-occidentaux émanant de la nébuleuse intégriste de l’intérieur et autour du nouveau pouvoir.

Le bel ouvrage consensuel de la reconstruction de la Tunisie nouvelle en a reçu un coup sur la tête. Ce qui devait rester comme une œuvre nationale commune, jusqu’à la sortie des zones d’incertitude, est très vite devenu l’affaire d’un clan numériquement minoritaire au vu du potentiel électoral, au détriment de tous les autres. En se partageant trop rapidement les postes-clés d’un dispositif hyper-provisoire, l’alliance contre-nature islamo-laïque a trop vite donné l’impression qu’un souci partisan et revanchard a fini par l’emporter.

Acculés à une logique de type majorité-minorité, qui n’avait pas lieu d’être, les élus démocrates et progressistes de l’ANC se sont pris au jeu, donnant ainsi trop souvent à l’opinion publique l’image d’une campagne électorale mal achevée.

Cela a fini par provoquer un certain rejet populaire vis-à-vis de joutes interminables qui semblent trop peu se soucier des urgences du pays et de ses problèmes sociaux qui n’ont fait que trop attendre. Le fait que le gouvernement provisoire se présente les mains vides au pays a fini par exacerber le sentiment d’abandon et faire apparaître que l’ivresse du pouvoir allait l’emporter sur la recherche du consensus, de la compétence et de l’efficacité.

Afin que les ratés de la Troïka ne plongent pas davantage le pays dans le doute, il faut faire renaître l’espoir et rétablir la confiance. A ce propos, la coalition actuellement au pouvoir a tendu une perche inespérée aux acteurs démocrates et progressistes. En mettant en avant le caractère stratégique de l’Alliance actuellement à la tête de l’Etat, elle a ouvert la voie à la légitimité de l’émergence d’une alternative progressiste et démocratique.
C’est ce qui explique le grand intérêt national suscité par les initiatives diverses et nombreuses en vue de la création d’un parti populaire et démocratique nouveau, capable de porter le projet alternatif qui sera en compétition avec la coalition stratégique tripartite qui s’est formée au lendemain des élections du 23 octobre 2011.

Toutefois, cette construction, même si elle répond à un souci d’équilibre des forces politiques nationales permettant d’éviter la mono-polarisation d’un côté et l’émiettement de l’autre, sa raison d’être, ses objectifs et sa stratégie relèvent de l’ordre du positif, c’est-à-dire autour d’un projet sociétal et social nouveau, qui part des acquis historiques modernistes de la Tunisie, pour les actualiser et les féconder par les enseignements de l’expérience et les exigences de la Révolution.

C’est ce qui donne à cette démarche refondatrice un caractère de continuité, mais également de rupture et de renouveau qui ne la rend pas évidente en elle-même, sans un effort de synthèse, dont la portée historique devrait échapper aux contingences et s’élever suffisamment haut, non seulement pour intégrer une trajectoire réformiste nationale qui plonge ses racines dans le 19ème siècle mais également pour prendre en compte les aspirations d’une jeunesse avide d’idéal et répulsive vis-à­vis de côtés très sombres de la période d’après-indépendance.
Afin de pouvoir bâtir sur du solide et envisager ainsi un véritable projet de refondation nationale, sans exclusive autre que celle de la plateforme commune, il faut passer par un réexamen serein de l’expérience passée, avec ses acquis indéniables mais aussi ses déviations détestables, pour que la projection dans l’avenir ne souffre aucune équivoque.

L’une des démarches les plus fécondes pour concrétiser la refondation sur des bases claires et ouvertes sur la société et ses aspirations serait d’élaborer un projet de plateforme politique, sociale, économique et culturelle, qui sera proposé aux régions pour l’enrichir et le compléter, jusqu’à ce que cela se transforme en un véritable programme, qui servira aussi bien à se positionner par rapport aux questions nationales à l’ordre du jour que pour devenir le document de base du Congrès fondateur du parti populaire et démocratique nouveau.

Construire l’alternative progressiste et démocratique de la refondation nationale n’est pas une affaire partisane ou à but électoraliste. C’est l’élément qui apportera la sérénité qui manque au processus de réalisation des objectifs de la Révolution.

Montrer au peuple qu’il n’est pas condamné à la mono-polarisation et qu’il ne sera pas spolié de ses acquis historiques, mais, bien au contraire, qu’il est appelé à participer directement à leur actualisation profonde dans le sens de la démocratie et du progrès, constitue une des réponses de fond aux doutes qui assaillent les Tunisiens.

Répondre à l’agitation sociale non pas par la précipitation mais par la perspective constitue le seul élément de reconquête de la confiance, sur des bases montrant de manière suffisamment claire que la Nation garde son destin en main et que c’est le peuple qui est désormais aux commandes.

B.R.

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1 Commentaire
Les Commentaires
cherif Bessaoud - 14-02-2012 18:09

pour gagner la confiances des investisseurs,surtout Tunisiens a l etranger,il faut que les banques Tunisiennes et surtout la STB honore le payment des lettres de credits confirmees et irrevocables car cette banque en particulier ne respecte pas les conditions et redige des LC sans provisions,c est grave car Standards and Poors ,fritch etc seront au courant tot ou tard.

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