Opinions - 01.02.2012

Pour l'inscription du Droit à la Santé dans la Constitution

La révolution du 14 janvier 2011 et les événements qui se sont succédé depuis, ont mis en évidence l’ampleur des problèmes économiques et sociaux du pays, les grandes inégalités entre les régions  et les couches sociales dans le domaine de la santé et ses déterminants sociaux, ainsi que les difficultés et les dysfonctionnements des services de soins. 

Malgré des acquis incontestables sur le plan sanitaire, la situation est préoccupante. Plus de 10% de la population soit plus d’un million de personnes, parmi les plus démunies, ne disposent pas de couverture santé et se trouvent de fait exclues de l’accès aux soins. Des ménages, dans une proportion estimée à 3%, tombent chaque année dans la pauvreté parce qu’ils ont été confrontés au paiement direct des frais d’un gros problème de santé. Les hôpitaux, surtout à l’intérieur du pays, manquent de personnel qualifié et de ressources financières, ce qui se traduit par un manque de médicaments, des équipements insuffisants et des problèmes de maintenance. L’hôpital universitaire traverse une crise grave, affecté par la pénurie, le mécontentement des personnels et le départ de cadres qualifiés. Le secteur privé de la santé connaît également des difficultés : le coût d’accès élevé aux prestataires de soins et aux établissements sanitaires privés entraînant une rupture de la continuité des soins.

La complexité des problèmes de la Santé et l’absence de solution  aux difficultés qui se sont accumulées ont augmenté l’inquiétude des citoyens concernant leur droit légitime à la santé, évoqué dans le préambule de la Constitution de 1959. L’élection de l’Assemblée Nationale Constituante et la préparation d’une nouvelle constitution constituent une occasion précieuse pour garantir ce droit, et pour entamer une réflexion sur la réforme du système de santé ouvrant la voie à une  réconciliation avec le citoyen.

Inscrire Le Droit à la Santé dans la prochaine Constitution est conforme aux objectifs de la Révolution de la Dignité et de la Liberté  ainsi qu’aux conventions internationales signées par la Tunisie, en particulier, la Déclaration des Droits de l’homme, la Constitution de l’Organisation Mondiale de la Santé , la Déclaration d’Alma Ata sur la santé pour tous et les différentes recommandations du Comité des droits économiques et sociaux du Conseil économique et social de l’ONU.

Sur cette base, la nouvelle Constitution doit inclure, à notre avis, les éléments suivants :

1) Le Droit à la Santé est un droit pour tout citoyen, sans aucune discrimination

2) Le Droit à la Santé ne se limite pas à l’accès aux services de soins, mais doit inclure les déterminants de la santé comme un emploi et un logement décents, l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, la qualité de l’environnement et  une alimentation saine.

3) Le rôle et la responsabilité de l’Etat sont essentiels dans la mise en œuvre des structures juridiques et organisationnelles permettant l’exercice effectif du droit à la santé dans le cadre d’une Stratégie Nationale de Promotion de la Santé.

4) La constitution doit prévoir les mécanismes garantissant le droit du citoyen à la santé, en particulier les indicateurs permettant de suivre et d’évaluer la mise en œuvre de la stratégie nationale  pour le droit à la santé.

5) La Constitution doit également prévoir la participation du citoyen et des organismes de la société civile, à la protection du droit à la santé,  les moyens juridiques pour en bénéficier, ainsi que la possibilité de recours en cas de non-respect de ce droit.

Nous, soussignés, exerçant dans le secteur de la santé et le secteur social, lançons un appel pour l’inscription du droit à la santé tel que défini ci-dessus, avec l’ensemble des droits économiques et sociaux, dans la nouvelle Constitution et appelons les députés de l’Assemblée Nationale constituante,  les partis politiques et les organismes de la société civile à soutenir et à défendre cette demande.

Liste des premiers signataires

Abdelaziz  BASTI Pharmacien
Abdelmajid  BEN HAMIDA Professeur de médecine
Abelwahed  EL ABASSI Médecin
Ali  CHEDLI Doyen Faculté de médecine de Monastir
Ali  MTIRAOUI Doyen Faculté de médecine de Sousse
Amor  BOUROGAA Professeur paramédical
Amor  TOUMI Professeur de pharmacie
Azouz  ELGHARBI Directeur hospitalier
Béchir  ZOUARI Professeur de médecine
Belgacem  SABRI Médecin
Férid AYOUB Médecin
Férida  RIAHI Médecin
Habiba  BOUHAMED CHAABOUNI Professeur de médecine
Habib  MAAOUIA Educateur sanitaire
Hassine  KHARROUBI Cadre CNRPS
Hédi  ACHOURI Médecin
Hédi  EL BAZ Médecin
Héla  BEN CHAABANE ABDELJAWAD Médecin
Imed  MAALOUL Professeur de médecine
Jameleddine  BOUSLAMA Médecin dentiste
Kacem  AFAYA Secrétaire général  adjoint UGTT
Karim  AWAM Professeur de médecine
Khaled  ZGHAL Doyen Faculté de médecine Sfax
Mahmoud  AYARI Médecin
Mohammed  AKROUT Professeur de médecine
Mohammed  KOUNI CHAHED Professeur de médecine
Mohammed  SOLTANI Professeur de médecine
Mokhtar  TRABELSI Directeur hospitalier
Moncef  BEL HAJ YAHIA Médecin
Mouldi  JENDOUBI Secrétaire général  adjoint UGTT
Niçaf  BEN ALEYA Médecin
Noureddine  ACHOUR Professeur de médecine
Noureddine  BEN JEMAA Médecin
Raouf  BEN AMMAR Professeur de médecine
Ridha  HAMZA Médecin
Skander  MRAD Professeur de médecine
Taoufik  NACEF Professeur de médecine
Zied  BEN LAMINE Médecin

 

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