News - 17.10.2011

France-Soir : la triste fin d'une institution

D’ici quelques  jours, « France soir », le quotidien français le plus vendu de l’après-guerre aura vécu. Fondé en 1942, dans les maquis des FFI par un grand résistant français, Philippe Vianney que tous les anciens du Centre de Formation des Journalistes de Paris connaissent bien, sous le nom de « Défense de la France ». En 1944, au sortir de la guerre, il deviendra France-Soir  et sera pris en main par un patron de presse de légende, Pierre Lazareff, un autodidacte visionnaire, fils d’émigrés russes. Il en fera pendant trois décennies « le seul journal français tirant à plus d’un million d’exemplaires »,  comme le proclamait en gros caractères le bandeau  placé juste au dessous  du titre générique. Près de deux millions de de personnes qui n'étaient pas tous des concierges le lisaient chaque jour. Le trait de génie de Lazareff a été d’avoir misé sur les illustrations et  les articles concis, formule qui a été par la suite reprise et affinée par le Paris Match de Daniel Flippachi. Ce ne sera pas son seul titre de gloire. Il produira la fameuse émission, "Cinq colonnes à la une" à la télévision, dont la formule sera reprise plus tard par «Envoyé spécial»,  tandis que sa femme, Hélène, lancera le magazine "Elle". Les plus de cinquante ans se rappellent encore les « une » de France-Soir sur l’assassinat de Kennedy, les évènements  de mai 68 en France,  les premiers pas de Neil Armstrong sur la lune,  ses titres très courts barrant toute la page, comme ce BRRR !!! en très gros caractères, illustré par la photo d'une France sous le neige au début des années 60. France-Soir, c'était le modèle qu'on enseignait dans les écoles françaises de journalisme avec sa mise en page aérée, son ton léger même même quand le sujet était éminemment sérieux et la place prépondérante des illustrations ; alors que l'antimodèle, c'était le Monde avec sa maquette lugubre, ses titres tellement longs qu'ils nous dispensaient de lire les articles, son contenu ennuyeux (il parait que c'était le conseil que donnait Beuve-Méry à ses journalistes, "faites ennuyeux") et ses phrases alambiquées qu'on était obligé de relire deux ou trois fois pour en saisir le sens.

Journal du soir comme son nom l'indique, France-Soir, grâce à son édition de 10 heures, était mis en vente le jour même à Tunis, au même titre d’ailleurs que le Monde et Paris turf et à un prix comparable à celui des journaux tunisiens.  Je me  souviens encore des ces vendeurs de journaux  à la criée dévalant l’avenue Bourguiba  vers 18 heures« France soir ou Monde ». On dévorait les grands reportages  de Lucien Bodard, Joseph Kessel et Philippe Labro. La gent féminine raffolait des potins de la « commère », Carmen Tessier. La rubrique « étranger » était tenue par un journaliste talentueux au nom incroyable, Aldebert de Ségonzac. Après la mort  du fondateur, en 1972, France-Soir, changea plusieurs fois de mains et fut secoué par des crises. Les ventes s'en ressentirent (début octobre 2011, le journal ne vendait plus que 20000 exemplaires pour un tirage de 30000). La descente aux enfers vient de prendre fin avec la  disparition de ce monument de la presse française, ou du moins de sa version papier. Car il y aura une version électronique, en attendant des jours meilleurs.

H.B

   

 


 

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