Opinions - 16.08.2011

Ce que j'attends de Si Béji Caid Essebssi

Comme tous, j'ai appris que Si Béji Caid Essebssi devrait s'adresser à nous le 18 Août. Ce rendez-vous est décisif pour consolider le processus devant conduire à la réussite de notre révolution. C'est la dernière chance qui nous reste pour réussir Notre Révolution. Certes, la quantification de la réussite varie d’une personne à l’autre. Cependant, il est du devoir de tous d’œuvrer au succès. Or, depuis 7 mois, nous ne cessons de dresser les obstacles devant la transition démocratique. Et là, la responsabilité est collective. Rien ne sert de jeter l'anathème sur tel ou tel autre, ça serait même contre productif.

Par ailleurs, ce n'est certainement pas « l'après 23 Octobre », tel qu’il se dessine et quelque soit le résultat des élections, qui pourra réunir les conditions de cette transition. Au contraire, tout laisse présager que l'instabilité sera la principale caractéristique de « l'après 23 Octobre ». Et là encore, il sera fait appel à la démarche consensuelle qui a déjà montré ses limites. Devant cette impasse vers laquelle nous nous dirigeons, on ne peut faire appel et avant les élections, qu'au sens des responsabilités des uns et des autres pour recentrer l'action de tous vers la transition démocratique qui est  la condition de " réalisation des objectifs de la révolution". Devons nous rappeler qu’il ne peut y avoir de progrès équitable et durable sans démocratie ; de même qu'il ne peut y avoir de justice et de sécurité sans démocratie ? Or, la démocratie est une question de droit et d'institutions avant toute autre chose. La fidélité à la révolution nous impose de gagner le défi de la transition démocratique en créant les conditions idoines.

L'allocution de Si Beji (l'Homme d'Etat et non le premier ministre d'un gouvernement provisoire mais néanmoins consensuel) est la dernière chance pour sauver notre révolution. La direction « d'après le 23 Octobre » ne pourra pas obtenir le consensus, car partisane par essence et sa légitimité issue des urnes a un poids relatif en l'absence de constitution, qui seule peut réellement légitimer un pouvoir républicain en organisant les pouvoirs et en fixant les droits et les devoirs de tout un chacun. Après le 23 Octobre, il n y aura  encore ni droit ni institutions. Voilà pourquoi je dis que l'instabilité s'installera. L'histoire ne pardonnera aucune fuite devant les responsabilités et ce, quelle qu'en  soient les raisons.

Pour cela, il me parait impératif de : Premièrement, imposer à tous un engagement pour un retour à la légalité dans les plus brefs délais et ce par la promulgation d'une nouvelle constitution dans un délai ne dépassant pas 6 mois à compter de la date d'élection de l'assemblée constituante. Deuxièmement, il faut obtenir de tous l'engagement solennel pour que le peuple exerce sa souveraineté sur la chose publique -et il n’y a pas plus publique que la constitution de son pays- et ce en décrétant que le referendum populaire sera le seul moyen d'adoption de la future constituante. Troisièmement, entamer sans délai et avant les élections une discussion sur l'organisation des pouvoirs pour « l'après 23 Octobre » avec comme principe : le refus de toute concentration des pouvoirs. Quatrièmement, et compte tenu des difficultés qu'éprouve notre justice pour dire le droit, annoncer la mise en place d'une justice appropriée pour juger les délits commis par l'ancien régime et qui ne relèvent pas tous du droit commun et de ses procédures. C'est ce que j'attends de Si Beji pour le bien de notre pays. Les questions économiques et sécuritaires nécessitent d'abord une clarification politique de l'intérêt général. Pour l'homme d'Etat qu'il est, ceci est possible.

Dr Hatem JEMAA