La responsabilité, un honneur et non des privilèges
Pourquoi le membre d’une communauté accepte-t-il, un jour, d’être son représentant ou son dirigeant ? Pourquoi certaines personnes décident-elles de se présenter un jour dans des élections pour devenir doyen d’une université, président d’une municipalité, chef d’Etat, président d’un club sportif ou d’une association ? Pourquoi d’autres acceptent-elles les postes qu’on leur propose pour être gouverneur, ministre, directeur, etc. Peut-être parce qu’elles y voient une manière de contribuer, d’une manière plus forte et plus directe qu’elles ne le faisaient auparavant, au devenir de leur communauté ou de leur institution. Ou peut-être aussi parce qu’elles ont cédé à la volonté d’une ou plusieurs personnes de leur groupe qui voyaient qu’elles étaient dans une position forte pour défendre leurs intérêts et ceux de leur organisme. Fières de cette confiance et souhaitant se montrer à sa hauteur, ces personnes acceptent le poste et s’y investissent.
Les responsabilités et le volume de travail qu’engendrent la représentation et la direction d’un groupe fait que généralement celui qui choisit d’assumer cette charge bénéficie de certaines primes financières, de certains avantages en nature tels qu’une voiture, un logement, un chauffeur, etc. Si sur le papier, ces rétributions semblent légitimes, elles engendrent dans la pratique certains comportements dysfonctionnels qui font dévier de son objectif noble la représentation d’un groupe ou d’une communauté.
En effet, combien avons-nous vu, dans un passé très récent dans notre pays, une course folle aux postes de responsabilité. Généralement, elle est engagée par des individus dont le seul but est de s’octroyer les fameux privilèges qui sont du ressort des représentants de l’Etat ou des institutions politiques, sportives ou culturelles, notamment, usant aussi et abusant de la visibilité que leur donne leur rôle de représentation à des fins personnelles.
Clientélisme, favoritisme, jeu d’alliances et de pouvoirs, tractations, marchandages, dessous de table sont ainsi devenus le lot d’une véritable lutte. Celle-ci s’engage à chaque fois qu’un poste de responsabilité se libère et ses titulaires de se servir et de servir, avec une allégeance parfois aux limites de la décence, ceux qui leur ont permis d’accéder à cette responsabilité.
Afin de redonner aux postes d’ambassadeur, de directeur d’établissement, de gouverneur, de ministre, l’honneur de servir sa cause, son peuple, sa communauté et son pays, il serait nécessaire d’éliminer l’ensemble des faveurs qui leur sont accordés et faire en sorte qu’ils gardent uniquement leur niveau de rémunération personnel qu’ils avaient avant d’accéder à ce poste. Il faudra également chercher à créer une instance indépendante de surveillance des responsables dans l’exercice de leur fonction.
De la sorte, on pourra s’assurer une classe de représentants des citoyens seulement motivés par la fierté de contribuer au bien-être de leur communauté et non des personnes avides d’argent, de pouvoir et de cupidité.
Bataillons pour que nos compatriotes apprennent à oublier le favoritisme et toutes ses couleurs ainsi que tous les comportements de type “3ndekchi Chkoun” (As-tu quelqu’un).
Agissons ensemble pour bâtir un avenir meilleur et une société saine où nul n’est favorisé parce qu’il vient de la part de ……
Donnons-nous les moyens de s’assurer que nos futurs dirigeants agissent en personnes patriotiques, justes, respectueuses de leur engagement et ne dépassant guère les limites de leur responsabilité. Leur seule récompense serait l’HONNEUR d’avoir été désigné à la tête d’un groupe qu’ils auraient accepté de servir avec fierté et sans calcul.
Rafik KALFAT
Professeur à l’INRAP – Biotechpole Sidi Thabet