Opinions - 03.03.2011

Entreprise et Politique : quoi de neuf après janvier 2011 ?

Notre révolution  a déjà réalisé des miracles, grands et petits ; c’est ainsi que lundi avant dernier  fin d’après-midi au siège du Mouvement ETTAJDID, parti politique bien ancré à gauche ,se sont retrouvés  dan le cadre du Club de la Citoyenneté, jeunes étudiants au look rasta et grands chefs d’entreprise plus des enseignants et quelque jeunes  des  banlieues  pour un débat au titre prometteur car inédit : Entreprise et Politique .Tarek Châabouni, membre de la direction d’Ettajdid et chef d’entreprise lui-même a introduit quelques thèmes du débat .

Une relation difficile !

Interrogé quelques jours auparavant  par Radio Mosaïque sur la difficulté de concilier entre faire de la politique et diriger une entreprise, le présentateur avait répondu : c’était difficile avant le 14 janvier et ça le restera après. En effet, avant la révolution la politique était une menace pour l’entreprise car elle la menaçait parfois dans son existence et  même si  la plupart des chefs d’entreprises privées ont su se protéger en faisant des  compromis ou en se faisant discrets et souvent en s’affiliant eux-mêmes au parti du pouvoir. Après la révolution, c'est la politique et la démocratie qu’il faut protéger de l’argent en général et de l’Entreprise en particulier car nous allons connaître des élections décisives sans règles  strictes sur  le financement des partis et des candidats car les  Tunisiens s’ intéresseront d’abord au vote et aux candidats et ne s’intéresseront guère à des régles de plafonnement des dépenses  électorales et aux différents cas d’incompatibilité entre une charge publique et des intérêts personnels. Ces règles ont d’ailleurs vu le jour, dans les démocraties affirmées, de manière très progressive. Il faudra bien établir l’incompatibilité entre la fonction de député et de ministre avec la responsabilité de P.d.g, de gérant ou même de membre de conseil d’administration car quel que soit le choix retenu entre régime parlementaire ou présidentiel, il faudra que le député assume sa charge à plein temps à l’assemblée et consacre le reste de son temps à ses électeurs.Il ne faudra pas,  non plus, qu’on soupçonne le député en tant que législateur  d’avoir un intérêt particulier à défendre.

l’entreprise : ombres…..

Disons d’abord que si le terme Politique pose problème, la donnée Entreprise en pose autant sinon plus car de quoi s’agit-il au juste ? Parle-t-on des 450000 patentés du fisc et dont 80% sont au régime forfaitaire car supposés faire une activité trop simple pour la tenue d’une comptabilté régulière alors que l’Etat de l’économie et de la société dément cruellement ce chiffre.L’ancien Régime a régulièrement laissé gonfler ce chiffre,malgré ses déclarations en sens inverse , dans le cadre d’un pacte anti-républicain de laissez-aller fiscal en contre-partie du silence politique ou de l’embrigadement forcé, car qui croirait que la moyenne des patentés   avait à payer en une année moins que ce que paie un instituteur en un mois.Le défaut de ce systéme était qu’il englobait dans une masse indistincte  ceux qui  y avaient droit (petit commerçant dans un village)et les autres(qui faisaient de l’exportation !). Parle-t-on de 12000 entreprises structurées employant 10 personnes ou plus et comment notre appareil statistique les appréhende-t-il ? Peut-on faire confiance au Registre de Commerce alors que souvent les entreprises disparaissent de fait sans formalités de radiation? Que penser de la proportion énorme d’ entreprises en société anonyme ou en sarl qui ne déposent pas leur déclaration fiscales à temps(40% au moins) sachant qu’en plus la plupart se déclarent perdantes (quels pourcentage, Monsieur le ministre des finances ?)

...et lumiéres

Positivons quand même, et raisonnons par le paradoxe. S’il n’y avait pas un tissu solide d’entreprises qui produisaient des biens et des services pour le marché local et pour l’export (un tunisien peut être obligé à acheter un produit faute de choix,un étranger jamais), nos  comptes publics et nos caisses sociales seraient encore plus déficitaires, notre balance commerciale en était arrivée avant la crise de 2008 à un taux de couverture de près de 90% alors qu’on était à 50% dans les années  80 du siècle dernier .Sait-on assez que le Tunisien est le plus grand exportateur par tête d’habitant du Sud de la Méditerrannée et que la petite Tunisie exporte plus que l’Egypte 7 à 8 fois plus peuplée ? Cet authentique capital de la Tunisie, qui n’est pas seulement le tissu des PME (Une entreprise étatique, le Groupe Chimique Tunisien, est l’un des plus gros exportateurs tunisiens) doit être valorisé et compris à sa juste valeur.

Si l’Entreprise prend, elle doit donner.

C’est une vérité élémentaire : 50 % des causes du succès , de la croissance et du développement de l’Entreprise sont en dehors d’elle.Cet environnement est fortement conditionné par l’état des infrastructures(Routes,ports ,aéroports)qui en Tunisie plus qu’ailleurs sont presque toujours possédés et gérés par l’ Etat ,ses offices spécialisés ou par des entreprises publiques.Le personnel est éduqué et formé à 90% par l’Etat et la qualité de cette formation du Capital humain est déterminante pour la production et la création d’une plus-value partagée.L’Entreprise a beoin également de la Sécurité publique et d’un réglementaire (Code du Travail et Fiscalité notamment.

Dans le cadre politique nouveau, l’entreprise devra apprendre de nouvelles fonctions. Alors qu’elle  rendait compte de ses activités à une communauté définie (ses actionnaires et l’Administation sous  diverses formes), elle devra tenir compte d’un facteur nouveau qui doit se former et constituer la  base de la démocratie : l ’Opinion publique. Elle devra  l’influencer en sa faveur par des canaux réglementés et transparents ( le lobby le plus puissant sous l’ancien régime était celui de l’hôtellerie-tourisme qui a accaparé 60% des dettles du Système bancaire alors qu’il représentait 10% de l’économie et qui a bloqué toute tentative de réformer le secteur depuis la première guerre du Golfe). Mais elle doit rendre compte aux différente composantes de la Société( Presse générale ou spécialisée, Parlements, Associations écolgistes) sur ses produits et ses méthodes. Elle sera certainement questionnée sur sa capacité à créer des emplois qualifiés et sur le bon usage des encouragements fiscaux etociaux reçus pour l’investissement dans les régions déshéritées.

Un Parti des entreprises est-il nécessaire ?

Partons de la situation de la représentation de l’Entreprise avant le 14 janvier pour la récuser. L’organisation patronale avait 14 représentants à la Chambre des  députés qui s’activaient presque exclusivement à la Commission des Finances et à celle de L’Equipement et du Tourisme. ils étaient tous dans le Parti unique et officiel. Méritent-ils de rester dans la Politique, alors qu’il ne défendaient que des intérêts particuliers. Ne feraient-ils pas mieux   de se replier sur leurs organisations professionnelles qui doivent forcément se démocratiser et échapper définitivement aux tutelles pesantes du pouvoir. Et puis faut-il un Parti spécifique de entreprises comme le Parti Libéral Démocratique japonais, parti unique à sa façon puisqu’il a dirigé sans interruption le Japon de 1945 à 2009 ?Pourquoi l’entreprise ne ferait-elle pas monter les enchères en ne soutenant aucun Parti ,ce qui lui donnerait la possibilité de les influencer tous ? Mais la solution la plus avantageuse, à mon avis, serait qu’un parti démocratique prenne en charge les revendications du secteur le plus avancé des entreprises, celui qui crée le plus de valeur ajoutée et par conséquent d’emplois qualifiés (rassurons-nous,les emplois qualifiés créent les autres et pas l’inverse !)et  crée avec les représentants de ces secteurs une alliance franche  et assumée publiquement.


Tarek Châabouni
 

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4 Commentaires
Les Commentaires
shili ridha - 04-03-2011 13:29

si tarak tres bien votre evaluation de la situation d avant et d apres rien a dire sauf peut etre qu a la fin vous sugerez la possibité de la creation d un parti qui serait le fer de lance des entreprises tunisiennes mon opinion serait que celui ci deviendrait trop puissant au vu de la situation presente et peut se dirigeraient t on vers une autre dictature en plus votre position personnelle de gauche en serait touchée n est ce pas

Tarek Chaabouni - 04-03-2011 19:22

bonjour, au contraire au Japon,c'était une dictature déguisée car la démocratie a été conçue par les Américains pour affaiblir les restes du système féodal(ils ont obligé l'Empereur,c'est à dire Dieu à déclarer qu'il ne l'était pas)

mokdadi hamadi - 07-03-2011 16:22

Certes tarek , Les préoccupations sont nombreuses et méritent des réponses comme celles énumérèes ci dessus . Nonobstant - Que faut-il pour que les décideurs soient imprégnés des recommandations de bonne gouvernance: efforts des politiques, des académiques et des professionnels. - La transparence dans la communication et la fragmentation des différents organes de diffusion. - Comment aborder l'approche participative et Comment établir le pont avec toutes les instances de l'entreprise pour une meilleure traçabilité des décisions? - Comment concilier l'orthodoxie financière et les approches politiques ,économiques, sociologique et juridique? - Renforcement du dialogue au sein du CA pour proposer des solutions et des stratégies, etc. Ceci repose sur les principes qui visent à expliquer les orientations politques avec une capacité de rendre compte et d'être questionné en permanence . LE DEBAT EST OUVERT , IL FAUT PERSEVERER . MOKDADI HAMADI

Tarek Chaabouni - 08-03-2011 10:23

bonjour, un volet important est la relation à l'intérieur de l'Entreprise et pas seulement au niveau du Conseil d'administration,car si la politique était l'organisation d'un pouvoir et de relations d'autorité et de hiérarchie,alors la politique serait également dans l'Entreprise.Les meilleures de nos entreprises sont gérées selon des schémas pyramidaux(l'information va de bas en haut et les décisions de haut en bas)et qui sont dépassés par les entreprises les plus modernes depuis des décennies.

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