Opinions - 29.01.2011

Quel rôle pour notre gouvernement de transition ?

Slim Amamou, un des plus jeunes  et high-tech membres de gouvernement dans le monde considère à juste titre que la révolution Tunisienne a été la révolution la plus rapide de l’histoire  . Le nouveau challenge de la Tunisie sera de réussir aussi la transition la plus rapide de l’histoire vers la démocratie, la prospérité et l’équité.

C’est en ce sens qu’a été mis en place un ensemble de commissions nationales et un gouvernement de transition : une équipe dont l’âge des membres va de 33 à 83 ans et qui  présente un éventail impressionnant de talents et compétences alliés à un grand sens du patriotisme. Plusieurs membres présentent   une impressionnante exposition au monde international des affaires contrastant  avec une faible exposition à la  politique et qui sont accompagnés par quelques  politiciens chevronnés.
Quel devrait être le rôle de ce gouvernement ?

Ce rôle, a mon avis, ne peut se limiter à une gestion courante des affaires. Ce gouvernement doit  en parallèle réaliser plusieurs missions :

Réaliser un diagnostic et un état des lieux de l’administration

L’œil neuf de plusieurs membres habitués à piloter et réaliser des diagnostics stratégiques, des missions d’organisation  et de gestion de changement  permettra certainement un diagnostic qui n’aura rien à envier à celui des grandes entreprises internationales spécialisées. Le travail permanent sur le terrain est de nature à rendre ce diagnostic encore plus pertinent.

Communiquer  à l’international  l’image d’une Tunisie qui est entrain de devenir  l’éclaireur du chemin de  la démocratie et de la réussite  économique et sociale dans la région.

Certains membres de l’équipe sont déjà  à Davos pour communiquer cette image. La Tunisie a tant souffert d’une image d’un pays pour  tourisme « cheap » et  les études et les chiffres s’accordent à dire que la Tunisie n’arrive pas à se vendre aux investisseurs étrangers malgré tous les classements et indicateurs  qui sont à force de bachotage devenus une fin en soi.

Nous avons aujourd’hui une occasion historique et unique d’attirer plusieurs  milliards de dollars en fonds et investissements étrangers qui nous mettront en moins de 3 ans sur la rampe des dragons asiatiques. Notre transition vers la démocratie appuyée par les talents de cette équipe en cohérence avec une communication adéquate nous permettra certainement de gagner ce pari.

Lancer  les grands chantiers socio-économiques

Comme en matière de business, la Tunisie doit se positionner correctement dans l’échiquier mondial et  le facteur clé de succès de la Tunisie sera d’avoir la stratégie de ses moyens et les moyens de sa stratégie. Pour cela un ensemble de problématiques doivent être adressées très rapidement :

  • La stratégie de la Tunisie sur les 30 années à venir
     
  • Les  stratégies sectorielles et régionales
     
  • Les stratégies de développement
     
  • L’employabilité
     
  • Le passage à une administration performante et orientée citoyen
     
  • La gouvernance dans l’administration
     
  • Une e-administration en cohérence avec notre e-révolution
     
  • La mise à niveau des services, du commerce et de l’agriculture
     
  • Le management des retraites
     
  • Le développement de la société civile
     
  • Le nouveau rôle des médias
     
  • ...

La masse de travail à ce niveau étant très importante, il sera primordial de mettre au moins en place les structures  adéquates pour manager les différents chantiers.

Dorer le blason et l’image de l’administration tunisienne et faire en sorte qu’elle attire de nouveau les meilleurs talents et compétences

Durant les 20 dernières années, à peine quelques dizaines des milliers de Tunisiens diplômés des grandes écoles européennes et américaines ont intégré l’administration et les entreprises publiques Tunisiennes et les enquêtes montrent que les jeunes talents Tunisiens ne sont pas attirés par l’administration,  ce qui, à mon avis  a provoqué de graves carences et se trouve à l’origine de plusieurs disfonctionnements qui ont contribué  au malaise général.

 La réussite de cette équipe couplée au grand élan de patriotisme que nous vivons palliera à cette carence. En effet, cette équipe devrait être  un exemple d’abnégation, d’écoute et de travail en équipe qui en ferait  une « idole » pour notre talentueuse jeunesse.

La réussite de ces chantiers passe par un gouvernement qui travaille comme une vraie équipe projet où chaque ministère représente une facette et un angle de vue d’une même   problématique  complexe et je pense sincèrement que ce gouvernement a  les atouts pour travailler de la sorte.

Afin de réussir, ce gouvernement devra  s’interfacer, écouter, canaliser et utiliser les compétences de dizaines de think tank  qui se sont spontanément constitués ces derniers jours en Tunisie groupant compétences et talents constituant des forces de proposition et de persuasion.

Il devra certainement s’appuyer sur les dizaines d’études, consultations,  diagnostics et  plan d’action d’organisations nationales et internationales qui ont été réalisées mais qui n’ont pas pu se concrétiser vu l’environnement et les disfonctionnements existants et dont cette révolution vient de constituer la vraie rupture.

Ainsi, ce gouvernement a un rôle primordial à jouer dans la réussite de la transformation de la Tunisie. En effet, réussir la révolution est extraordinaire, réussir la transition l’est encore plus.

Nos martyrs nous regardent, le monde entier nous regarde. Soyons à la hauteur de toutes les aspirations.

Maher Kallel