Noureddine Hached est décédé

Longtemps ambassadeur de Tunisie, après avoir été gouverneur, député, et ministre du Travail, Noureddine Hachad est décédé dans la nuit du jeudi à vendredi, à Tunis, à l’âge de 80 ans. Il sera inhumé selon ses vœux à Kerkennah, ce samedi 1er mars 2025, apprend Leaders d'une source familiale. Fils du leaders syndicaliste Farhat Hached, lâchement assassiné le 5 décembre 1952 sur le chemin entre Rades et Tunis, Noureddine portera le deuil de son père toute sa vie durant et poursuivra son combat pour un syndicat libre et une Tunisie indépendante. Donnant une nouvelle orientation à ses études supérieures débutées à Paris dans le tourisme et son économie, il se spécialisera dans l’histoire politique et obtiendra son doctorat (1986).
De sa vie, Noureddine Hached fera un combat pour lever la chappe de plomb qui avait entouré les circonstances de l’assassinant de son père ainsi que de nombre d’autres militants et leaders du mouvement national tunisiens. Par sa pugnacité et ses multiples pressions auprès des chefs d’Etat français successifs (notamment Sarkozy, Hollande et Macron), il finira par accéder à une grande partie des archives classées hautement secrètes et décrypter ainsi de larges séquences d’assassinats perpétrés par des équipes parallèles (La Main rouge...). A chaque voyage en France, il obtenait de nouveaux documents fort accablants, jalousement gardés au secret. Il y a quelques années seulement, il avait ramené avec lui des dossiers très documentés, avec photos à l'appui, sur le martyr de Hédi Chaker, assassiné le 13 septembre 1953, pour les remettre à son fils M’hammed Chaker.
Souffrant ces dernières semaines, Noureddine Hached avait subi une intervention chirurgicale, début février. Il a tenu cependant, à quitter le lit, pour venir rendre hommage à son ami d’enfance et compagnon de long parcours, M’hammed Chaker, récemment décédé, lors d’une cérémonie commémorative tenue le samedi 15 février 2025 au siège des anciens de l’ENA. Cordial, affecté, le verbe haut contre les affres du colonialisme, Noureddine Hached était ce jour-là entier, égal à lui-même : dans l’indignation, la dénonciation et la compassion.
Dès son âge, orphelin du père, Noureddine Hached se frayera son propre chemin, entouré de l’affection de sa maman Om el Khir et des siens, de l’attention de Bourguiba, et du soutien des syndicalistes restés loyaux et fidèles à Hached. Après avoir rejoint les rangs de l’UGET et du mouvement du tourisme des Jeunes, il dirigera la SOTUTOUR qui lancera une série de clubs de vacances, puis sera nommé gouverneur de Mahdia (1976 – 1978). Refusant d'obtempérer aux instructions de faire tirer sur la foule et de s'attaquer aux syndicalistes, il démissionnera immédiatement de ses fonctions. Il connaitra alors pendant 3 ans une traversée du désert, allant travailler dans une entreprise privée. Il sera porté par de fervents amis, député à l'Assemblée nationale, sur une liste indépendante (1979 - 1981). A la demande des syndicalistes, alors que l’UGTT était en pleine crise, et que nombreux de ses dirigeants étaient en prison condamnés à de lourdes peines suite aux évènements du 26 janvier 1978, Noureddine Hached est chargé de renflouer la centrale syndicale et de resserrer ses rangs, à la faveur d’un congrès national de renaissance. Avec des camarades imprégnés de sagesse et de militantisme, il oeuvrera à la tenue réussie de ce congrès à Gafsa en avril 1981, passant la main aux dirigeants élus.
Bourguiba l’appellera de nouveau auprès de lui et le nommera en 1981 ambassadeur en Belgique et représentant auprès de l’Union européenne. Il y restera cinq ans, puis sera muté à Alger (1984 – 1985).
Noureddine Hached fera son entrée au gouvernement en octobre en 1985, en qualité de ministre du Travail, et y restera 9 mois, jusqu’en juin 1986.
Il reprendra alors sa carrière diplomatique en tant que représentant de l’OUA à Genève (1987 – 1992), puis d’ambassadeur de Tunisie en Italie (1992 – 1995), et de secrétaire général adjoint de la Ligue arabe, dirigeant notamment le centre de la Ligue à Tunis et siègeant aussi au Caire (1992 – 2007). En 2007, il est nommé ambassadeur de Tunisie au Japon et en Australie, avec résidence à Tokoy. Dès le 20 janvier 2011, il s’empressera de démissionner de son poste et de rentrer à Tunis... Pour reprendre d'autres combats et s'acquitter d'un devoir d'histoire.
Allah Yerhamou.
Taoufik Habaieb
Lire aussi