Edito: Un plan “Retour”
Un grand bond technologique en avant est nécessaire. Pour l’accomplir, compter sur nos ressources internes seulement, aussi valeureuses soient-elles, ne suffit guère. Nous avons besoin du concours des Tunisiens qui se distinguent à l’étranger. En établissant avec eux des ponts d’échanges fructueux, et en encourageant ceux qui seraient tentés par un retour au bercail. Ils détiennent un capital d’expertise précieux.
Ne part-on pas finalement pour mieux revenir. Si nous ne pouvons retenir ceux qui veulent s’installer à l’étranger, nous devons inciter au retour. Alors que de nombreux postes se dégarnissent et que des projets de pointe manquent d’élan, puisons dans ce vivier de compétences. Le coût d’une expertise étrangère serait exorbitant.
La sève d’une nation, ce sont ses ressources humaines, ses talents, ses compétences. Injecter un savoir-faire immédiatement utile, apporté par les Tunisiens à l’étranger, est un facteur de croissance. Chaque retour constituera en effet un gain de temps et de savoir. Imaginez ce que des médecins, des universitaires, des chercheurs, des ingénieurs, des juristes, des financiers, des gestionnaires, des chefs d’entreprise et autres compétences peuvent apporter d’innovant et de bénéfique. Ils ne sont pas les seuls, des professionnels de divers secteurs aussi. Une valeur ajoutée substantielle dans tous les domaines. Les premières cohortes ne seront pas très fournies, mais leurs effectifs croîtront.
Une stratégie transversale est indispensable. Il s’agit d’ouvrir largement les portes du pays aux Tunisiens qui désirent rentrer et de cibler particulièrement ceux qui répondent à nos besoins les plus urgents, en leur offrant de bonnes conditions de réinstallation. Chaque secteur aura à recenser les expertises à s’adjoindre et identifier des profils appropriés à approcher.
Un retour, il faut le réussir. Tout reposera sur une parfaite préparation, une organisation rigoureuse, et un accompagnement jusqu’à la réadaptation.
Revenir est plus difficile que partir. On part souvent seul, un peu à l’aventure et on construit sa vie. On rentre en famille, avec conjoint et enfants. C’est une grande décision pas facile à prendre. Difficile de laisser derrière soi tout un pan de vie, d’abandonner une situation bien établie et de faire le saut un peu dans l’inconnu. On part avec l’espoir de réussir. On rentre avec la crainte d’échouer.
Les freins et les motivations sont essentiels à identifier. Chaque parcours de vie est différent. Mais, dans l’ensemble, les appréhensions, comme les attentes, sont quasiment les mêmes. Méconnaissance des procédures, absence d’interlocuteur valable et manque d’informations claires taraudent les candidats potentiels au retour. La promesse d’une vie meilleure au pays est à la clé.
Un dispositif puissant, porté par le gouvernement dans un engagement résolu, doit œuvrer pour vaincre les réticences et aligner des incitations de poids. Les questions à résoudre ne sont pas simples : des aides au déménagement, au transport, à la réinstallation, aux frais de scolarité des enfants dans des écoles étrangères, à l’installation en activité privée ou à la création d’entreprise, viennent en tête de liste. Suivent aussi la franchise douanière totale, l’assurance-maladie dès l’arrivée, l’équivalence des diplômes, la levée des barrières à l’accès aux concours de recrutement (université, haute administration, etc.), la régularisation de la situation fiscale, la validation des périodes travaillées à l’étranger, la carte de séjour du conjoint étranger, et autres.
Des coûts élevés sont à prévoir. Ils sont à inscrire au titre de l’investissement. L’Etat doit savoir se rendre généreux et accueillant. Un vis-à-vis unique, opérationnel, décisionnaire, est seul capable d’échapper à la nasse des procédures complexes et des délais chronophages. Les premiers témoignages viendront alors crédibiliser le dispositif et encourager les autres.
Il n’y a de richesse que nos talents. Les Tunisiens à l’étranger sont un gisement précieux d’expertise. Sachons-les ancrer de nouveau dans leur terroir et les mettre à contribution.
Taoufik Habaieb