Tahar Bekri: Le poète et les Maîtres de la poussière
Je ne vous laisserai pas remplir mes vers
De tristesse brûler mes champs de coquelicots
Casser mon piano confisquer les oliviers
De mon grand-père abattre mes étoiles
Par vos étincelles marcher sur mes ailes
Je ne vous laisserai pas Dieux des armes
Tirer sur mes pierres utiliser mes palmes
Pour vos feux réduire ma terre à des cimetières
Couvrir le rire des enfants par vos balles
Noyer la mer par vos naufrages
Je ne vous laisserai pas ondes mensongères
Voler mes frontières détruire mes collines
Salir mon thym vos bottes par-dessus
Mon corps jeté dans le vide les réfugiés
Par milliers les toits par terre
Je ne vous laisser asphyxier mon ciel
Par vos fumées étouffer l’air enterrer
Mes rêves de beauté assourdir mon chant
Par vos cuirasses qui bombent le torse
La nuit réveillée en sursaut
Je ne vous laisserai semer les vautours
Par-dessus mes blés détourner les flots
Avilir le cyprès près de mon puits
Dresser les murs contre mes paysages
Retenir la fragrance de mes citronniers
Je ne vous laisserai maîtres de la poussière
Abattre mon poème élevé comme un œillet
Au seuil de la porte pour accueillir vie
Et lumière Dites à votre expansion oublieuse
De l’Histoire qu’elle ne cesse de falsifier la mémoire