News - 04.09.2024

Edito: Solidaires

Edito: Solidaires

L'élection présidentielle s’impose à l’actualité, alors que les Tunisiens sont préoccupés aussi par des impératifs majeurs. Faire face aux dépenses onéreuses de la rentrée scolaire, surmonter la hausse des prix, payer les factures d’eau et d’électricité et subvenir aux besoins vitaux : une lutte quotidienne pour de larges franges de la population.

Ceux qui ne bénéficient ni d’une source de revenu ni d’un salaire frisent la précarité totale.

Les solutions sont loin de poindre à l’horizon. L’inflation ne fléchit pas, la croissance tarde à se redresser, l’emploi se fait rare et les salaires ainsi que les pensions de retraite s’avèrent insuffisants. Fractures, inégalités et pauvreté affichant des taux inquiétants nous interpellent.

Le système redistributif des richesses ne parvient pas à se déployer. Le budget public demeure très limité. Alors que la demande est forte.

Une urgence sociale s’installe et attend des réponses immédiates. Les programmes proposés ne sauraient résoudre dès aujourd’hui le quotidien pressant.

Comment la société tunisienne pourra-t-elle tenir? En dehors des ressources de l’informel qui dépasse la moitié de l’activité économique, la partie invisible de la survie repose sur l’entraide. Les uns soutiennent les autres, à commencer au sein de la famille. Ceux qui parviennent à gagner de l’argent en redonnent aux autres. Les montants sont souvent modestes, parfois irréguliers, mais ils constituent des secours cruciaux.

Le besoin suscite l’ingéniosité capable de créer une activité lucrative. Pour s’en sortir, les voies sont multiples : artisanat, agriculture, élevage, petits métiers… De très petites entreprises informelles naissent alors, s’échinant à trouver des financements et à écouler leurs produits. L’essentiel est de préserver la dignité et de se procurer le vital. L’économie sociale et solidaire, instituée par la loi du 30 juin 2020, est encore embryonnaire. Activer toutes ses dispositions et les mettre en œuvre livrera ses grandes promesses.

L’urgence est cependant à l’entraide, le lien social le plus fort. Étendre la solidarité, l’enraciner en comportement collectif et lui imaginer de nouveaux canaux plus fluides et plus efficients pourraient réduire les tracas de la vie.

Donner, partager, aider, secourir, parrainer et redonner espoir est impératif. C’est incarner un sens élevé de la responsabilité, en réponse à la montée de l’individualisme et de l’exclusion. En ces temps de fragilités et de d’incertitudes, tendre la main à l’autre le tire de sa détresse et raffermit la cohésion de la société.

A chacun son initiative, son action, sa forme de soutien. Être solidaire, c’est faire prévaloir les valeurs humaines. Les Tunisiens sont moulus dans les vertus de l’entraide. Ils en offrent, au fil des générations, d’édifiantes illustrations, souvent dans la discrétion la plus absolue.

L’ampleur des besoins exige plus d’implication. Donner, ce n’est pas seulement remettre de l’argent. C’est aussi prêter écoute et attention, accompagner et veiller sur les autres. Au-delà de l’urgent, c’est souvent apporter des solutions. Partager, ce ne sont pas seulement des biens, mais aussi des valeurs, un regard nouveau sur notre mode de vie et de consommation, sur l’environnement, le respect de la nature et notre rapport à la durabilité. Aider, c’est aider à comprendre le monde nouveau qui s’annonce, ses enjeux, ses risques et ses opportunités.

La solidarité est aussi à revendiquer dans nos relations internationales. L’inscrire au cœur des principes fondateurs, l’exiger dans la coopération, la concrétiser dans la prévention des changements climatiques et l’assurer dans le respect des droits humanitaires : nous ne saurons y renoncer.

Le plus grand effort urgent est cependant à accomplir en Tunisie, aujourd’hui même, en faveur de ceux qui sont dans le besoin. Donner, c’est la générosité de l’âme.
La bienfaisance est la plus belle des vertus.

Etre solidaires, c’est être unis, pour un vivre-ensemble meilleur.

Taoufik Habaieb