Habib Hamza, le don de soi sans modération
Dans une note de lecture publiée par notre confrère Le Temps, dans son édition du mercredi 31 mai 2023, Mohamed Kilani porte un regard du livre du Docteur Habib Hamza: «Itinéraire d’un Mahdois». Plus qu’une lecture, un témoignage aussi.
Par Mohamed Kilani - J’ai connu Habib Hamza il y a quinze ans. Médecin de son état, il s’est présenté en tant que président de l’Association de la sauvegarde de la Médina sollicitant une subvention de la banque. L’homme, affable, courtois, vous conquiert d’emblée sans le moindre effort. Il ne sur joue nullement son statut de spécialiste en gastrologie et reste dans le couloir assigné à l’objet de la visite. Un militant dans l’associatif est souvent perçu comme une âme investie d’un sacerdoce qui oblige le vis-à-vis à une certaine adhésion via l’écoute et l’empathie. Depuis lors, l’homme a conquis chez moi une place qui sera de plus en plus grande avec les témoignages concordants à son sujet recueillis partout.
A la lecture du livre Itinéraire d’un Mahdois, je m’aperçois de la véritable épaisseur de l’homme. Et la première sensation provient de la légitimité de la production car le parcours de l’homme, jalonné de péripéties exceptionnelles avant même sa naissance, mérite non seulement d’être porté à la connaissance du public, mieux: il doit susciter des vocations et éveiller des consciences. Flaubert disait: «Faisons de notre nous-mêmes un résidu sublime pour nourrir la postérité.» C’est ce que Habib Hamza a cherché à incarner depuis qu’il a estimé nécessaire d’effectuer une ristourne de ce qu’il a reçu de la vie.
Pourtant, l’adversité s’était acharnée à son sujet: son père est décédé cinq mois avant sa naissance et sa mère, trois jours après sa venue au monde. L’orphelin sera sauvé en compagnie de son frère par ses grands-parents maternels. Il ne cessera alors de gravir tous les paliers avec la détermination de donner un sens à son existence, se vengeant en douceur de la malchance et transformant l’adversité en challenges successifs. Le livre nous invite alors à un long voyage, escale par escale, étape par étape dont le fil conducteur est constant: le goût de l’effort, la recherche de la performance, le service d’autrui, avec en filigrane le combat ininterrompu pour Mahdia. C’est une véritable saga que ce livre autobiographique fort méritoire et qui ne manquera pas de surprendre les amis de Habib Hamza eux-mêmes, tant la discrétion, l’humilité et la pudeur l’ont caractérisé tout le long de son action acharnée pour que Mahdia soit cette très belle ville grâce à ses initiatives et la pression qu’il a exercée sur les pouvoirs publics pour les amener à adhérer et à agir. La meilleure illustration est fournie par son influence enveloppée et productive sur Ben Ali pour l’assainissement de la Sebkha Ghayadha qui a sauvé tout l’écosystème de la ville, ainsi que l’embellissement de Mahdia par la plantation de deux mille palmiers, oui deux milles. Enorme réalisation de la part d’un seul homme et qui est ajoutée aux belles touches apportées à la Médina, à l’écosystème dunaire et aux allées tout le long de la Corniche qui ont rendu la vie des Mahdois plus confortable, ainsi que le séjour de ses enfants partis ailleurs ou des visiteurs plus agréable. Pour rendre Mahdia moins enclavée, la création de plusieurs institutions universitaires sont également à l’actif de cet homme infatigable, que rien n’a jamais découragé ni démobilisé, même au sein des centres du pouvoir régional ou central.
Les villes tunisiennes qui ont une âme pour leur authenticité ne sont pas légion. Carthage, Kairouan, Tozeur, Sidi Bou Said, Mahdia tiennent sans doute la palme. Avant Habib Hamza, deux autres Tunisiens ont œuvré pour rendre ses lustres à chacune de leur ville: le Kairouanais Brahim Chabbouh, le Tozeurois Abderrazak Chraiet. Autrement dit, la volonté d’un homme suffit parfois pour réaliser des prodiges malgré la résistance du milieu ou la léthargie de l’Administration. Parce que c’est un homme qui a toujours habité au-dessus de lui-même pour servir Mahdia et les Madois, surtout les indigents, Habib Hamza mérite une reconnaissance et une consécration de son vivant: qu’une artère à Mahdia porte son nom. C’est le meilleur moyen pour honorer l’homme et un argument de taille pour créer des émules ou susciter des vocations.
Itinéraire d’un Mahdois
De Habib Hamza
Editions Leaders- 32 DT
Disponible en librairies et sur www.leadersbooks.com.tn
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