Kamiss, niquab et Falluja sont faits pour autre que la Tunisie
Par Lilia Bouguira - De toute cette poudrière que met à nu Sami Fehri dans son feuilleton "Falluja" paradoxalement à grande audience et à grande polémique, je m'essaie à la critique. Un jeu de rôle attachant surtout ceux des gamins et quelques autres personnages que j’aime à croire qu'ils existent encore dans ce monde de brutes.
Des gros plans doivent tirer la sonnette d'alarme.
Le personnage de Rym Riahi, celui de Brahim et de Rahma.
Des individus aux rôles importants mais le plus dangereux c'est ce vice de forme de les avoir habillé dangereusement comme si la maternité s'arrête au port du voile. Ce voile qui reste une liberté personnelle, il noue le sort inutilement comme un objectif dans les intentions de Yacoub surtout après la polémique qui a touché la vie privée de l'excellente actrice.
Il le surenchérit par ce personnage doux, grand aux carrures d'athlète et à la voix travaillée à rendre appréciable sans cri ni violence et qui s'ingénue à réciter le Saint coran pour apaiser, nous apaiser comme dans une tournante soufi. le personnage de Brahim se résumerait donc à un homme-ange habillé intentionnellement à l'afghanne. Kamiss sur tenue de sport et basket. Une barbe qu'il entretient proprement mais surtout cette espèce de 3araquiya blanche sur la tête.
Le tout couronné d'un port particulièrement typique aux frères musulmans, le regard fuyant presque dans les souliers et cette voix ni trop perçante ni trop forte mais dans un juste milieu à minima mais qui se veut moralisatrice.
Brahim nous est servi comme un saint que le diable même n'arriverait pas à faire tomber malgré les tentations, même pas la très jolie gamine qu'il a pris chez lui sous sa coupe, héberge jour et nuit pour lui sauver la vie et peut être l'honneur.
Je ne m'attarderai pas trop sur ce niquab que la petite Rahma porte pour sortir dans la rue et se couvrir des regards intrus.
Il est et restera hors nos mœurs toujours d'actualité afghane et qui a eu son apogée en post révolution quand nos femmes ont été ballotées entre endoctrinement religieux et le mariage enniquah.
Certes, le feuilleton est moderne et traite des drames que vivent nos jeunes au quotidien. Il nous invite à beaucoup de messages de réflexion et de remise en question de toute une société qui part en vrille. Cela aurait été un bon feuilleton tout simplement hormis quelques coquilles.
Cela aurait été bien, voire top dans un objectif d'art engagé. Ce choix du titre qui choque nous ramène aux zones de conflit au courant religieux terroriste. Ces recours à la religion et ces tenues vestimentaires à l'afghanne qui nous ramènent à la Ouma, l'Etat islamique. Un fin fil de confusion entre la piété, la foi qui voudraient prendre ses marques dans ces distinctions vestimentaires. Par ce jeu dangereux, il risque d'enfoncer les plus vulnérables dans un monde rigoriste qui ne sera jamais à la tunisienne.
Ces choix sont du flop purement flop pour ne pas me méprendre sur les intentions de la réalisatrice et du proprio de la chaine.
La fiction aussi peut être dangereuse et destructrice si elle n'est pas corollé à un art engagé et constructif.
Gardons en mémoire le massacre d'Hiroshima.
J'aime à croire que Sami Fehri comprendra un jour que ce n'est pas une simple télé qu'il possède mais une arme à double tranchant comme le nucléaire d'Einstein et les autres. Bon, la comparaison est peut-être trop osée et c'est fait exprès. Tout cela pour lui dire s'il vous plait ménagez notre société souffrante et qui peine à tenir debout. Respectez nos codes sociaux. Rahma aurait pu jouer avec un sefsari et une khama à la tunisienne et Brahim avec une jebba ou une blouse de travail à la djerbienne tout simplement.
L'image est aussi dangereuse qu'une arme à feu car elle reste dans l'imaginaire de chaque individu comme une bombe à retardement. Soit elle générera de l'énergie et perpétuera des vies soit elle détruira tout au passage.
Secouez, choquez voire buzzez à votre aise et faites votre argent mais faites du solide comme vous invite à réaliser ce discours de Bourguiba que vous avez judicieusement énoncé.
Ne vous retournez pas un jour avant votre fin devant les dégats sociétaires engendrés pour dire un peu comme Einstein le pacifiste:" j’aurai aimé être plombier ou colporteur."
Voilà j'espère avoir tout dit et surtout fait une critique citoyenne.
Ps: je sais le feuilleton n'est pas terminé mais la fin est une affaire de style et d'ascenseur émotionnel pour capter le public. Le tout a été déjà dit.
Lilia Bouguira