News - 03.01.2023

Qatar 2022: La défaite du boycott et l’émergence du «Sud Global» (Album photos)

Qatar 2022: La défaite du boycott et l’émergence du «Sud Global»

Par Samy Ghorbal - La finale France-Argentine du 18 décembre, à Lusail, laissera une marque indélébile dans la riche histoire du football. Elle a conclu en apothéose quatre semaines de compétition qui ont tenu en haleine la terre entière, jusqu’au président des États-Unis, Joe Biden, qui s’est offert un break avec le Premier ministre marocain Aziz Akhennouch pour regarder la demi-finale des Lions de l’Atlas, magnifiques représentants de l’Afrique et du monde arabe, qui se sont invités pour la première fois dans le dernier carré d’un mondial. À l’heure du bilan, il y a plusieurs vainqueurs et un seul perdant.

Premiers vainqueurs : les Argentins, bien sûr, et en tout premier lieu Lionel Messi, Angel Di Maria, buteurs en finale, et Emiliano Martinez, le gardien controversé, auteur d’un arrêt miraculeux à la 120e minute, et qui a encore démontré son appétence pour l’épreuve des tirs au but. L’Albiceleste en voulait plus. Elle était portée par un supplément d’âme et d’agressivité, par son peuple fervent, et par la quête d’absolu de son génie, Messi, qui nous a offert un crépuscule flamboyant. Elle mérite son titre, aucun amoureux du football ne s’en plaindra. Sevrée de victoires depuis 2002 – une éternité -, l’Amérique du Sud remonte enfin sur le toit du monde. 

Vainqueurs, aussi, les Bleus de l’équipe de France, qui, après un tournoi solide, ont sorti un match de légende à partir de la 70e minute. Kylian Mbappé a été phénoménal de talent (on le savait déjà), de force mentale (deux penaltys et un tir au but marqués en finale !), et de rage de vaincre. En témoigne sa tristesse à l’issue de la rencontre. Le titre de meilleur buteur ne le consolera pas, mais sera une empreinte de plus dans la trace qu’il laissera dans la mythologie de son sport. Pourtant décimée par les blessures, la sélection de Didier Deschamps a été à deux doigts de réaliser un exploit jamais vu depuis le Brésil du roi Pelé: gagner deux fois de suite la Coupe du monde.

Vainqueur, enfin, le Qatar, pour le tournoi qu’il a su offrir. Décriée dans les médias occidentaux, l’organisation qatarie, sobre et conviviale, a été saluée par la plupart des supporters présents, mais aussi par les suiveurs. Les enceintes parfaites et le format resserré de l’épreuve ont permis aux fans et aux journalistes d’assister à plusieurs rencontres dans la journée. Au fil des matchs, les polémiques, si présentes au début du tournoi, ont été balayées. Et l’enthousiasme a même fini par gagner les pays où la compétition avait d’abord été pratiquement bannie de l’espace public au nom du politiquement correct… 

Cette 22e Coupe du monde aurait pu n’être qu’une excentricité exotique, un caprice d’émirs avides de soft power et de reconnaissance. Elle entre dans la légende du football moderne. Avec les mondiaux mexicains de 1970 et 1986, elle restera comme l’une des plus belles sinon la plus belle des Coupes du monde. Palpitante, renversante, différente du début à la fin. Son scénario incroyable, favorisé peut-être par la main invisible de la Fifa et un arbitrage plus équilibré au profit des petites équipes, y est pour beaucoup. Mais la ferveur communicative des supporters arabes, sud-américains et asiatiques, transcendés par les résultats de leurs équipes, ont transformé cet événement en un symbole beaucoup plus puissant : celui de l’émergence d’un Sud Global face à une Europe rabougrie.

À l’heure du bilan, donc, il n’y a qu’un véritable perdant, c’est le camp du boycott. La féroce hostilité des médias, des politiques et du monde associatif européen a certes abîmé l’image du Qatar sur le Vieux Continent. Mais elle l’a fait grandir ailleurs. Excessif, obscène, le Qatar bashing a créé des solidarités insoupçonnées – en témoigne la présence ostentatoire de Mohamed Ben Salmane à la cérémonie d’ouverture. La déconfiture des équipes européennes les plus virulentes (le Danemark, l’Allemagne…) a ajouté au sentiment d’un monde qui bascule. L’Europe a perdu bien plus qu’une Coupe du monde. Elle a perdu sa supériorité, son privilège moral, et a précipité sa rupture avec un Sud Global devenu hermétique à ses indignations.

Samy Ghorbal

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