Me Hatem Mziou: Un nouveau bâtonnier qui met la barre très haut
Fils de parfumeur, tradition familiale perpétuée de longues générations, Me Hatem Mziou, nouveau bâtonnier des avocats de Tunisie, a le nez fin. Ce don de sentir, ressentir et pressentir l’a toujours servi depuis sa prime enfance, en toute finesse. Aucune fragrance ne lui est étrangère. Bien informé, sachant tout ou presque de ce qui se passe dans la profession, comme dans le pays, rien n’échappe à sa vigilance : toujours au parfum. L’emportant sur Me Boubaker Ben Thabet au second tour d’un scrutin serré, il a su mobiliser ses confrères avides de porter un indépendant à la présidence du conseil national de l’Ordre des avocats, rompu aux arcanes de la profession et attaché à une ligne professionnelle rigoureuse. Le 23e bâtonnier tunisien depuis Me Mustapha Kaak en 1947, succédant à Me Brahim Bouderbala, met la barre très haut.
50 ans, à peine bouclés le 9 août dernier, dont quinze ans au sein des structures de l’Ordre, d’abord à Sfax, puis à Tunis, Me Hatem Mziou affiche un profil bien approprié. Dans un parcours quasiment sans faute, il a su gagner la confiance des siens et leur respect. Il en aura beaucoup besoin pour relever tant de défis qui l’attendent.
Le sens de la justice était chevillé au corps du futur Me Mziou depuis son enfance, alors élève à l’école Anatole-France, au quartier Picville, à Sfax. Son père Si Hassen, talentueux et laborieux, avait fondé sa propre unité de parfum et de sirops dans la pure tradition familiale de grande réputation. Très respecté et consulté pour sa sagesse, il lui avait inculqué, ainsi qu’à ses deux autres frères et à sa sœur, les valeurs de l’équité, en plus de l’intégrité et de la droiture. De sa maman, affectueuse, intelligente et sensible, il a hérité les vertus de la patience, de l’entraide et de la solidarité. Orphelin de mère à l’âge de 11 ans, le jeune Hatem s’érigera toujours contre toute forme d’injustice, respectueux des droits des plus faibles, se rangeant du côté de tout opprimé. Ainsi naquit sa passion naturelle pour le droit, et sa volonté d’y faire carrière.
La chance d’avoir eu de grands maîtres
Sa bonne moyenne obtenue au baccalauréat réussi au lycée de garçons de Sfax autorisait Hatem Mziou à choisir une grande filière scientifique, médicale ou d’ingéniorat. Il préfèrera s’inscrire en droit et choisira la faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis. «J’ai eu la chance d’appartenir à cette génération d’étudiants qui a eu pour maîtres d’éminents enseignants tels que Abdelfattah Amor, Ali Mezghani, Slim Laghmani et Farouk Mechri, mais aussi Mohamed Charfi, Yadh Ben Achour, Kalthoum Mziou… confiera-t-il à Leaders. Ils ont enraciné davantage en moi le sens du droit, la valeur de la justice et l’attachement aux valeurs universelles.»
«Je ne me limitais pas à la bibliothèque de la faculté, ajoutera-t-il, je complétais mes lectures et recherches au Campus où je multipliais les contacts avec d’autres étudiants et suivais de près l’effervescence politique régnante, me gardant de ne rallier aucune faction.»
Son stage d’avocat marquera sa carrière. «Ma deuxième chance a été d’être accepté au cabinet de Me Hédi Mahfoudh (le père de Fadhel Mahfoudh), un éminent juriste, nous dit-il. D’emblée, il m’a initié non seulement aux bonnes procédures et pratiques, mais aussi aux excellentes règles confraternelles. Sans cesse, il me recommandait d’œuvrer au service de la profession, de m’associer aux structures de l’Ordre et de m’y investir dans l’intérêt général.»
Au cabinet et à l’Ordre
Son temps, il le consacrera alors à son cabinet d’avocat et à son engagement au sein de l’Ordre. Rejoignant la section de Sfax dont il se fera élire membre dès 2007, il en sera successivement secrétaire général (2010), puis président (2016). Ses confrères l’éliront en 2016 trésorier du conseil national de l’Ordre, puis secrétaire général (2019). Il ne lui restait plus qu’à franchir le couloir des bureaux de l’Ordre, au Palais de Justice de Tunis, pour quitter son bureau de secrétaire général et s’installer dans celui de bâtonnier.
Tout change alors pour Me Mziou, sans que rien ne change en fait. Certes, il doit se consacrer désormais à plein temps à sa nouvelle charge. Certes il doit quitter aussi Sfax et s’installer à Tunis. Mais, il y était déjà préparé, effectuant déjà la navette chaque semaine entre Sfax et Tunis, s’allégeant progressivement de son cabinet, et passant le plus clair de son temps au siège de l’Ordre. Affable, courtois, consensuel, il a toujours été à l’écoute de ses confrères, à leur service.
Faire entendre la voix de la profession
Ce qui changera le plus cependant pour lui, c’est la pression du temps. Investi à la tête de la profession, le bâtonnier Mziou sait quelle lourde responsabilité lui pèse désormais sur les épaules. Il doit faire juste et vite. Animé de grandes idées avant-gardistes, soucieux d’apporter une grande valeur ajoutée à tous les niveaux, il se doit de mobiliser les avocats pour entreprendre des réformes essentielles et résoudre de grandes problématiques. Amender la loi relative à l’exercice de la profession, restructurer et renflouer la Caisse de prévoyance et de retraite des avocats (Capra), soutenir les jeunes avocats viennent en tête de ses préoccupations. Mais, il y a toute une série d’autres questions importantes à résoudre.
«J’espère pouvoir réunir un large consensus sur les solutions appropriées, et nous faire écouter auprès des autorités», conclut le bâtonnier Mziou avec conviction et espoir.
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