De «la porte» à «Elloud»: Dr Jeddi, le médecin cinéaste, a le vent en poupe
Par Aïssa Baccouche - Une approche par le corps dans la psychologie sociale à travers les manifestations diverses des comportements et ce qui en a découlé par le passé à savoir un attachement viscéral à l’identité culturelle : telle est la trame déboulée par Dr Essedik Jeddi* à travers la construction de bateaux aux ils Kerkrnah et particulièrement celle de l’embarcation «Elloud».
Seuls les hommes expérimentés qui possèdent le savoir-faire sont à même de déchiffrer les secrets de fabrication notamment ceux du bois spécial, des voiles aux couleurs noir et blanc symboles d’une obédience déterminée.
Confectionnée également avec une précision inouïe par des femmes qui ont vécu elles aussi cette épreuve, cette œuvre vient en écho à la loi de la mer qui est le miroir de l’homme en face de la nature.
Le film réalisé par Dr Jeddi nous fait vibrer des instants d’intense fierté au moment où le loud accosté majestueusement accueilli par les youyou des femmes et les cris de joie des enfants au milieu d’une foule émerveillée par cet évènement mémorable.
Lorsqu’on se remémore les images de ce film l’on ne peut ne pas les rapprocher du rituel relaté dans le journal «Le Monde» en date du 05 Juillet 2022 et se rapportant à la région andine du Cuzco au Pérou où les habitants reconstruisent chaque année au mois de juin un pont suspendu réalisé entièrement en fibres végétales.
«Le pont, déclare l’un d’entre eux, est le cordon ombilical des communautés que symbolisent les tissus entrelacés».
Quand le travail est achevé, un cri de victoire retentit dans le canyon, une exclamation à laquelle répondent les femmes et les curieux. Exactement comme celui qui se produit de ce côté-ci dans l’archipel kerkenien. Pérou si lointain et pourtant si proche!
Mais auparavant, Dr Jeddi a entamé sa «carrière» de cinéaste en réalisant un film «la porte» qui a trait aux répercussions directes d’une thérapie initiée par lui-même à l’hôpital psychiatrique d’ERRAZI auprès d’une population de patients atteints par les maladies de l’amnésie, du repli sur soi et de la schizophrénie.
Ce faisant, il a réussi à promouvoir une catharsis efficiente pour rétablir au sein de cette population l’équilibre perdu.
En organisant de telles rencontres Dr Jeddi aura permis ainsi à ces marginaux sociaux de faire jaillir des sentiments jusque-là introvertis à travers les expressions physiologiques tels que le rire, les pleurs, la danse...
Aïssa Baccouche
* Dr Essedik Jeddi est psychiatre. Il a enseigné à la Faculté de médecine de Tunis. Il est l’un des fondateurs de la société Tunisienne de psychiatrie. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages dont « Corps en psychiatrie ».
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