News - 11.08.2022

Tunisie: En ces temps difficiles, soyons tous des citoyens responsables

En ces temps difficiles, soyons tous des citoyens responsables

Par Ridha Bergaoui - La Tunisie dispose de nombreux atouts: une étendue de plus de 16 millions d’hectares avec des paysages variés et très beaux, un littoral d’environ 1300 km avec des plages de sable magnifiques, des potentialités agricoles importantes, une situation géographique exceptionnelle, une histoire longue de plus de 3000 ans avec une succession de nombreuses civilisations qui ont marqué toute l’humanité et une population jeune dynamique et éduquée où la femme occupe une place primordiale.

La tolérance, la patience et le calme sont parmi les traits qui caractérisent le Tunisien. La nonchalance, le manque de respect du bien public (البيليك رزق), l’indiscipline et l’égoïsme sont malheureusement des défauts qu’il faut reconnaitre. À la moindre faiblesse des contrôles, le Tunisien se relâche et fait ce qui l’arrange le mieux. La conduite au volent et l’irrespect complet du code de la route sont un exemple bien révélateur de la mentalité de nos concitoyens.

Malheureusement, la Tunisie passe par une période sensible, des crises et des difficultés socio-économiques graves. La sécheresse et les menaces climatiques, la dépendance alimentaire et énergétique, l’épuisement des ressources, la faible croissance économique, l’émigration et la fuite des compétences… sont autant de dangers qui nous guettent et dont les effets déstabilisateurs commencent à se sentir.

Pour éviter le pire, il est temps que le Tunisien change de comportement et qu’il fasse preuve de plus de responsabilité et de civisme.

Préserver l’environnement

Le Tunisien éprouve peu de respect pour son environnement. Autant, il veille à la propreté de son logis et de son alimentation, autant il est négligent et se souci très peu de la propreté de son quartier ou de sa ville. Il se permet parfois l’impardonnable (comme jeter ses ordures partout ou se débarrasser des déchets de construction au beau milieu des routes. Bouteilles plastiques vides, mégots de cigarettes, papiers et emballages sont balancés n’importe où. Des couches de bébé usagées, des restes de pastèque et autres fruits, des cannettes vides et divers déchets sont abandonnés sur les plages, parfois recouverts de sable… et autres ingéniosités purement locales).

Le comble c’est qu’il se plaint de la saleté en jugeant que les services publics et les collectivités sont seuls responsable et manquent à leurs devoirs.

La gestion des déchets est certes un vrai problème national et local. Il se pose d’une façon aigüe surtout avec la saturation des décharges et le manque de moyens humains et matériels des collectivités pour le ramassage des ordures dans les bonnes conditions. A cause des nuisances (olfactives, sonores, esthétiques, risque de maladies…), de plus en plus de citoyens refusent la création de décharges près de chez eux et exigent même la fermeture de l’existant.

Le recyclage et la valorisation des déchets est certainement la solution. Toutefois, le citoyen à un rôle important à jouer en, d’une part essayant de réduire la quantité de déchets produits et d’autre part par un meilleur comportement.
Adopter de petits gestes peut améliorer grandement la situation.

Ne pas jeter ses déchets dans la rue. Les petits emballages, les bouteilles vides, les morceaux de papier… doivent être placés dans des poubelles entretenues par les municipalités.

Ne pas jeter ses mégots n’importe où. Dans de nombreux pays avancés, il est interdit de fumer dans les endroits publics. Dans la rue, des cabines sont spécialement aménagées et équipées pour les fumeurs.

Là où on va (à la plage, en randonnée, au jardin et autres lieux publics), prévoir un sac pour ramasser ses déchets et laisser sa place propre

Placer son sac poubelle dans le container et non le balancer à côté.

Sortir sa poubelle à l’approche de l’heure du passage du camion de ramassage des ordures

Réduire le volume de ses déchets et si possible composter ses déchets organiques (déchets de fruits et légumes, restes des repas...)

Utiliser le moins possible les sacs en plastique et les emballages à usage unique. Préférer le couffin traditionnel pour vos courses ainsi que les emballages recyclables.

Eviter de jeter sa vieille literie, ses vieux meubles et ses vieux appareils électroménagers dans la nature, donner les s’ils sont encore en bon état ou les vendre aux commerçants des objets usagés

Donner le bon exemple à ses enfants et les sensibiliser à la nécessité de préserver la propreté de notre environnement.

Sécheresse, manque d’eau et risques d’incendies

Le monde vit un dérèglement climatique sans précédent. Des macro-incendies ravagent partout de grandes étendus de forêts et de champs de culture surtout en cette période estivale. De la canicule et de la sécheresse frappent énergiquement et de nombreux pays sont obligés de restreindre l’usage de l’eau, le rationner et le réglementer.

La Tunisie est pleinement exposée à ces perturbations climatiques, la sécheresse et les risques d’incendies. Malheureusement nos concitoyens semblent ignorer la situation et les autorités réagissent mollement. Alors que de nombreux pays décrètent des plans sécheresse et des alertes maximales.

Le tunisien continue à vaquer à ses habitudes comme si de rien n’était. Il se plaint toutefois des montants élevés de la facture d’eau et traine le pas pour payer sa consommation. Il se révolte pour exiger son droit à l’eau et l’électricité dès qu’il y a une quelconque perturbation de l’approvisionnement ou de la qualité du service ou celle de l’eau en cette période de très forte consommation.

L’eau représente un bien public qu’il faut utiliser à bon escient. Un grand effort de sensibilisation est nécessaire pour appeler nos concitoyens à éviter le gaspillage et les amener à des comportements responsables.

L’adoption de gestes simples, bien connus, permettent de réduire notre consommation journalière et faire de fortes économies d’eau.

Réparer les robinets et les circuits qui fuient

Fermer les robinets dès qu’on n’a pas besoin de l’eau

Opter pour des équipements et des appareils électroménagers économes d’eau

Prévoir des douches et non des baignoires

Penser à installer ou construire des réservoirs d’eau de pluie

Laver la voiture au seau et non au tuyau

Ne pas arroser son jardin aux heures de fortes chaleurs

Eviter de remplir les piscines en cette période de sécheresse

En été et avec la sécheresse, les risques d’incendies croissent très rapidement. La plupart des feux de forêt sont dus à des négligences humaines. Par ailleurs, en cas d’incendie, plus on intervient rapidement moins il y a de dégâts.

Avec un peu de bon sens et de bons gestes, il est possible d’éviter de nombreux incendies. Ne pas jeter des restes de cigarettes dans la campagne et aux bords des routes, ne pas allumer de feu, essayé d’éteindre un départ d’incendie et prévenir les autorités pour intervention. Pour les agriculteurs, il faut éviter d’utiliser des machines ou des travaux sources d’étincelles aux abords des végétaux secs et être toujours prêt à combattre un feu éventuel.

Un effort de sensibilisation, d’éducation et de formation du public est nécessaire pour lui apprendre à prévenir et lutter contre les incendies d’autant qu’avec la sécheresse, les risques ne cessent d’augmenter.

L’énergie, de plus en plus chère

Les énergies fossiles tendent à devenir de plus en plus rares et chères. Les crises successives ont aggravé la situation d’autant que la Tunisie est largement déficitaire et doit importer son pétrole et une grande partie du gaz nécessaire à la fois pour la consommation directe que la production d’électricité.

Le consommateur se plaint souvent de la facture de l’électricité et du gaz et pense qu’on est en train de le voler. Il est cependant possible de réduire sa consommation énergétique :

Penser au photovoltaïque et solaire

Utiliser des ampoules LED plus économes

Eteindre la lumière dès qu’on sort du local

Opter pour des appareils électroménagers peu énergivores

Ne pas abuser de l’ouverture du réfrigérateur

De préférence le soir éteindre les appareils en veille (TV, ordinateur, chargeurs branchés…).

Le chauffage comme la climatisation doivent être utilisés d’une façon raisonnable et avec des réglages adéquats. Il est nécessaire également d’entretenir et de vérifier le bon fonctionnement de ses appareils.
En Tunisie, il est grand temps de penser à l’étanchéité thermique de nos constructions et nos spécialistes du bâtiment sont appelés à trouver des solutions adéquates et pas chères.

Penser également réduire sa consommation de carburant en essayant de ne pas abuser de la voiture, marcher à pied si possible, et recourir aux transports en commun ou le covoiturage.

La sensibilisation est importante

La sensibilisation et l’information du citoyen est importante. Il est nécessaire de développer chez nos concitoyens la culture du respect de l’environnement, des biens publics et la lutte contre le gaspillage aussi bien de l’eau, de l’électricité mais également le gaspillage alimentaire (particulièrement le pain).

Des campagnes de sensibilisation doivent être organisées avec la contribution des médias et de la société civile afin de renforcer la prise de conscience des difficultés auquel le pays est exposé et de la nécessité de les surmonter ensemble.

Nous sommes tous concernés. Il est indispensable surtout de développer chez nos jeunes le sens du civisme et œuvrer pour la formation de citoyens responsables qui respectent la loi et qui pensent et agissent pour leur bien mais aussi dans l’intérêt de la communauté. A la fois à la maison et dans les établissements scolaires, les jeunes doivent être sensibilisés à l’importance de la protection de l’environnement, aux faibles ressources du pays et à la nécessité de les préserver et bien les gérer.

Le citoyen a certes des droits mais également des devoirs auxquels il n’a pas à se dérober. Il est nécessaire de revoir notre relation avec la collectivité et l’Etat. Il ne doit pas y avoir de conflit mais plutôt partage des responsabilités et une participation active du citoyen dans la gestion de son cadre de vie.

Prof Ridha Bergaoui
Institut National Agronomique de Tunisie