ITEC - Réévaluation des immobilisations: Des propositions concrètes pour les décisionnaires (Album photos)
Par Abderrazek Maalej * - Le worshop organisé par l’Institut Tunisien des Experts Comptables « ITEC » sur la réévaluation des actifs immobilisés a bouti à des propositions utiles. Les divergences apparues entre le Normalisateur et la législation fiscale y trouvent des solutions concrètes à même d'éclairer les zones d'ombre etde faciliter la tâche de tous.
Ouvrant les travaux, M.Moncef Boussannougua Zammouri a pointé du doigt d'emblée la différence d'interprétations et d'appréciations de la valeur réelle. "les entreprises souffrent de cet écart, at-il déclaré, qui existe entre la valeur économique des biens comptabilisés et leur valeur bilantielle.Ces écarts faussent la réalité économique de ces entreprises et créent des discordances par rapport à leurs homologues étrangers."
Effectivement, c'est un sujet fort intéressant et d’actualité.D’une part, il y’a la promulgation de la norme comptable N°05 révisée, relative aux immobilisations corporelles approuvée par arrêté du ministre des finances, publié au Journal Officiel N° 33 du 29 mars 2022, autorisant l’application du modèle de réévaluation à la juste valeur conformément aux normes comptables internationales adoptées par la Tunisie, et d’autre part, l’article 19 de la loi des finances 2019 ayant institué un régime légal de réévaluation des actifs immobilisés matériels pour les sociétés industrielles commenté par la note commune N° 26/2019 en date du 21/11/2019, ainsi que l’article 20 du décret-loi du 28 décembre 2021 portant loi de finances pour l’année 2022 commenté par la note commune N° 17 du 21/11/2019 ayant autorisé la réévaluation légale des immeubles bâtis et non bâtis des sociétés tous secteurs confondus.
Ces textes comptables et fiscaux ont été fortement applaudis par les professionnels de la comptabilité et des finances en Tunisie. L’objectif noble étant double:
• Renforcer les capitaux propres des sociétés, et atténuer les effets néfastes de l’inflation qui progresse à un rythme préoccupant en Tunisie;
• Et plus essentiellement, fournir une information financière pertinente à travers des états financiers fiables ayant une valeur prédictive et aidant à la prise de décision.
La première séance a été modérée par M. Rached Fourati, doyen des experts comptables tunisiens et francophones, et actuel président du conseil de surveillance de l’Amen Bank.
Nous avons découvert, lors de la première conférence introductive, animée par l’expert-comptable Monsieur Fayçal Derbel président d’honneur de l’Ordre des Experts Comptables de Tunisie, et grand spécialiste de la fiscalité et des normes comptables internationales.
• Que le régime de réévaluation légale, réintroduit en Tunisie après 20 ans de sa suppression, alors qu’il se trouve totalement supprimé chez plusieurs pays voisins.
• Que la valeur indiciaire de réévaluation fixée par les nouveaux décrets ne cadre pas avec la juste valeur recommandée par la nouvelle norme comptable N° 05 révisée. Il nous a présenté des cas réels frappants de divergences significatives en référence à des expertises indépendantes et fiables, pour des unités hôtelières Tunisiennes notamment.
A cette occasion, il a insisté sur:
• La nécessité d’inclure les immobilisations à statut juridique particulier qui ont été exclus par les nouveaux textes fiscaux ;
• La nécessité de concilier la norme comptable avec les dispositions fiscales.
Il a enfin encouragé les entreprises à adopter le modèle de réévaluation tout en appelant l’administration à clarifier les zones d’ombre.
De son côté, M. Abderrazak Gabsi, universitaire, expert-comptable et membre du conseil national de la comptabilité, a présenté d’une manière magistrale la réévaluation selon la norme N° 05 révisée aux différents stades de la vie de l’immobilisation. Illustrés par des cas pratiques de comptabilisation de la réévaluation.
Il a également soulevé le problème des impôts différés en découlant au cours des exercices ultérieurs à la constations de la réévaluation. A la fin, il a présenté des propositions au ministère des finances :
La deuxième séance a été modérée et présentée par Monsieur Abdellatif Abbes, expert-comptable, enseignant universitaire à l’IHEC Carthage.
Mme Habiba Louati, consultante, enseignante universitaire, et ancienne Directrice Générale de la DGELF, a développé les aspects fiscaux de la réévaluation, et a présenté la jurisprudence constante de l’administration fiscale en matière de réévaluation libre à laquelle les nouveaux textes fiscaux ont dérogé. Elle propose d’étendre l’avantage du bénéfice de la réévaluation aux personnes physiques, et aux établissements stables.
De son côté, M. Maher Gaida, expert-comptable et enseignant universitaire, a développé de manière approfondie, les problèmes liés au référentiel comptable Tunisien, la réévaluation et l’opinion d’audit.
Il a mis en évidence le conflit entre le référentiel comptable et la réglementation fiscale, les problématiques posées à l’auditeur, et la nécessité de mettre à jour le cadre conceptuel qui ne prévoie pas la notion de juste valeur.
Il a évoqué l’existence de plusieurs « justes valeurs »:
• Une juste valeur objective reflétant les attentes des intervenants externes,
• Des justes valeurs spécifiques à l’entité économique et influencées par la direction,
Il a souligné l’absence d’information pertinente sur nos marchés permettant la détermination de la juste valeur.
A la clôture du Workshop le rapport de synthèse a été présenté par Madame Nejiba Chouk, Expert-comptable, vice-Présidente de l’ITEC
Dans une perspective de rapprocher le comptable au fiscal, Le Workshop propose:
• La réévaluation des actifs immobilisés à leur juste valeur déterminée d’une manière fiable et documentée. Avec l’autorisation de la déduction du supplément d’amortissement généré par la réévaluation des biens immobiliers pour que l’avantage soit substantiel et réel.
• Dans la perspective d’une Justice fiscale, il est recommandé d’étendre le bénéfice de la réévaluation légale à toutes les entreprises soumises au code de l’IRPP et de l’IS y compris les Entreprises individuelles et les établissements stables quel que soit le secteur de leur activité : (industriel, touristique, travaux publics, sanitaire etc.…), et à toutes les catégories d’immobilisations.
• En vue d’approcher la juste valeur exigée par le normalisateur comptable, le réajustement des indices de la réévaluation légale par leur indexation périodique au taux d’inflation et aux fluctuations des cours des principales devises permettrait aux petites et moyennes entreprises qui représentent plus de 90% du tissu économique tunisien de profiter de la réévaluation et leur épargner le cout des évaluations répétitives de leurs immobilisations par des experts dédiés.
• Les zones d’ombre relevées par les conférenciers méritent des précisions de la part de l’administration fiscale à l’instar de l’application de la nouvelle réévaluation par les entreprises ayant constaté des réévaluations légales antérieures.
Enfin les intervenants ont souligné l’urgence:
• De la publication d’une norme relative aux impôts différés sur le résultat.
• La mise à jour du cadre conceptuel de la comptabilité Tunisienne de 1996 pour y inclure la notion de juste valeur.
Abderrazek Maalej
*Expert-comptable indépendant
- Ecrire un commentaire
- Commenter