En France, «aujourd’hui, c’est dur, très dur d’être arabe»
Par Mohamed Larbi Bouguerra
«C’est un crime d’exploiter le patriotisme pour des œuvres de haine.» (Emile Zola)
Ce titre est emprunté à un article du regretté Salah Garmadi, paru dans la revue Alif dans les années 1960.
Bien des Arabes vivant en France pourraient le prendre à leur compte.
Certains du reste n’hésitent plus à quitter ce pays. Dans le New York Times du 13 février 2022, on lit : «Dans la campagne présidentielle française, on ne parle que d'immigration. Mais c'est l'émigration croissante des musulmans français qui révèle une crise plus profonde pour le pays… Cette fuite n'a pas été remarquée par les politiciens et les médias, même si les chercheurs affirment qu'elle témoigne de l'incapacité de la France à offrir une voie d'avancement même aux plus performants de son principal groupe minoritaire, une "fuite des cerveaux" de ceux qui auraient pu servir de modèles d'intégration. Ces personnes finissent par contribuer à l'économie du Canada ou de la Grande-Bretagne", a déclaré Olivier Esteves, professeur au centre de sciences politiques, de droit public et de sociologie de l'université de Lille, qui a mené une enquête auprès de 900 émigrés musulmans français et des entretiens approfondis avec 130 d'entre eux. "La France est vraiment en train de se tirer une balle dans le pied"».
Quant à cet agité de prétendant à l’Elysée, ses ancêtres et ses parents ont vécu en paix des siècles durant en Algérie, à l’ombre du croissant, préservés des sanglants pogroms si communs en Europe Centrale et dans la Russie tsariste. Aujourd’hui, il éructe : «L’Islam est incompatible avec la République » et signe un brûlot sous le titre de «Christianisme et Islam, la fausse égalité». Il écrit dans son livre «Destin français» que son père parlait arabe dans les cafés de la Goutte d’Or, un quartier populaire de Paris. Il va même jusqu’à appeler «Reconquête» son parti! Tel un Don Quichotte des temps modernes, il veut sauver la France de l’Islam et de la culture arabo-musulmane! Voilà la mission que s'assigne ce nouveau croisé! Oublieux cependant de l’époque où le Quai d’Orsay et l’islamologue Louis Massignon défendaient à Jérusalem les droits d’une «France musulmane», protectrice des musulmans d’Afrique du Nord et d’Afrique subsaharienne. Oublieux aussi du décret Crémieux qui a fait de lui un Français en soulevant indignation et oppositions féroces chez les antisémites et les racistes de tout poil de France, de Navarre et d’Algérie en 1870. Français, Crémieux dit oui à seulement 37 000 juifs algériens, mais à condition qu’ils abandonnent la religion de leurs aïeux au moment même où il refuse cette nationalité à leurs coreligionnaires du Sud comme le précise la sénatrice Esther Benbassa. Oublieux du fait que le décret Crémieux a été abrogé par ce Maréchal Pétain qu’aujourd’hui il loue et en fait un défenseur des juifs français. Oublieux enfin du fait qu’en France, ses parents l’ont placé dans une école religieuse juive. (Lire Gérard Noisiel, «Le venin dans la plume. Edouard Drummont, Éric Zemmour, et la part sombre de la République», Editions La Découverte, Paris, 2021, p.10). Ce qui ne l’empêche pas de déclarer «non français» des prénoms comme Mohammed ou Hapsatou, alors qu’Éric est scandinave et qu’il dit s’appeler Moïse à la synagogue ! Il a été condamné une nouvelle fois pour injure raciale en janvier 2022. Ce qui ne l’empêchera pas de concourir pour l’Elysée s’il décroche les 500 signatures d’élus !
Silence de mort
Toutes les ambassades arabes de Paris sont muettes comme des carpes face aux tombereaux d’ordures jetés sur nos « ancêtres fiers et dignes, doués d’enthousiasme et de passion qui, jadis, soumirent une importante région du monde, assimilèrent, dépassèrent et prolongèrent par leur génie créateur de grandes et belles civilisations étrangères » comme le disait notre regretté linguiste-poète.
Comme ces ambassadeurs et leurs gouvernements aphones sont loin de ceux qui ont vertement critiqué la vice-présidente américaine Kamala Harris, comme l’explique Piotr Smolar dans Le Monde du 5-6 décembre 2021(page 2) : «Fin septembre, elle n’avait pas corrigé un étudiant qui évoquait devant elle «le génocide ethnique auquel se livrerait Israël contre les Palestiniens» obligeant son cabinet à lancer une campagne de déminage auprès des organisations juives.»
Un aigri qui cherche a prendre une revanche
S’est-il jamais remis de son double échec à l’entrée de l’ENA ? Le voilà rongé par l’ambition. Alors, il courra les médias et deviendra leur bouffon. Choquer l’opinion pour faire de l’audience deviendra son juteux gagne-pain via la « fait-diversion » de l’actualité et grâce aux télévisions privées qui flattent à qui mieux-mieux les bas instincts.
Face au déclin des luttes sociales, en «doctrinaire obsessionnel, il ne part jamais du réel, de la France et des Français tels qu’ils sont en 2022. Tout ce qu’il pense et propose s’enracine dans la France des années 1960» écrit l’historien Laurent Joly, spécialiste de l’extrême droite. La hausse des prix de l’essence en France, l’état des hôpitaux, les maisons de retraite… Tout ce qui touche à la vie des gens ne l’intéresse pas. Parlez-moi plutôt des émigrés, des musulmans et de leurs mosquées, des boucheries halal….voilà son leitmotiv. Calomniez, calomniez…. disaient les Nazis.
Obsédé par les émigrés et l’Islam, il voudrait expulser deux millions d’étrangers au cours de ses cinq ans de présidence, lui qui vilipende «la théologie des droits de l’homme» et vomit le pouvoir des femmes et le féminisme.
Pourquoi cette inextinguible haine contre l’Islam et la culture arabo-musulmane**?
Un roman qu’l a écrit en 2006, «Petit frère», paru chez Denoël à Paris, pourrait éclairer cette attitude si proche de la pathologie. Le livre puise sa substance dans un affreux drame qui a eu lieu à Paris en novembre 2003 : le meurtre d’un jeune DJ juif par un voisin de palier arabe violent. L’auteur souffrait de schizophrénie et fut définitivement reconnu, en 2010, irresponsable pénalement en raison de l’abolition de son discernement, d’après Wikipédia. Le psychiatre affirma que le crime n’était pas «antisémite mais un acte délirant». La magistrate en charge du dossier retint la folie et rejeta la circonstance aggravante de l’antisémitisme.
En vérité, il ne sert à rien de polémiquer avec lui ni de dénoncer ses erreurs. Les arguments rationnels ont peu de chance d’atteindre ce polémiste professionnel. La Raison mettrait à terre son fonds de commerce.
Mohamed Larbi Bouguerra
** Les 16 et 17 février 2022, s’est tenue au Palais de l’UNESCO, à Paris la 2ème conférence de Paris « L’Islam au XXIème siècle » dont le thème était cette année : «Islam et identités : entre culte et cultures.» Une revue trimestrielle est consacrée à «l’Islam au XXI ème siècle» depuis 2019.