Archives des laboratoires cinématographiques de Gammarth : les inquiétudes de la Fondation Habib Bourguiba
Dans un appel adressé à la ministre de la Culture, la Fondation Habib Bourguiba fait part de son inquiétude quant aux conditions de déplacement des archives des laboratoires cinématographiques de Gammarth. Elle espère que cette action se fasse « dans les meilleures conditions sans déperdition, sous la houlette d'experts reconnus, avec un contrôle de la part d'instances compétentes qui veilleront à l'application de protocoles aussi rigoureux que spécifiques. » Aussi, la Fondation exprime sa préoccupation, faute de non-numérisation prévue depuis l’an 2000, « pour les précieux négatifs et éléments de tirage qui devraient servir au transfert sur des supports actuels. »
La lettre, en date du 4 janvier dernier, est signée par Montassar Laouiti, président de la Fondation, Mériem Bourguiba Laouiti, Mouezz H. Bourguiba, Neïla Zouiten Bourguiba, Mahdi Bourguiba, et Kaïs Laouiti, membres fondateurs.
Texte intégral
"Ayant appris par voie de presse et à travers les réseaux sociaux d'Internet que vous vous penchez activement sur la question de la sauvegarde des archives des laboratoires de Gammarth, nous tenons à vous faire part de notre soutien le plus sincère à une telle initiative visant à consolider la souveraineté nationale par le biais de la réhabilitation des images cinématographiques.
Notre Fondation s'est toujours préoccupée du sort de ces films qui concernent pour leur grande majorité les actualités tunisiennes, magazine hebdomadaire filmé, illustrant la vie politique, diplomatique, culturelle, artistique et sportive durant les premières décennies de l'Indépendance et ce, avant l'avènement de la télévision.
La construction de l'Etat moderne par Bourguiba est au centre de ce trésor patrimonial qui contient une mine d'informations pour les chercheurs et historiens des temps futurs. C'est un héritage auquel les générations d'aujourd'hui et de demain doivent se référer pour forger leur identité et leur mémoire et c'est à ce titre que nous nous sentons concernés au plus haut point par sa pérennité.
Conscients de l'importance de l'enjeu historique que représentent ces films, nous estimons que leur conservation a fait l'objet, des années durant, d'une négligence qui se traduit de manière de plus en plus flagrante par la dégradation des conditions de stockage, dans des entrepôts humides, ne répondant pas aux normes. C'est pourquoi nous nous permettons de manifester nos scrupules relatifs à la méthodologie de sauvegarde à adopter.
Nous espérons que le déplacement des bobines, annoncé par vos soins, se fera dans les meilleures conditions sans déperdition, sous la houlette d'experts reconnus, avec un contrôle de la part d'instances compétentes qui veilleront à l'application de protocoles aussi rigoureux que spécifiques.
Par ailleurs, la numérisation prévue, depuis le début des années 2000, n'ayant toujours pas eu lieu, alors qu'un sauvetage est désormais envisagé, comme s'il y avait une urgence impérieuse, nous ne pouvons que nous inquiéter pour les précieux négatifs et éléments de tirage qui devraient servir au transfert sur des supports actuels. La perte ou le déclassement de boites lors du déménagement serait malencontreux voire catastrophique car cela compromettrait la suite des opérations de mise à jour.
Comme il ne s'agit pas de positifs ou de copies d'exploitation mais d'éléments sources auxquels nous tenons comme à la prunelles de nos yeux, il faudrait pouvoir compter sur des spécialistes chevronnés et former des jeunes pour assurer sur le long terme la manipulation et le traitement de ces pellicules argentique, à la durée de vie limitée.
Votre rôle historique consiste donc à prendre les décisions les plus pertinentes en abordant ce grand chantier sur la base d'un diagnostic technique et d'une feuille de route à même d'éviter tout préjudice. Persuadés que vous réussirez là où tous vos prédécesseurs ont déclaré forfait, nous vous assurons de notre confiance tout en nous tenant à vos côtés de manière vigilante et solidaire."