Le nouvel axe: Carthage - La Kasbah
Pour la première fois depuis 2011, la Tunisie est dotée d’un gouvernement 100% pur jus Carthage, conçu par le président Kaïs Saïed en dehors des partis politiques et constitué en formule Ennahdha Zéro. Des investigations poussées devaient s’assurer de l’indépendance totale de tous les membres de l’équipe, car combien de ministres et secrétaires d’Etat présentés dans des gouvernements précédents en tant qu’indépendants s’étaient-ils en fait avérés membres du mouvement islamiste ?
Cette étanchéité par rapport aux partis est voulue par le président Saïed comme une rupture avec une classe dirigeante désuète, en déliquescence, et vouée aux gémonies. Mais aussi, elle doit favoriser l’émergence de visages neufs qui n’ont pas été corrompus par un système toxique.
Le casting-surprise est dans le style même de Kaïs Saïed. Il puise dans le vivier des compétences peu connues sous les feux de la rampe médiatique, des hommes et des femmes capables d’incarner la nouvelle vision qu’il entend imprimer et de porter le programme qu’il s’évertuera à mettre en place. La couleur est annoncée en choisissant à la tête du gouvernement une femme, universitaire scientifique de formation, rompue à la gestion de programmes de coopération avec les bailleurs de fonds, notamment la Banque mondiale, inconnue au bataillon des politicards... Le portrait-robot sert de gabarit de sélection à paramétrer en fonction des charges à attribuer aux ministres et secrétaires d’Etat.
La nouvelle architecture d’organisation provisoire des pouvoirs publics est claire. Instituée par le décret présidentiel n°2021-117 du 22 septembre 2021, elle concentre entre les mains du chef de l’Etat des pouvoirs exceptionnels, lui laissant une large marge de manœuvre. Le gouvernement, c’est son gouvernement. Il «veille à l’exécution de la politique générale de l’Etat, conformément aux directives et aux choix définis par le Président de la République» et il «est responsable de ses actes devant le Président de la République. » « Le Chef du gouvernement dirige et coordonne l’action du gouvernement.»
Un nouvel axe Carthage-La Kasbah est ainsi établi. Le président décide, le gouvernement exécute et rend compte. Une verticalité totale.
Dans l’enchaînement des séquences, la prochaine étape annoncée est celle d’un dialogue promis avec des composantes de la scène politique et de la société civile, avec une place sans doute importante aux partenaires sociaux, notamment l’Ugtt et l’Utica.
La reprise des discussions sur le programme économique est urgente. Sans l’accord de l’Ugtt et l’Utica sur les objectifs, les réformes et la démarche, les institutions financières risquent de ne pas accorder aux requêtes de la Tunisie leur confiance, donc leurs financements. Tout l’enjeu est là.
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