Tendance - 18.10.2010

Se réapproprier la Médina de Tunis : Dream City 2010, la tradition en horizon de la modernité

Dream City, un projet qui réconcilie le Tunisien urbain moderne avec sa médina, un moment de vie comme préfèrent l’appeler les concepteurs du projet, Selma et Sofiène Souissi, frère et sœur, danseurs et chorégraphes de talent qui viennent de rééditer du 13 au 16 octobre en cours le succès du premier Dream City organisé à Tunis en 2007. Voyage dans les méandres de cette aventure aux dimensions artistique et spirituelle.

De drôles de personnages ont envahi la médina de Tunis ces derniers jours. Sac au dos et carte à la main, ils se déplacent en petits groupes dans ces lieux chargés d’histoire que sont les palais de la bourgeoisie tunisoise, les places aux dalles défraîchies et les ruelles aux murs lézardés. Ces visiteurs d’une après-midi, dont certains reviendront les jours suivants, entreprennent une quête qui les mènera, au fil des escales, vers des œuvres d’art conçues spécialement pour se confondre et s’entremêler aux espaces confinés de la Médina de Tunis.

Dans une ruelle d’à peine un mètre de largeur, les vibrations d’une musique venue d’ailleurs vous pénètrent de toutes parts. L’artiste qui chante est dans le public, le touchant presque, l’interpellant. De là, on peut partir à la découverte d’une installation à Tourbet El Bey où une autre artiste réinterprète l’ascension des âmes vers l’au-delà. Sur le grand Boulevard de Bab El Menara, un  illusionniste se tient suspendu en l’air rattaché par une seule main appuyée sur un mur, des images qui ont déjà fait le tour de la toile en Tunisie.

Pour se remettre de ces émotions, l’on peut aller écouter un conte qui raconte Tunis, confortablement installé dans la maison des Binous ouverte pour l’occasion. Plus loin, des danseurs s’accrochent aux murs, se traînent et s’enlacent dans le silence d’une place antique.  Une autre villa traditionnelle, faïences aux murs et marbres sur les colonnes, s’est transformée, elle, en théâtre. Mais le public est toujours au milieu de la scène avec les interprètes faisant corps avec l’ensemble des œuvres artistiques.  Dream City est ainsi une expérience artistique vécue par le visiteur, ce qui lui permet de rêver et de sublimer sa ville au travers des œuvres d’art moderne qui la traversent et l’habitent durant ces quelques jours.

La joie de se perdre dans les ruelles de la médina

L’organisation a été assurée par des jeunes qui, toujours avec le sourire, sont parvenus à orienter et conseiller les participants à cette expédition pittoresque. Mais se perdre dans les ruelles de la Médina faisait également partie du jeu et la joie de retrouver les fameuses indications jaunes, vertes, rouge et rose était aussi forte que la recherche de sa route et les retrouvailles avec une médina avec laquelle nous avons perdu toute attache, que nous visitons sans vraiment la voir, que nous connaissons sans vraiment la regarder n’en gardant que l’image de tous ses détritus, de ses façades hideuses et de ses chats errants.

Les artistes ont débordé d’imagination pour offrir des spectacles modernes, décalés mais qui parvenaient toujours à se mouler aux décors de la médina, nous montrant ainsi la formidable capacité de cette dernière à s’adapter aux époques contemporaines. Plusieurs mécènes ont également accompagné cette manifestation dont le plus important aura été Tunisiana.

Une grande affluence, composée de jeunes et moins jeunes, aura été observée pour cette deuxième édition de Dream City. La médina de Tunis, avec ses lieux mythiques, les terrasses de ses cafés pittoresques et ses nouveaux circuits culturels, serait-elle en train de devenir le nec plus ultra, le lieu branché et à la mode où il faut être et où il fait bon être vu ? La tradition serait-elle ainsi en train de devenir l’horizon de la modernité ?

Anissa BEN HASSINE