«Great reset»: une remise à zéro pour un monde meilleur!
«Il ne suffit pas que les formules soient bonnes; ce qu'on en fait devrait aussi être bon…» Aldous Huxley.
Par Mondher Khaled - Le choc profond de la crise de la Covid-19 a remis en question la confiance des peuples dans la capacité des dirigeants à gérer et à anticiper les risques inattendus et a mis à nu de multiples dysfonctionnements dans les systèmes stratégiques de la santé, l’éducation, les finances et l’énergie.
En moins d’une année, nous nous sommes rendus compte à quel point le système économique essoufflé atteint ses limites. Explosion de la pauvreté et des inégalités, augmentation exponentielle du chômage et de la dette, destruction du climat et de la biodiversité, autant de dégâts que le modèle actuel fait subir à notre planète.
Fort de ce constat, le Forum Economique Mondiale Davos, a lancé en juin 2020, un appel à tous les dirigeants les conviant à tirer les leçons des erreurs commises durant les dernières décennies afin que les Etats, les institutions et les décideurs puissent rétablir la confiance et s’engager dans des réformes innovantes et audacieuses pour construire un monde résilient, équitable et durable.
Lors de cet appel, Klaus Schwab, fondateur et Président exécutif du dit Forum, a déclaré que le sommet de 2021 aura pour thème, le «Great Reset», vocable inspiré de son livre «Covid-19, the Great reset».
Le Sommet se propose d’inviter des Chefs d’Etat, Chefs d’entreprises, des représentants de la société civile et des jeunes leaders (Global Shapers) à amorcer un dialogue autour d’un nouveau contrat social qui honore la dignité de chaque être humain.
Le «Great reset» vise ainsi à améliorer l’état du monde dans une ère post-Covid, par le biais d’un processus de réinitialisation ou de remise à zéro du système mondial actuel qui n’est plus durable au niveau environnemental et social.
Cette initiative est un enjeu majeur et plaide en faveur de la construction des nouvelles bases du système économique et social, dont la préoccupation principale serait l’environnement, car les conséquences du changement climatique seraient dramatiques pour l'humanité et risquent d’engendrer la plus grande catastrophe naturelle.
Plaidant en faveur de la réalisation de l’Agenda 2030, dont les Objectifs de Développement Durable (ODD) convergent avec l’esprit du Great reset, le Secrétaire général des Nations unies a déclaré à l’occasion des mesures prises par l’ONU pour endiguer le Coronavirus, que «La Grande Réinitialisation est la confirmation que nous devons considérer cette tragédie humaine comme un signal d'alarme. Nous devons construire des économies et des sociétés plus égales, plus inclusives et plus durables, qui soient plus résistantes face aux pandémies, au changement climatique et aux nombreux autres défis auxquels nous sommes confrontés au niveau global».
Ceci nous renvoie à la thèse qui considère que la croissance économique exponentielle et sans limites, n’est plus possible dans un monde en cours d’effondrement. Un effondrement potentiel que les scientifiques considèrent comme inhérent à la spécificité et à la vulnérabilité de notre système si complexe, que la moindre variation pourrait entraîner, par un effet domino, des conséquences irréversibles.
Un des scénarios redoutés, est que dans un contexte de consommation effrénée, les ressources disponibles risquent de s’épuiser, en raison de l’augmentation de la consommation et de la pression démographique. La quantité de nourriture par habitant s’amenuiserait si toutes les terres arables ne suffisent plus à répondre aux besoins de consommation. La déforestation, la surcharge de pollution et l’acidification des océans qui ne seraient plus en mesure de convertir le CO2, conduiraient à leur tour à l’extinction d’une partie de la faune et de la flore.
Pour anticiper sur ce scénario «cygne noir», des mesures rappelant l’esprit du Great reset sont prises d’ores et déjà pour réduire les investissements dans le secteur des énergies fossiles et décroître le développement des outils d’intelligence artificielle en faveur de l’extraction du pétrole et du gaz.
Plus proche de nous, à l’occasion de la Covid-19, des tentatives de ralentissement des activités humaines sont insidieusement imposées à travers le confinement, la distanciation et d’autres formes de limitation de nos déplacements.
Ce type de décision -unique dans l’histoire- serait en harmonie avec l’esprit des accords de Paris sur le climat qui prévoient la réduction de 5% des émissions de gaz à effet de serre jusqu’en 2050. Adopté tous les ans, ce type de mesures entraînerait forcément la réduction de nos activités dans les années à venir.
Autre risque, est qu’en diminuant de 5% tous les ans les émissions de gaz, le PIB sera contracté de 4 à 5%. Cette baisse programmée de la croissance plongerait l’économie mondiale dans une récession programmée dont les effets seront certes bénéfiques à long terme sur l’environnement, mais dramatiques du moins à court terme sur la survie et le développement des populations, les plus vulnérables.
En attendant que les hommes de Davos, daignent nous renseigner sur l’avenir qu’ils nous préparent , il nous reste plus qu’à patienter pour voir comment Monsieur Klaus Schwab « va préparer le lit sur lequel devra coucher l’humanité, et si l’humanité n’est pas adaptée, comme disait Procuste, ce sera tant pis pour l’humanité » dixit Aldous Huxley- Le meilleur des mondes.
Mondher Khaled
Expert en planification stratégique